« Je ne crois pas aux hommes providentiels. Je n'y crois pas. […] Ce n'est pas un nouveau Président de la République qui changera tout. Un mot si vous permettez, rien ne ressemblera plus à la France d'après l'élection présidentielle que la France d'avant », ces mots prononcés le 30 janvier 1995, réfutant le mythe du sauveur et du changement possible, sont de Nicolas Sarkozy alors porte-parole d'Edouard Balladur, candidat à la présidence de la République. Pourquoi débuter et introduire une démonstration par la dénégation du sujet lui-même, par la contradiction du titre donné, ôtant potentiellement tout sens au thème de l'étude? Comment poursuivre celle-ci avec une telle contradiction initiale qui annule le sens propre du raisonnement ? Tout le paradoxe est là, cette réfutation première prouve le sens de l'étude et la validité du sujet. Si le politique Nicolas Sarkozy s'ingénie vivement à contester l'existence de l'homme providentiel, c'est bien que le questionnement intrinsèque existe. L'homme rationnel en effet ne réfute pas ce qui n'a pas d'existence ni ce qui ne pose pas question. Investi dans une campagne électorale Nicolas Sarkozy nie avec force le mythe du sauveur, il donne alors paradoxalement toute validité à son existence interrogeant ainsi les consciences et les mentalités. La réfutation par le corps même du sujet du sens de l'étude donne validité à celle-ci. L'étude du lien et des rapports entre Nicolas Sarkozy et le mythe de l'homme providentiel a validité d'existence, son développement rationnel peut donc conduire à l'élaboration de conclusions intéressantes et constructives.
L'étude cherche ici avant tout à développer l'intérêt d'une vocation historique ne relatant ni le présent ni les réflexions sur l'avenir. Il s'agit ici de considérer le rapport entre Nicolas Sarkozy et le mythe de l'homme providentiel comme objet d'étude historique. L'homme politique est en lui-même l'aboutissement d'une histoire personnelle mais aussi d'une histoire de son camp s'insérant dans l'histoire politique de la France. Sans vocation de statuer sur la destinée d'un mandat en cours ni d'enquêter sur les flots d'actualités quotidiennes, notre étude se contente modestement de tisser les liens, les interactions et les influences entre Nicolas Sarkozy comme sujet historique et le mythe du sauveur, tradition de l'histoire politique française. Notre sujet a-t-il une légitimité historique ou ne rentre t-il que dans la catégorie du journalisme et de la chronique d'actualité ? L'objet historique ne se définit t-il que par sa temporalité, par la disparition de ses acteurs et de ses témoins ? En ce cas notre étude ne rentre pas dans cette optique intellectuelle puisque traitant d'un homme politique vivant, en pleine activité, au sommet de la hiérarchie politique française et de surcroît en plein exercice de ses fonctions.
[...] La faculté d'incarnation prophétique de Nicolas Sarkozy fut-elle une raison de son succès ? L'arme absolue chez le candidat de l'UMP fut la parole politique sacralisée comme un principe fondamental et transcendantal, de plus un lien charnel et dialectique sembla se créer entre la foule et l'orateur. Au final apparaît un processus d'admiration systématique en Nicolas Sarkozy où la foule l'édifia en la figure du guide : La parole comme principe. Le caractère éminemment autocentré et égotique du discours sarkozien conféra à la parole une force nouvelle et vigoureuse. [...]
[...] Nicolas Sarkozy triompha par un pathos liant amour et souffrance, par un éthos puissant et charismatique. Nicolas Sarkozy dut une partie de sa victoire et une partie de sa capacité à incarner l'homme providentiel à sa réussite de captation des valeurs fondamentales attendues par le peuple français : Les batailles des images. La société médiatique du XXIe siècle est constituée en une masse de médias dispersés multipliant les supports et les vecteurs d'information. Ce décuplement et cette fragmentation médiatique facilitent naturellement la diffusion des images des hommes politiques. [...]
[...] Est-il par endroits le sauveur capable par son action de sauver des vies, de défendre le faible contre le puissant, de ramener à la liberté les emprisonnés de l'injustice ? Dans ce cas, il n'est plus question ici de sauveur métaphysique, imaginaire ou tutélaire, mais bien d'une action décisive agissant dans l'objectif d'épargner la douleur, la tristesse et la vie des victimes. Le Président de la République reçoit naturellement le rôle de garant des Droits de l'Homme, de défenseur du faible et de l'opprimé. Nicolas Sarkozy s'évertua à s'investir dans des opérations médiatiques de sauvetages. [...]
[...] Le candidat à la présidence doit sans cesse faire acte de rassemblement et d'unité dont l'histoire est un vecteur. L'héritage de la nation tient ici un rôle de stratégie politique visant le trouble chez l'adversaire. L'homme providentiel se doit d'apparaître dans la lignée d'un héritage historique et politique. Quelles furent les références sarkoziennes lui permettant d'incarner l'unité historique nationale ? De quelles traditions politiques se réclama-t-il ? Le candidat de l'UMP réveilla une série de mythes nationaux dans ses choix de références historiques, il fit de nombreuses références à la tradition du gaullisme qui apparut alors comme une simple posture de témoignage : Du choix des références. [...]
[...] Le sauveur se veut appele par le peuple, pour Nicolas Sarkozy cette médiatisation, s'accompagnant de l'entretien du mystère et de l'attente, fut le moyen privilégié pour susciter et provoquer cet appel. En ce sens, on peut évoquer ici la figure du boulangisme qui sembla ressurgir chez Nicolas Sarkozy. De même, il ne cessa jamais au cours des cinq années de tenter de s'édifier tel l'indispensable recours de toutes les crises et de toutes les affaires de la France, illustrant ainsi sa volonté d'héroïsation par une indispensabilité travaillée. A : UN PLAN QUINQUENNAL, 2002-2007. Quels objectifs poursuit Nicolas Sarkozy en développant une présence médiatique permanente ? [...]
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