Au premier tour des élections présidentielles 2007, les deux candidats des deux grands partis de droite (UMP) et de gauche (PS) rassemblent à eux seuls 57% des suffrages exprimés. Du jamais vu depuis 1974. A l'époque, Mitterrand était le candidat d'une gauche plurielle. Ce qui fait l'ampleur du chiffre d'avril 2007, c'est que Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy sont chacun à la tête d'un seul parti. Ainsi, les résultats de l'UMP et le PS semblent condamner les autres partis à faire de la quasi figuration.
Alors que pendant la campagne électorale, on parlait d'éclatement des candidatures insinuant un possible retour du multipartisme, et du développement d'un centre devenu autonome menaçant le clivage gauche/droite, les électeurs ont bien semblé ratifier, à l'issu de ce scrutin, une dynamique politique tendant vers le bipartisme. La tendance serait le passage d'un système bipolarisé à un sytème bipartisan: alors que le premier peut prendre la forme d'une opposition de deux alliances politiques et électorales, le second suppose la domination d'un parti dans chacun des pôles. Il repose sur la vocation d'un des partis à incarner l'ensemble du camp.
[...] La thèse du bipartisme sort confortée des élections de 2007 Déjà pendant la campagne, par l'essor du rôle des sondages et des médias, Royal et Sarkozy étaient vus comme les deux présidentiables légitimes avant même d'être officiellement candidats. La présidentialisation du régime était alors pleinement assumée. Au sortir du scrutin du 22 avril 2007, jamais deux partis n'ont dominé aussi nettement le système des partis français. Le total de leurs voix a atteint les deux tiers des suffrages. Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy ont rassemblé l'une et l'autre des électeurs de leur camp. Les conditions d'un système bipartisan existent bel et bien. [...]
[...] Puis les différentes forces présentes au sein de chaque pôle ont été amenées à se disputer la domination au sein de leur propre camp marque sur ce point un tournant: la défaite de la droite modérée de Valery Giscard d'Estaing rend au parti gaulliste son leadersip sur la droite, et la victoire de Mitterrand et le recul du parti socialiste assure au parti socialiste une prééminence au sein de la gauche qui s'est muée en bipartisme Le système d'organisation binaire du champ politique a profondément changé de nature après les réformes de 2001 instituant le quinquennat et l'inversion du calendrier électoral. Les moments d'expression des légitimités présidentielle et législative sont désormais concomitants, ce qui donne une très forte probabilité de victoire au parti du président élu. Le résultat: une présidentialisation accrue, la quasi-impossibilité de cohabitation, et une accélération du rythme de la vie politique qui semble dès le mi-mandat se résumer à la compétition présidentielle. [...]
[...] Le bipartisme s'inscrit en effet dans le cadre général de la démocratie libérale et on considère qu'il en facilite considérablement l'exercice. Il présente plusieurs avantages. Il offre au peuple l'avantage de la clarté. Généralement, l'un des partis incarne un certain conservatisme, l'attachement à l'ordre et à la tradition, cependant que l'autre s'affirme partisan du progrès, orienté vers l'évolution et le mouvement: ce sont là deux constantes de l'esprit humain entre lesquelles l'électeur peut se prononcer en toute connaissance de cause. [...]
[...] Quant à la droite, même si l'UMP a réussi à se défaire à la fois de la concurrence de l'UDF et du Front national, il faudra encore attendre les prochaines élections pour savoir si celles de 2007 marquent un véritable réalignement en sa faveur ou si, au terme de l'actuel quinquennat de Nicolas Sarkozy, le centre et l'extrême droite réussiront à retrouver une position dans le système partisan qui puisse remettre en cause la forte domination de l'UMP sur la droite. Ainsi, quelle que soit l'appréciation qualitative que l'on se fait du bipartisme, la tendance est loin d'être illusoire. Un bipartisme imparfait certes, mais qui vient contrecarrer l'idée d'une tradition française d'un pluralisme polarisé. Son avenir ne peut cependant être scellé. [...]
[...] Vers un espace politique bipartisan?», Gérard Grunberg Gérard Grunberg, Vers un espace politique bipartisan ? dans Pascal Perrineau, le vote de rupture. Les élections présidentielles et législatives d'avril juin 2007, Science Po les presses, Chroniques électorales P.253-270 Au premier tour des élections présidentielles 2007, les deux candidats des deux grands partis de droite (UMP) et de gauche rassemblent à eux seuls 57% des suffrages exprimés. Du jamais vu depuis 1974. A l'époque, Mitterrand était le candidat d'une gauche plurielle. Ce qui fait l'ampleur du chiffre d'avril 2007, c'est que Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy sont chacun à la tête d'un seul parti. [...]
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