Lorsqu'il prononce son discours à Verdun-sur-le-Doubs le 27 janvier 1978, dit "discours du bon choix", Valéry Giscard d'Estaing est depuis 1974 Président de la République, son arrivée au pouvoir marquant une nouvelle ère quant à la conception et la pratique de cette fonction au sein de la Vème République, puisqu'il succède aux deux gaullistes qu'étaient Charles de Gaulle et Georges Pompidou. La France est alors à quelques semaines des élections législatives qui se dérouleront les 12 et 19 mars 1978. L'allocution de Valéry Giscard d'Estaing est donc inévitablement axée autour du thème du résultat de ces élections et des conséquences qu'aura ce résultat sur 'l'avenir"( ligne 35 ). Le Président s'adresse naturellement à la population de Verdun-sur-le-Doubs, mais plus précisément à l'électorat flottant, celui qui, à son sens, "fait" l'élection ( nous y reviendrons plus tard ). D'une manière qui cherche à instaurer un rapport inégalitaire entre lui-même et son auditoire, il l'avertit de l'impact négatif qu'aurait une victoire du programme commun sur le sort de la France et cherche ainsi à s'assurer d'une majorité de droite à l'Assemblée nationale pour terminer son septennat. Le discours peut être découpé en 3 parties distinctes, qui s'articulent autour de son argumentation visant à convaincre l'électeur de faire le "bon choix" lors des législatives qui approchent :
De la ligne 1 ( "Mes Chères Françaises..." )à la ligne 24 ( "Je m'adresse à vous" ) : Un appel aux français à faire le bon choix.
De la ligne 25 ( "Certains ont voulu..." ) à la ligne 36 ( "... des affaires de la France" ) : Appel, justifié par la position d' "arbitre et de responsable" du Président.
De la ligne 37 ( "L'application...") à la fin du discours : Choix, qui devra être assumé en toute conscience des risques encourus.
[...] D'ailleurs, Valééry Giscard d'Estaing prend soin de souligner sa supéérioritéé àà la ligne 20 : " Moi qui, dans ma fonction, connais bien les limites du savoir". L'éétablissement de ce rapport d'autoritéé permet àà Valééry Giscard d'Estaing d'inciter son auditoire àà faire un choix certes, mais plus particulièèrement, le bon choix, qui est en vééritéé celui du Préésident (c'est-àà-dire celui de choisir la droite lors des éélections). Valééry Giscard d'Estaing critique certains éélecteurs et leur comportement de la ligne 6 àà la ligne 8 ( "Comme si tout éétait plus simple si les Franççais n'avaient pas àà se déécider et si l'on pouvait déécider pour eux") en les préésentant comme indéécis et lââches, c'est encore une fois une faççon de se placer au dessus d'eux et d'inciter son auditoire àà se ranger derrièère lui, derrièère son savoir. [...]
[...] Valééry Giscard d'Estaing met ici en avant le spectre du chôômage et de la hausse des prix, que les nationalisations, la rééduction du temps de travail, la hausse des salaires préévus par le programme commun soulèèveraient selon lui. Il emploie comme àà son habitude une phrase réécapitulative simple et choc pour appuyer son propos : "Une France moins compéétitive serait une France au chôômage" (ligne 48 et 49).Valééry Giscard d'Estaing est alors conscient que les Franççais sont méécontents de la situation ééconomique en France, oùù les effets du choc péétrolier de 1973 se font ressentir. [...]
[...] Il est intééressant de noter que Valééry Giscard d'Estaing utilise le terme de "programme commun" pour qualifier la gauche, alors que celui-ci est rompu depuis septembre 1977. Peut-êêtre est-ce dans le but de faire en sorte que les éélecteurs continuent d'associer socialisme et communisme, et que la peur du communisme les pousse àà se ranger derrièère la majoritéé de droite et non derrièère le socialisme, alliéé du communisme. Enfin, Valééry Giscard d'Estaing termine son discours en avertissant les éélecteurs que mêême s'ils sont libres de leur choix, ils doivent êêtre prêêts àà en assumer les consééquences, car il ne serait pas en mesure d'ééviter la mise en oeuvre du programme commun : certes il resterait au pouvoir, ce qui marque une difféérence par rapport àà la conception gaullienne du pouvoir qui aurait voulu qu'en cas de dééfaite éélectorale, le Préésident de la Réépublique quitte son poste, mais la constitution ne lui donne pas les moyens de faire obstacle àà la rééalisation de ce programme. [...]
[...] Cette responsabilitéé implique de rééflééchir aux problèèmes de la France, et c'est pourquoi Valééry Giscard d'Estaing use de sa libertéé d'expression pour "mettre en garde les citoyens" (ligne 35) contre un mauvais choix lors des éélections qui approchent. Enfin, Valééry Giscard d'Estaing montre, pour achever de convaincre son auditoire de l'importance de faire le bon choix et de sa léégitimitéé àà s'exprimer, que la Nation est bien en danger lors de ces éélections léégislatives : il préécise les risques que comporterait l'application du "Programme commun" en insistant sur son incapacitéé àà y reméédier en tant que Préésident de la Réépublique. [...]
[...] On peut tout de mêême supposer qu'il s'agit de la gauche en géénééral, qui souhaite un pouvoir préésidentiel moins fort, et renforcer les préérogatives de l'Assembléée nationale ou encore plus prééciséément de F. Mitterrand, son adversaire de l'éélection de 1974. Valééry Giscard d'Estaing dééclare, ligne 26, pour affirmer son droit àà la parole : "Curieuse Réépublique qui serait préésidéée par un muet". Cet argument est une faççon de discréédibiliser ces opposants éévoquéés àà la ligne supéérieure ("certains") et de rejeter avec eux les IIIe et IVe Réépubliques, qui, comme on le sait, ne faisaient pas preuve d'un pouvoir préésidentiel fort et ont éétéé fortement critiquéées en raison de cela. [...]
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