Longtemps exclues de la sphère politique, les françaises ont obtenu la pleine reconnaissance de leur citoyenneté par l'ordonnance du 21 avril 1944. Cette reconnaissance tardive a entraîné pendant de nombreuses années des comportements électoraux très différents de ceux des hommes. Et c'est cette différence qui a fait émerger la femme comme catégorie spécifique en science politique, catégorie d'autant plus importante qu'elle représente 52,5% de l'électorat français, soit 2 210 000 voix de plus que les hommes.
Il est important de noter qu'on parle aujourd'hui d'étude du genre, ce qui intègre une dimension sociale, historique, sociologique et culturelle. Le comportement électoral des femmes est donc à analyser comme le résultat d'une construction sociale et non comme une durée naturelle qui serait l'effet du sexe biologique. Cela implique une évolution constante du genre sous l'effet de l'éducation, du travail ou encore des représentations sociales. Cette évolution se répercute évidemment sur les comportements électoraux des femmes.
On peut donc se demander en quoi l'étude du genre permet d'expliquer les comportements électoraux, et si elle demeure pertinente aujourd'hui dans la mesure où l'évolution du statut des femmes dans la société tend à affaiblir la domination masculine?
J'évoquerai tout d'abord l'évolution des comportements électoraux des femmes depuis qu'elles ont obtenu le droit de vote. J'aborderai ensuite les nouvelles spécificités de leurs comportements. Et pour finir, il conviendra de souligner que l'électorat féminin n'est pas monolithique.
[...] On peut donc toujours distinguer des spécificités de l'électorat féminin, mais il ne faut pas négliger le poids des autres variables au sein de cet électorat. III. Le poids des autres variables Comme le souligne Mariette Sineau, l'électorat féminin n'est pas monolithique, il est encore plus traversé de fortes lignes de clivages que l'électorat masculin L'âge Tout d'abord, on remarque que les hommes et les femmes n'émettent pas le même vote aux deux extrémités de l'échelle des âges : gender generation gap, qui signifie que les jeunes hommes votent moins à gauche que les jeunes femmes alors que, chez les seniors, le conservatisme penche du côté des femmes. [...]
[...] Ce qui peut apparaître comme un comportement assez paradoxal dans la mesure où les femmes sont plus touchées par la précarité. De plus, elles manifestent plus souvent des attitudes autoritaires, nationalistes, racistes et eurosceptiques, allant d'habitude de pair avec le vote FN. Lorsqu'elles sont électrices ou sympathisantes du FN, les femmes expriment une sur adhésion aux valeurs racistes et nationalistes de ce parti par rapport aux hommes. Au début du XXIe siècle, les Françaises réaffirment leur volonté d'être autonomes, dans tous les sens du terme, et leurs comportements électoraux apparaissent liés dans une large mesure à leur nouveau statut. [...]
[...] Or on sait que les catholiques pratiquants ont un comportement électoral plus conservateur. Ce triple impact de leur entrée massive dans la vie économique, de la hausse du niveau d'éducation et de leur prise de distance vis-à-vis de la religion va dans le sens d'une plus grande politisation et d'une orientation plus marquée à gauche. Le statut des femmes a donc changé et elles ne se conçoivent plus uniquement comme des mères et des épouses. Elles sont en mesure d'apprécier quelles sont les forces politiques susceptibles de défendre les droits qu'elles ont acquis. [...]
[...] À cette date également, le taux de non-inscription sur les listes électorales s'égalise à pour les hommes comme pour les femmes. Les écarts concernant le taux d'abstention restent faibles. En 1988: 15% des hommes et 17% des femmes s'abstiennent. Les écarts sont plus importants lors des scrutins moins décisifs (européennes moins mobilisatrices chez les femmes) mais ils ne dépassent pas 5 points. Exception de 1999 : 49% des hommes contre 56% des femmes se seraient abstenus Un léger écart a pu être observé en 2002 des femmes contre 26% des hommes). [...]
[...] Cette évolution traduit les mutations qui ont affecté le monde féminin depuis le début des années 60. Si les femmes d'aujourd'hui ne sont plus aussi conservatrices, c'est bien parce que leur statut dans la société comme leur manière de percevoir ce statut a changé. En 1971, les femmes deviennent plus nombreuses que les hommes à fréquenter l'enseignement supérieur, ce qui favorise la politisation. En 1978, Janine Mossuz-Lavau et Mariette Sineau ont montré que le foyer, entretient des comportements traditionnels et conservateurs. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture