Tournant managérial des partis politiques, sarkozysme, gestion d'un parti, entreprise électorale, modèle entrepreneurial, Schumpeter, marché électoral, financement public de la vie politique, affaire Urba, transparence des comptes politiques, professionnalisation des emplois, UMP marketing électoral, loi d'airain de l'oligarchie
Dans son ouvrage "Les Droites en fusion : transformations de l'UMP", la spécialiste des droites Florence Haegel décrit la transformation des pratiques au sein des partis. Selon elle, "le sarkozysme n'est pas une doctrine, mais des pratiques et une stratégie", c'est une "manière de faire de la politique avec beaucoup d'argent, de communication, de professionnalisation en calquant le modèle partisan sur celui de l'entreprise". L'UMP, décrit par un lexique propre au management, semble ici fonctionner comme une entreprise.
On peut parler de "parti managérial", qui adopte donc un ensemble de techniques de direction, d'organisation efficace et de gestion rationnelle afin d'atteindre ses objectifs, l'ultime étant électoral. Cette "nouvelle version de la modernisation organisationnelle" selon les mots de Petitfils, n'est pas exclusivement propre à l'UMP. Elle s'est généralisée dans la société de consommation capitalistique d'après-guerre des États Unis, dès la campagne rationalisée et stratégique d'Eisenhower pour les présidentielles en 1952, avant d'embrasser la France dans les années 60-70.
[...] « La dispersion hors du parti des missions autrefois confiées principalement aux collaborateurs permanents est dès lors concurrencée par diverses catégories de professionnels » toujours d'après P. Aldrin. En effet, c'est avec Obama en 2008 que les tendances de marketing digital se sont encore plus investies dans le domaine politique. En deux ans de campagne, grâce à sa mobilisation sur internet, le président des États-Unis a fait travailler près de deux millions de personnes pour sa cause. Les militants, d'ailleurs recrutés sur internet, étaient organisés selon des strates très hiérarchisées et avaient des objectifs chiffrés imposés. [...]
[...] C'est une véritable culture de la performance. À l'UMP, on assiste à l'emploi du langage marketing sous impulsion Éric Woerth, diplômé de HEC, qui proposait une restructuration du parti en faveur de 3 marchés : celui des citoyens, celui des adhérents et celui des élus. Lorsque Sarkozy est élu en 2004 à la tête du parti, il avait pour objectif de « doubler les parts sur le marché des adhérents » en un an, qu'il gérera par des techniques managériales comme contrats d'objectifs, des outils d'évaluation des performances (ex. [...]
[...] Cette véritable spécialisation du travail va de pair avec une nette hiérarchisation. En effet, les employés de ces départements sont eux même sous la responsabilité politique de différents secrétaires nationaux et qui resteront désormais sous la direction administrative d'un même cadre permanent, le « chef de département ». Il y a donc un fossé encore plus marqué entre dirigeants et dirigés ne serait-ce que par le salaire. Une technicisation des activités conformément à cette rationalisation 1. Professionnalisation des recrutements et des emplois Les recrutements deviennent techniques : fiches de poste, protocole de sélection, embauche de non-encartés La nécessité du militantisme avant d'être permanent semble aujourd'hui à relativiser, logique largement moins subjective, mais objective, correspondant à un glissement propre à l'entreprise. [...]
[...] Jusqu'aux lois sur le financement public de la vie politique, l'origine comme l'usage de l'argent des partis français relevaient de pratiques officieuses, souvent illégales, mais généralisées à l'ensemble des partis. En introduisant l'argent public dans les recettes des partis, le législateur impose une transparence de leurs comptes et la fin des circuits de financement dits « occultes ». En effet, la loi sur les financements après l'affaire Urba dans les années 90 nécessite la transparence des comptes des partis politiques, mais surtout une rationalisation de la gestion des comptes. On assiste alors à une accélération du souci d'optimisation et de la tendance à « l'entrepreunarisation » financière. [...]
[...] II) Un tournant managérial paradoxal face à l'éthos des partis : vers une dénaturation de l'organisation partisane ? Dans une seconde partie, nous allons souligner le paradoxe entre le tournant managérial et l'éthos des partis. L'éthos étant son caractère, à défaut d'être initialement entrepreneurial, il était surtout idéologique (SFIO, PCF, Parti radical . ) et plus démocratique, le fossé interne et avec la société étant moins creusé. Même si on peut naturellement penser à une dénaturation partisane, quelques caractéristiques inaliénées tendent à la relativiser. [...]
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