« C'est encore au nom du refus (refus de la révolution qui caractérisait l'extrême droite née en France il y a un peu plus de 2 siècles) que s'est créé en 1972 puis développé dans les années 1980 le Front national, sous l'autorité de Jean-Marie Le Pen. Refus du « système » qui gouverne la France et laisse de côté des petites gens. Refus de la « bande des quatre », ces partis qui se partagent le pouvoir, à droite et à gauche. Rejet des gouvernements successifs, incapables de résoudre la crise économique et d'enrayer le chômage. Rejet des élites, des politiques, des intellectuels, des journalistes, qui ne pensent qu'à défendre leurs intérêts et négligent ceux du peuple. Rejet des étrangers, des immigrés, des délinquants, qui portent atteinte à la cohésion de la nation et à la tranquillité des Français.
Peur de la modernité, de l'Europe, de la mondialisation, qui sont autant de menaces pour l'identité de la France. Peur de l'Autre, peur de quiconque se veut différent. Révolte de « ceux d'en bas » contre « ceux d'en haut », qui ne savent pas les entendre ni répondre à leurs demandes. Révolte des laissés-pour-compte contre les privilégiés, des oubliés de la croissance contre les profiteurs de l'expansion, des pauvres contre les riches, des exclus contre les nantis. » Voilà, en peu de mots, l'idéologie frontiste résumée. Il est en effet important de la comprendre pour être ensuite capable de discerner les différents moments qui ont marqué l'histoire électorale de ce parti, et de pouvoir comprendre les différentes dynamiques, qu'elles soient ascendantes
La première décennie d'existence du Front National n'est pas placée sous le signe de la réussite, mais pas véritablement marquée par l'échec puisque on ne peut dire du FN à cette époque qu'il est un parti politique pleinement intégré à l'échiquier politique français. C'est réellement à partir de 1983, date charnière dans l'histoire du FN, que pourront être analysés les différentes dynamiques et les différents moments de l'histoire électorale du parti frontiste.
Nous verrons donc qu'après une décennie d'ascension ininterrompue, et l'apogée du mouvement le 21 avril 2002, le parti majoritaire d'extrême droite est aujourd'hui en proie à une succession d'échecs et à une profonde remise en cause.
[...] Néanmoins, malgré les difficultés électorales et financières, le FN n'est pas mort, puisqu'il regroupe encore 4 millions d'électeurs. Il a bien su renaître de ses cendres après la défaite de 1999, et un 21 avril reste encore possible, même si aujourd'hui moins probable (la droite modérée actuelle allant de temps à autre sur la chasse gardée du FN, prise de conscience du danger frontiste Thomas FERENCZI dossier Le Monde 28/04/2002 Ces Français qui votent Le Pen, Flammarion p.479. Edition Flammarion p Le Monde, 4/5/1999 - Copeau Analyse pour l'IPSOS La Croix, 15/11/2007 Analyse de Nonna Mayer pour l'institut TNS-SOFRES http://www.tns- sofres.com Erwan Lecoeur, Dictionnaire de l'extrême droite. [...]
[...] Le jeu de ces votes contraires à sa préférence représente 10% de l'électorat du 21 avril note Nonna Mayer. Si tous les électeurs avaient voté selon ses préférences nous dit-elle, le séisme du 21 avril n'aurait peut-être pas eu lieu Cela est lié au statut particulier du premier tour des élections présidentielles : le premier tour est l'occasion d'un cri du cœur c'est là où le vote protestataire prend toute sa substance, exprimant un ras-le-bol contre la classe politique alors au pouvoir. [...]
[...] La sécurité arrive très souvent en tête des préoccupations des Français. Aussi, l'opinion réclame une justice plus sévère. Il apparaît donc logique que les intentions de vote augmentent pour un parti qui a fait depuis longtemps de la lutte contre la délinquance et l'utilisation d'une répression autoritaire siennes. Au contraire, ce sujet relève peu de la culture traditionnelle de gauche et celle-ci ne va pas parvenir à être crédible dans ce domaine. De plus, la mise en place de certaines mesures par la gauche alors au pouvoir (en période de cohabitation), comme le PACS ou encore la loi sur la parité, remportant une vive opposition. [...]
[...] Néanmoins, à la vue des différents échecs (dont plusieurs consécutifs récemment), montrent les limites de la dynamique frontiste : une difficulté à accepter le changement (comme le démontre la présence de Bruno Gollnisch et l'appel du FN à participer à une manifestation contre l'avortement dimanche 20 janvier 2008, plus de 30 ans après la loi Veil), même lorsque celui-ci est accepté par la grande majorité de la population. Le FN semble avoir quelques difficultés à parler d'une seule voix, comme nous l'a montré la scission de 1999, mais aussi plus récemment la ligne de fracture entre les deux candidats potentiels à la succession de Jean-Marie Le Pen : quelle attitude adopter ? Modernité ? Respect de la ligne mère du parti ? [...]
[...] Ceci traduit bien l'exploitation de ces faits par le parti De plus, des faits ponctuels, comme le mouvement de grèves de 1995 à propos de la réforme Juppé de la Sécurité Sociale contribuent à amplifier une image impopulaire de l'Exécutif, qui apparaît complètement détachée de la population et de ses aspirations. Tous ces mécontentements laissent l'opportunité au FN de s'exprimer sur la scène politique, et même de la structurer. Le RPR et l'UDF en subissent les conséquences, comme on peut le voir dans le report des voix des électeurs déçus de la droite classique Cette récupération est rendue facile par la libéralisation rapide du RPR, laissent ainsi au FN un espace nationaliste et populiste vacant. Les succès remportés par le FN dans les vieux bastions gaullistes l'approuvent. [...]
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