Depuis les années 90 en France et dans d'autres pays occidentaux, on assiste à des phénomènes tels que la montée de l'abstention aux élections, la baisse du nombre d'adhérents dans les partis politiques, les syndicats et les associations qui conduisent de nombreux politologues à évoquer une dépolitisation de la société et à en rechercher les causes. L'une d'elles la plus souvent avancée serait la désidéologisation qui toucherait les principaux partis politiques français et qui remettrait en cause le clivage gauche-droite, lequel structure la vie politique française depuis plus de deux cents ans.
En effet, en 2000, dans une enquête du CEVIPOF, le pourcentage des Français ne se disant « ni de droite, ni de gauche » était de 32%, contre 20% en 1995. La constante hausse, depuis quelques années dans les sondages, de la part des « ninistes » oblige à s'interroger sur la validité d'un tel clivage : est-il encore pertinent pour comprendre la vie politique française ? Ces notions de gauche et de droite signifient-elles encore quelque chose, peuvent-elles toujours être opposées, ou bien ne sont-elles plus que des « fleurs de rhétorique », d'après l'expression utilisée par Colette Ysmal ? Pourtant, d'une part les citoyens continuent à classer les partis politiques dans les termes de gauche et de droite, ce classement faisant même l'objet d'un véritable consensus, et d'autre part la majorité d'entre eux continuent à se situer sans problème dans l'une ou l'autre des familles. En outre, si les électeurs sont parfois volatiles et votent pour des partis différents à plusieurs élections, en revanche ils sont très peu nombreux à franchir la frontière gauche-droite et se contentent le plus souvent de voter pour différents partis de gauche ou de droite. C'est cet apparent paradoxe qu'il faudra étudier et tenter de comprendre. Si la comparaison de la situation actuelle avec celle que la France connaissait il y a 30 ans ne peut que nous conduire à parler d'un affaiblissement du clivage gauche-droite, en revanche une étude des différents systèmes de valeur à l'origine de chaque tendance ou du système politique français qui impose le principe majoritaire montre que ce clivage reste pertinent pour comprendre la vie politique française.
[...] La première, celle qui revient le plus souvent dans les études portant sur ce sujet, serait le rapprochement idéologique des grands partis de gauche et de droite ou, comme le nomme René Rémond dans son livre La politique n'est plus ce qu'elle était, l'avènement du consensus L'avènement du consensus Pour de nombreux auteurs, il y aurait un affaiblissement du clivage gauche-droite en raison d'un consensus comme le nomme René Rémond, ou du moins un rapprochement idéologique entre les deux grands partis de gauche et de droite. Tout d'abord, et c'est probablement le point le plus important, le consensus est apparu dans le domaine socio-économique. C'est ce que montre Etienne Schweisguth dans plusieurs articles, notamment dans le chapitre intitulé L'affaiblissement du clivage gauche-droite paru dans le livre L'engagement politique : déclin ou mutation ? sous la direction de Pascal Perrineau. Il montre qu'un changement important a eu lieu dans les années 1980, avec l'arrivée de la gauche au pouvoir, avant tout en matière socio- économique. [...]
[...] Que reste-t-il du clivage gauche-droite? Depuis les années 90 en France et dans d'autres pays occidentaux, on assiste à des phénomènes tels que la montée de l'abstention aux élections, la baisse du nombre d'adhérents dans les partis politiques, les syndicats et les associations qui conduisent de nombreux politologues à évoquer une dépolitisation de la société et à en rechercher les causes. L'une d'elles la plus souvent avancée serait la désidéologisation qui toucherait les principaux partis politiques français et qui remettrait en cause le clivage gauche-droite, lequel structure la vie politique française depuis plus de deux cents ans. [...]
[...] Pourtant le conflit assez général entre le gouvernement et les professions de l'enseignement, de la recherche et de la culture vient de montrer que le clivage gauche-droite est toujours là, qu'il se nourrit de réactions et de réflexes marquant l'appartenance à tel ou tel camp. Le gouvernement est accusé de désengager l'Etat de l'espace culturel et scientifique, mais aussi de faire régresser les libertés publiques au nom de la lutte contre la grande criminalité avec la loi Perben, ou d'avoir exercé des pressions sur le judiciaire dans le cadre de l'affaire Juppé. Il semble donc bien se recréer une opposition des plus classiques entre la gauche et la droite. [...]
[...] La première raison à cela est que, comme le remarque Etienne Schweisguth, le clivage n'a jamais pu être identifié à un critère unique, il a toujours posé un problème de définition. A chaque époque, les références permettant aux électeurs de se repérer sur l'axe gauche-droite leur sont fournies par les clivages concernant les enjeux politiques du moment. A chaque époque, certains clivages disparaissent ou perdent de leur importance, tandis que d'autres, qui paraissaient auparavant secondaires, viennent tout à coup occuper le premier plan. C'est cette multiciplicité des clivages pouvant servir de fondement au positionnement à gauche ou à droite qui fait la complexité de l'analyse de la dimension gauche-droite. [...]
[...] Cet avènement du consensus n'est pas sans conséquences sur la vie politique française. En effet, comme le remarque Michel Hastings dans le même article, les candidats à la présidentielle sont obligés de faire oublier leur appartenance partisane pour être élus. Ainsi au cours de la dernière campagne, le candidat socialiste Lionel Jospin, interrogé au 20h de France s'était senti obligé de dire : Mon programme n'est pas socialiste. Le même phénomène a lieu à droite, comme le montre le thème de campagne de Jacques Chirac en 1995, la fracture sociale thème traditionnellement de gauche. [...]
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