L'année 1995 marque le retour incontestable de l'extrême gauche sur la scène politique, LO avec Arlette Laguiller parvient à glaner plus de 5% des voix, s'ensuit le mouvement social de décembre, considéré comme une « bataille fondatrice dans l'historiographie de la gauche radicale » par Denis Pingaud. Depuis, « la gauche radicale » ou « la gauche de la gauche », selon les différentes tournures euphémiques pour désigner cette famille politique, apparaît sur tous les fronts de la lutte sociale: mouvements lycéens et estudiantins (le CPE), le référendum sur le TCE, la réforme des retraites etc. L'extrême gauche, en plus d'être le principal pôle de la contestation sociale, est aujourd'hui à même de s'inscrire durablement dans la vie politique française au regard de sa remarquable percée lors des présidentielles de 2002, mais aussi grâce à ses postes d'élus gagnés au niveau local et européen. Assiste-on à l'éternel retour de l'extrême gauche? Cette gauche, véritable spécificité française, n'a jamais réellement abandonné ses ambitions révolutionnaires et tend à maintenir, et même à accentuer, son existence dans l'échiquier politique français. Grèves généralisées, manifestations, occupations, marches… leurs répertoires d'action sont larges, et malgré la baisse enregistrée des « Journées Non Travaillées » depuis ces trente dernières années, l'extrême gauche ne semble pas avoir perdu de son potentiel d'action, au contraire. Alors, à quoi doit-on son renouveau? Parcourir le champ des répertoires d'action de l'extrême gauche est à la fois instructif de son encrage social mais également de ses évolutions et permanences. La notion de répertoire d'action a été forgée par Charles Tilly comme étant « un modèle où l'expérience accumulée d'acteurs s'entrecroise avec les stratégies d'autorité, en rendant un ensemble de moyens d'action limités plus pratique, plus attractif, et plus fréquent que beaucoup d'autres moyens qui pourraient, en principe, servir les mêmes intérêts ». En ce sens, les répertoires d'action sont de véritables choix stratégiques de la part des acteurs de mouvements sociaux ou de groupes politiques, qui procèdent à une sélection dans un « réservoir » d'actions disponibles dans une société et une époque donnée, en fonction de l'identité des acteurs en lutte, des cibles visées et de l'attitude adoptée par les autorités. Au regard de cette définition, on peut dire que les répertoires d'action de l'extrême gauche française ont changé. Mais, s'agit-il de changements radicaux ou d'une évolution ? Assiste-t-on à un renouveau des répertoires d'action ou ces actions se situent-elles dans la continuité d'une tradition de l'extrême gauche française ?
[...] Ce sont des personnes ressources selon Isabelle Sommier, que la sphère politique parvient à instrumentaliser en s'accaparant une part de leur popularité. D'autre part, les différents courants d'extrême gauche ont parfaitement intégré les changements dus aux NTIC en développant des nouvelles modalités de mobilisation en particulier sur Internet avec un réseau de forums et de médias alternatifs très présents sur la toile. D'autres parts, certains leaders d'organisations ont d'ores et déjà assimilé ces changements importants en matière de média et de communication politique tels qu'Olivier Besancenot ou José Bové qui ont cherché à se créer une image de marque, un label, prompts à mobiliser et à rassembler derrière eux. [...]
[...] On peut remarquer cette nouvelle nécessité pour les organisateurs de mouvements d'extrême gauche d'organiser des manifestations à l'échelle européenne. Selon Christophe Aguiton, responsable d'AC ! et d'ATTAC, un nouveau mode de militantisme est nécessaire pour imposer l'existence sociale des chômeurs, laissés pour compte des grandes confédérations syndicales C'est ainsi qu'il organise en 1994 la première marche contre le chômage : quelques centaines de militants et de sans-emplois traverseront alors la France. Cette manifestation prend une dimension européenne en 1997, avec la marche à Amsterdam, puis à Cologne en 1999. [...]
[...] Il s'agit désormais de changer la société de l'intérieur En abandonnant toute forme de violence révolutionnaire, en s'éloignant de la centralité ouvrière et en acceptant le jeu électoral, l'extrême gauche a simplement adapté ses répertoires d'action aux mutations socioéconomiques de la France. Bibliographie Ouvrages ? Crettiez, Xavier, Sommier, Isabelle, La France rebelle. Tous les foyers, mouvements et acteurs de la contestation, Editions Michalon, Paris ? Collovald, Annie, Gaïti, Brigitte, La démocratie aux extrêmes, la Dispute, Paris ? Pina Christina, L'extrême gauche en France: entre permanence et évolution in Pierre Bréchon Les partis politiques Français, La documentation française ? Pingaud, Denis, La gauche de la gauche, Edition du Seuil, Paris ? [...]
[...] La logique d'action prime aujourd'hui sur la simple idéologie formalisée et stricte. En agrégeant de plus en plus de causes très diverses, cette gauche radicale se positionne donc sans proposer de méta-cadre d'analyse - comme le marxisme dans les années 1970 - qui intégrerait les luttes et les hiérarchiserait dans quelque chose de supérieur selon Eric Agrikoliansky. Par conséquent, sans sortir de l'idéologie marxiste, une partie de l'extrême gauche a su se moderniser en assouplissant ses structures, et s'éloigner de la centralité ouvrière en ouvrant le champ de la révolte légitime à tous les opprimés et autres en s'emparant des mouvements des sans et un certain nombre de revendications post-matérialistes. [...]
[...] L'association Droit au logement créée en 1990, a largement contribué à l'évolution des répertoires d'action collective durant les dix dernières années en utilisant des modes d'action directe. On observe le même type d'action avec les sans-papier qui à partir de 1996 vont errer à Paris de gymnases en églises, pour trouver refuge, finalement, dans l'église Saint-Bernard. Ces modes d'actions permettent à des individus à faibles ressources mobilisatrices d'interpeller l'opinion publique. Ils sont largement soutenus par les organisations d'extrême gauche. Plusieurs collectifs se mettent ainsi en place : le DAL, AC ! [...]
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