« Ce n'est pas à soixante-sept ans que je vais commencer une carrière de dictateur. » déclarait le Général de Gaulle le 15 mai à la presse. Aujourd'hui encore, même si on reconnaît majoritairement qu'il a permis à la France de sortir d'une crise politique et militaire, nombreux sont ceux qui lui reprochent encore d'avoir exercé de manière personnelle le pouvoir. C'est ainsi que François Mitterrand en 1964 dans son essai Le coup d'Etat permanent dénonce non seulement un coup d'état circonstanciel mais aussi la pérennisation de ce coup d'état, sa transformation en un « coup d'état permanent » à l'aide d'une Constitution inféodant les institutions au chef de l'Etat et d'une pratique politique se moquant de la justice.
Nous nous interrogerons sur cette affirmation de l'inféodation des institutions au président de la République française en abordant le rapport particulier du chef de l'Etat et du chef du Gouvernement. En effet, la répartition des pouvoirs entre ces deux têtes de l'exécutif français contribue à approcher le lien entre Constitution formelle et Constitution matérielle. Une première approche nous permettra de développer la présidentialisation de l'exécutif français dans les débuts de la Ve République (I) puis nous verrons qu'à partir de mars 1986 et la première cohabitation, cette présidentialisation fut remise en cause, en fait et en droit (II). Les enjeux de cette réflexion apparaissent immédiatement : notre Constitution peut-elle encore durer dans une telle ambiguïté ? Faut-il clarifier la Constitution française ?
[...] Après la démission du général de Gaulle, le nouveau Président Georges Pompidou demande, au printemps 1973, le passage du septennat au quinquennat : il explique les motifs de cette révision en affirmant que le règle de septennat ne correspond plus au rôle que le président de la République joue dans la définition des orientations générales de politique nationale le président n'est plus seulement un arbitre mais un capitaine. Georges Pompidou mourut avant de pouvoir réviser la Constitution dans ce sens et personne ne le fit à la suite pendant plusieurs décennies. C'est Lionel Jospin qui réintroduit le quinquennat dans le débat pendant les campagnes de 1995 mais Jacques Chirac qui fit la révision en 2000, inspiré par les contingences ou par la cohabitation fâcheuse qui précédait. [...]
[...] On parle alors de régime primo-ministérialiste puisque la fonction de Premier Ministre est quasiment présidentialisée dans la mesure où il devient le véritable chef de l'exécutif. . et à la difficulté de se partager des compétences mal définies. L'interprétation de la Constitution s'est vue confrontée aux ambiguïtés de la Constitution de 1958. Prenons l'exemple de la nomination aux emplois civils et militaires : c'est le Président qui nomme ordinairement, mais le Premier Ministre doit apposer son contreseing, ce qui conduit à une recherche de compromis parfois délicate. [...]
[...] D'abord, le quinquennat permet d'abréger l'occupation du poste présidentiel. Le quinquennat doit permettre d'éviter les cohabitations : à moins d'une grande inconstance, les deux élections simultanées du Président et de l'Assemblée devraient porter au pouvoir les mêmes tendances. Les élections de 2002 ont confirmé cette vision, mais cela ne suffit pas pour confirmer la règle. Le quinquennat doit obliger le Président à travailler harmonieusement avec son Premier Ministre et avec sa majorité, et donc il protège d'un exercice prolongé et solitaire du pouvoir. [...]
[...] Il nous faut néanmoins souligner les risques de déviation plébiscitaire engendrés par les référendums gaullistes : les premiers référendums furent pour selon l'expression de Georges Vedel des référendums de responsabilité de question de confiance populaire traduite par le credo moi ou le chaos et qui contenaient une logique de changement politique lors d'un non C'est ainsi que de Gaulle démissionna en 1969 après le refus du référendum de 1969. Par la suite, les référendums de ses successeurs perdirent cet aspect plébiscitaire pour ne rester que des instruments de participation citoyenne et de légitimation populaire. . [...]
[...] Les pouvoirs partagés entre Président et Premier Ministre entrent dans la catégorie de droit commun. Parmi ces droits, on peut citer le droit d'engager le force de dissuasion depuis le décret du 12 juin 1996 (même si l'article 34 réserve l'organisation générale de la défense nationale au domaine législatif et non règlementaire). Les pouvoirs partagés s'appliquent à toutes les décisions et tous les actes du chef de l'Etat ne faisant pas expressément l'objet de pouvoirs propres en vertu de l'énumération de l'article 19. [...]
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