L'influence des médias sur les foules a fait l'objet de tous les fantasmes, depuis la croyance dans les années 1930 au modèle de la « seringue hypodermique » injectant directement les messages dans les esprits vulnérables, jusqu'aux traits de Citizen Kane dans le film d'Orson Welles. On appelle média un support qui commande une certaine forme d'expression.
Son étymologie latine suggère un rôle d'intermédiaire entre deux sphères. Ainsi, le « quatrième pouvoir » est censé idéalement en démocratie assurer l'articulation entre les gouvernants et les gouvernés, favorisant le débat civique. Pourtant, la sociologie politique s'est saisie de l'objet médiatique pour analyser sa réelle implication sur la vie politique.
En quoi les médias, acteurs nouveaux et au poids croissant dans la relation entre hommes politiques et citoyens, en s'immisçant au cœur de la démocratie, influencent-ils la vie politique ?
[...] Transformation des modalités de travail Les modalités concrètes de travail des hommes politiques sont elles même affectées par l'influence médiatique. Comme on l'a déjà vu en parlant des mutations structurelles de la scène politico-médiatique, la rationalisation du métier de politique, par l'intermédiaire de conseillers en communication et experts en sondages, est une conséquence de la médiatisation de la vie politique. De même, cette médiatisation encourage les hommes politiques à fonder leurs oppositions sur une expertise technique des dossiers plutôt qu'une conception différente du monde fondée sur des clivages sociaux comme dans les années 1960. [...]
[...] : Ainsi, l'influence médiatique sur la pratique et le discours politique est réelle : les hommes politiques on dû s'adapter. Les effets des médias sur les électeurs et les citoyens sont en revanche plus discutés, et plus complexes à mesurer. C'est l'objet de ma dernière partie. III - Influence des médias sur les élections et les perceptions Les effets des médias sur les élections Le sociologue américain Elilhu Katz propose de classer l'influence des médias sur les choix électoraux en deux grands courants : celui des effets limités et indirects et celui des effets directs : Effets limités et indirects Les résultats de l'Ecole de Columbia, représentée par Paul Lazarsfeld dans les années 1940 et 1950, font autorité quant à l'influence des médias en politique : ils concluent que les médias ont des effets limités, indirects et à court terme. [...]
[...] Ainsi, la tendance est à occulter les problèmes chroniques (chômage, pauvreté) et à ne pas s'attacher à la complexité de problèmes qui se règleraient sur le temps long pour satisfaire au temps médiatique. Dans le discours politique même, la tendance est à privilégier les petites phrases percutantes dans les médias, à tenir un discours fondé sur la séduction plus que sur la rationalité. La recherche pour susciter ce qu'on appelle aujourd'hui le buzz politique compte beaucoup dans le travail politique. [...]
[...] D'ailleurs, la montée en puissance du recours aux sondages, à la fois dans les médias et dans la pratique politique (sujet âprement discuté en sciences sociales comme on l'a vu) est un fait majeur de la vie politique, autour des figures du politologue et du sondeur qui se veulent porteurs dans leurs interventions, comme cela se voit par exemple lors des soirées électorales, d'une caution scientifique Consécration de la télévision Enfin, les plateaux de télévision, et en particulier l'information télévisée, se sont progressivement imposés comme les lieux privilégiés de la vie politique : média massif, dominant par rapport aux autres sources d'information, ils offrent les avantages de la gratuité, de l'attractivité visuelle, et offre une audience indifférenciée socialement et politiquement. Ainsi, lors des consultations électorales, le recours à la télévision comme déterminant du vote est massif, pour des votants à la présidentielle de 1995, contre 32% se déterminant à partir de la presse des discussions avec des proches de la radio des professions de foi des sondages des tracts et des affiches. Le journal télévisé est le moyen d'information dominant, à l'audience massive, malgré un léger reflux ces dernières années. [...]
[...] En conclusion, dans une scène politico-médiatique radicalement nouvelle, d'où surgit un électeur de plus en plus individuel et indécis témoin de la consécration du média télévisuel, et de méthodes de communication politique rationalisée, les formes du débat politique et le travail des hommes politiques sont indiscutablement transformés par les médias, tandis que leurs effets sur le vote sont plus diffus, au travers de mécanismes de persuasion de l'information médiatique qui agissent différemment sur chaque téléspectateur. Au final, les médias apparaissent comme une puissance à la fois massive dans nos démocraties, mais dont l'action, diffuse, ne peut être appréhendée que dans ses conditions d'émission particuliers. Multidimensionnelle et ambivalente, la question de la place des médias en démocratie n'appelle donc décidément pas de réponses tranchées et définitives. [...]
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