Les discours d'investiture des présidents américains sont des moments symboliques de la vie politique de ce pays. Ils marquent le passage d'une présidence à une autre ou le cas échéant la ré-investiture d'un président, dans une forme particulière mêlant un contenu célébrant la grandeur de l'Amérique et de ses institutions démocratiques à une conjoncture précise qui impose au discours d'aborder tel ou tel sujet.
On le comprend aisément, il existe d'emblée une certaine tension entre le discours épidictique de louange et de contemplation qu'impose le contexte et le discours politique impliquant la division et souvent la rupture. Les discours d'investiture des présidents américains sont donc pétris de paradoxes. Tantôt consensuels, tantôt écrits en réaction au mandat précédent, ils manient des thèmes et des techniques littéraires communes dans une conjoncture et un cadre cognitif idéologique différents
[...] D'une manière générale, un certain nombre d'hypothèses assez fortes structurent notre comparaison des deux discours de George W Bush. Tout d'abord, on peut légitimement penser au regard des cas de réélection dans l'histoire des Etats Unis, que ce discours s'inscrira dans la lignée des allocutions célébrant le deuxième mandat d'un président : le deuxième discours du président Clinton en est un bon exemple, illustrant la continuité dans laquelle ces discours s'inscrivent. Les présidents concernés incarnant déjà la fonction, ces discours se concentrent globalement sur la justification du bilan du premier mandat et sur les perspectives d'avenir des Etats Unis dans le cadre du programme présidentiel sur lequel le président a été réélu. [...]
[...] On le comprend bien, l'Amérique se définit avant tout en rupture avec l' extérieur, tout en étant par nature vouée à intervenir dans les affaires du monde, étant garante de la cause de la liberté (ligne 43). De la ligne 55 à 65, la forme du discours s'imbrique avec le message consistant à dire que la meilleure Amérique est une Amérique courageuse (ligne50). En effet, la répétition du couple we will donne à cette section du discours un caractère volontariste qui, à la vue de la ligne programmatique énoncé (réforme de la sécurité sociale, réduction d'impôts, renforcement de la défense et lutte contre les armes de destruction massive, défense des alliés ) se veut extrêmement ambitieuse. [...]
[...] Ces discours manient tous le mythmaking et le storytelling pour décrire une destinée particulière des Etats-Unis, à la fois perceptible dans la fondation originale de l'Union, mais aussi dans le rôle messianique de ce pays, visant à propager l'idéal de liberté partout dans le monde. Pourtant, l'histoire de ces discours n'est pas linéaire et il existe un certain nombre de différences entre les discours d'investiture selon les époques, et ce, malgré l'usage commun des références et des thèmes que nous venons de citer. Il est possible de dégager trois étapes dans l'évolution des présidences américaines. Dans leurs spécificités, ces trois étapes influent sur le discours d'investiture en tant que tel. C'est donc bien le kairos qui semble donner à ces discours toute sa dimension. [...]
[...] L'ancrage dans le temps de la ligne 155/56 montre que cette image est toujours d'actualité, comme si l'être supérieur décrit dans le corpus des discours d'investiture célébrait toujours le particularisme de ce pays. La référence à la déclaration d'Indépendance se poursuit de la ligne 157 à 157 si l'on considère que le verbe proclamer (ligne 156) implique la forme de la déclaration. Dans ces lignes le Président met au cœur des intérêts américains la propagation de la liberté dans le monde. [...]
[...] Pour ce faire, ils s'appuient sur les rites de la religion civile ainsi que sur des figures de style dont l'antithèse est l'outil permettant la manipulation de lieux communs et donc la conciliation du changement dans la continuité, du passé fondu dans l'avenir et bien évidement de l'unité dans la diversité incarnée par la fameuse devise E pluribus unum Bibliographie A La Guillaume, Les discours d'investiture des présidents américains, ou les paradoxes de l'éloge, L'Harmattan Anderson, Imagined Communities: reflections on the Origins and spread of nationalism, London, Verso Aristote, Rhétorique, Paris, Librairie générale française Bellah, Civil religion in America, in Bellah, R et Mac Loughlin, Religion in America, Boston, Beacon Press Bourdieu, Médiations pascaliennes, Paris, Seuil Cassin, L'effet sophistique, Paris, Gallimard Kantorowicz, Mourir pour la patrie et autres textes, Paris, PUF Taguieff, P Le populisme et la science politique. Du mirage conceptuel aux vrais problèmes. [...]
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