La théorie traditionnelle de l'échange international se base sur l'hypothèse que la concurrence est pure et parfaite et en déduit que le libre-échange améliore la position des nations qui échangent, incitant ainsi au démantèlement des barrières protectionnistes. Néanmoins, les situations de CPP (concurrence pure et parfaite) sont rares et les marchés sont souvent en situation de concurrence imparfaite : le nombre de firmes produisant un bien et agissant sur le marché est faible, et les rendements sont croissants. L'environnement oligopolistique ainsi obtenu est appelé un environnement stratégique. Il se caractérise par l'émergence et la résistance du désir de profit. Dans ces conditions, il peut être rationnel d'imposer une réglementation protectionniste.
Ces idées constituent la base théorique de la politique commerciale stratégique (PCS) et ont donné naissance à une nouvelle approche de l'échange international, dénommée "nouvelle économie internationale". Initiée par Bander et Spencer dans les années 70, elle se développe surtout dans les années 80 grâce à Paul Krugman qui utilise le nouveau concept de PCS pour critiquer les points de vue conventionnels sur le libre-échange. Selon cette PCS, un État peut vouloir mettre en place une politique commerciale afin d'accroître son revenu aux dépends des autres en subventionnant ses exportations ou en érigeant des barrières douanières ; en protégeant certaines compagnies de la concurrence étrangère ; ou encore en encourageant le développement de nouvelles industries grâce à des subventions destinées à la recherche et au développement.
[...] Lorsqu'elles existent, toutes les firmes du secteur voient leurs coûts diminuer alors que les quantités globales produites augmentent. Krugman en tire l'argument que pour développer chaque entreprise individuellement, il faut créer un environnement favorable pour tout le secteur, soit en le protégeant par des barrières tarifaires, soit en mettant à sa disposition des infrastructures efficaces. -La protection du marché national comme moyen de promotion des exportations: La protection de la nation contre la concurrence étrangère par un tarif douanier peut être le moyen de diminuer les quantités produites par les concurrents étrangers, et donc d'accroître leur coût unitaire et d'étendre l'échelle de production des firmes nationales, ce qui diminue leur coût unitaire et doit leur permettre, après saturation du marché national, d'exporter de façon plus importante. [...]
[...] -Cette politique de subvention qui aboutit à un équilibre de jeu non coopératif est la concrétisation de la théorie de la PCS de Krugman,dont on peut dès lors donner le principe :dans le cas de produits importés, la protection doit permettre à l'Etat ou aux firmes nationales d'accaparer une part du profit des oligopoleurs ou du monopoleur étranger. Dans le cas des industries exportatrices une subvention aux exportations (ou aux Recherches et Développements, base de la compétitivité dans les industries de haute technologie) permet à l'entreprise nationale d'obtenir un coût de production unitaire plus faible que celui de ses concurrentes. Ce qui lui donne une position monopolistique et donc une plus large part du marché international. [...]
[...] Limites de la politique commerciale stratégique Le modèle de base de la politique commerciale stratégique n'a plus aujourd'hui qu'un intérêt du point de vue de la théorie, ainsi que le reconnaît Krugman lui-même. De plus,ce modèle a suscité un certain nombre de critiques: - L'impact sur le bien-être général: Sur un marché libre,le bien-être du pays dont est originaire la firme est augmenté sans ambiguïtés. En revanche, lorsque les importations nationales sont taxées les quantités vendues sur le marché sont plus faibles,donc les prix plus élevés, ce qui cause une diminution du surplus des consommateurs. [...]
[...] Or dans la réalité, ce sont d'abord les firmes qui décident d'entrer ou non sur un marché. Les gouvernements n'ont plus alors la possibilité d'émettre des menaces crédibles (à savoir les subventions qui rendent l'entrée profitable aux firmes nationales et difficile pour les entreprises étrangères). -Les risques de représailles: La politique stratégique apparaît comme une politique d'appauvrissement du voisin ou ce qu'un pays gagne l'autre le perd. Ce qui peut provoquer un enchaînement de mesures de représailles risquant d'entraîner une guerre commerciale qui abaissera le bien-être général de tous les pays concernés. [...]
[...] Au final,la doctrine de la PCS sert essentiellement à éclairer les décideurs publics, mais aussi les états-majors des grandes entreprises, sur les méthodes d'adoption de choix industriels et commerciaux qui ont un impact sur la concurrence internationale. La théorie de la PCS permet également expliquer, et si possible anticiper, les types de réponses que peut apporter un pays à la stratégie commerciale d'un autre. Dans cette dernière optique, elle invite à mesurer le poids des inégalités de pouvoirs entre échangeurs et à souligner l'existence de pratiques commerciales déloyales qui constituent des entorses volontaires aux principes de l'OMC. [...]
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