La voie royale pour la solution du problème économique est à chercher du côté de l'augmentation des ressources.
Le problème est que l'on ne peut créer de ressources qu'avec des ressources ; alors comment faire vu que, par définition, elles sont limitées ?
Imaginons une famille vivant dans une maison isolée au milieu des bois.
La seule source d'eau disponible se trouve à quelques kilomètres de là.
Chaque jour un membre de la famille est chargé de la pénible corvée d'aller chercher quelques seaux d'eau. Probablement un enfant, une Cosette.
La famille peut vivre et survivre ainsi. Un effort (faire le chemin, porter le seau) ; une récompense (boire, se laver).
On a ici une satisfaction directe des besoins. Il est évident que cette solution est quelque peu sommaire ; elle a comme inconvénient la grande dépense quotidienne d'énergie et son pendant inévitable : une satisfaction insuffisante des besoins.
[...] Par ce moment difficile (plus d'efforts moins de satisfaction), la famille va opérer un détour de production : en travaillant à la construction de la canalisation, elle va travailler à la satisfaction de ses besoins, mais de manière indirecte (j'ai soif, donc je creuse). On imagine facilement l'issue de cette histoire édifiante : lorsque les travaux seront finis, la famille pourra satisfaire beaucoup plus largement ses besoins en contrepartie d'un effort limité. Eau en abondance, lessive et douche pour tout le monde et tout cela en contrepartie un effort ridicule : ouvrir un robinet. Ce détour de production est la voie royale de la gestion des ressources rares. Précisons le processus. [...]
[...] Les premiers, s'ils le désirent, peuvent économiser et investir leur surplus Les autres sont obligés de se soumettre et de s'en remettre aux propriétaires pour survivre. Généralement les propriétaires leur délèguent les tâches ingrates de la production en échange des moyens de leur survie. C'est ce système qui a dominé le monde jusqu'à l'age moderne. Le génie du capitalisme est d'avoir démocratisé la propriété privée et d'en avoir généralisé les bienfaits. Ainsi, l'égoïsme est devenu notre manière commune de gérer les ressources rares. [...]
[...] Libérés des inconvénients de la solidarité et du partage nous nous lançons à la poursuite très égoïste de notre bien être personnel en laissant la main invisible s'occuper du bien commun. L'égoïsme devient le ressort le plus puissant qu'un système économique ait jamais eu. Nous y ajoutons un autre ressort, en complément : le gaspillage et l'insouciance. [...]
[...] Ainsi dans certaines langues africaines le mot je n'existe pas. On ne peut donc pas dire je mange mais nous mangeons Le partage n'est pas un calcul, c'est une donnée. Qu'elle passe par la famille, le clan, la tribu, la religion, la solidarité, à des degrés divers, est une donnée constitutive des sociétés humaines. Par ces temps d'individualisme triomphant, on a tendance à l'oublier. En Chine le terme individualisme est plus qu'un défaut, c'est pratiquement une insulte disait encore il y a peu de temps le philosophe Zhao Fusan. [...]
[...] Ils ne peuvent qu'être des systèmes de gestion défensive de la rareté, en aucun cas une solution à celle-ci, car ils ne permettent pas son dépassement. Partager des biens rares signifie en effet partager la pénurie, la rendre encore plus insurmontable. La prise de risque, ce pari sur l'avenir, est impraticable lorsque je ne risque pas seulement mes biens et ma vie, mais également la vie de mes semblables. Joseph Schumpeter, qui a consacré l'essentiel de son œuvre à l'étude de la dynamique du capitalisme, a bien montré que le premier pas de ce système est la destruction des anciennes solidarités. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture