En 1956, lorsque Guy Mollet ouvre les portes de Matignon au journaliste Pierre Sabbagh , tous deux sont gênés par cette proximité inhabituelle. En 2007, au lendemain de la démission du célèbre spin doctor américain Karl Rove, nous sommes très loin des tâtonnements initiaux. Le chemin parcouru entre ces deux extrêmes se mesure à l'aune de la professionnalisation croissante de la communication politique. Qu'elle soit honnie ou adulée, nous devons nous rendre à l'évidence : la communication politique est aujourd'hui devenue le fondement indispensable à toute stratégie électorale.
Désormais associée à la conception et à la gestion des campagnes, elle fait essentiellement appel à des consultants spécialisés, généralement extérieurs aux partis et à l'entourage proche de leurs clients, les femmes et les hommes politiques. Cependant, le fait que des spécialistes en aient fait leur activité principale suffit-il à parler de professionnalisation à part entière ? En France, ces « spécialistes » constituent un groupe hétérogène et peu structuré. En témoigne la pluralité des appellations revendiquées : « consultant en communication », « conseiller politique », « spin doctor », « conseiller en relations publiques », « expert en communication politique »…
[...] Le 13 août dernier, Karl Rove a annoncé sa démission (pour la fin août) en tant que conseiller de George W. Bush. Cet exemple en dit long sur la nature du métier de spin doctor tel qu'il se pratique aujourd'hui. Il explique, en partie, les craintes et soupçons nourris à l'égard de la profession. III Les conséquences de la professionnalisation de la communication politique La communication politique semble ainsi n'avoir jamais cessé de se professionnaliser, depuis ses premières manifestations timides jusqu'à l'apparition récente des spin doctors. Cette professionnalisation ne s'est toutefois pas réalisée sans conséquences. A. [...]
[...] Or, elle fut reprise dans les reportages télévisés. Les conseillers de Lionel Jospin ont alors tenté de faire valoir la difficulté énorme de traverser une salle où les militants lillois démontraient tant de ferveur et d'adulation vis-à-vis de leur candidat. Cet événement montre assez l'importance de l'entraînement des politiques avant une apparition en public. Cette limitation est imposée par la loi du 15 janvier 1990, qui interdit notamment l'affichage en période de campagne, le marketing direct par courrier Voir le schéma figurant sur le document annexe n°9. [...]
[...] Par un phénomène de contamination bien connu sur Internet, en quelques heures le document est partout, il est facilement accessible par n'importe quel moteur de recherche. Les médias classiques courent derrière les news sur la Toile, ils sont obligés de signaler et de commenter la chose. La spirale est lancée : plus on en parle, plus cela devient un événement, plus c'est un événement, plus il faut en parler. La synergie des anciens plus nouveaux médias, renforce l'effet mimétique d'emballement typique du micro-milieu journalistique. [...]
[...] En conséquence, la nature même de leur pouvoir est affectée. Certes, le marketing politique favorise efficacement les systèmes de représentation et permet, en outre, de lutter contre les déviations oligarchiques des démocraties. Il encourage de la sorte la soumission des élus à un contrôle effectué par le marché dans la mesure où il met à la disposition des citoyens une large panoplie de moyens de contrôle efficaces (ce qui constitue le fondement de toute démocratie). Ces dispositions permettent aux citoyens d'influencer concrètement et constamment les orientations des gouvernants, en particulier grâce à la permanence des enquêtes d'opinion. [...]
[...] Les premiers possèdent souvent une croyance inébranlable en leur infaillibilité. Il donc difficile, pour les seconds, de leur faire admettre qu'ils sont plus vulnérables[76] qu'ils ne le paraissent et qu'au moindre faux pas, ils risquent leur mandat ou leur élection. L'exemple de Lionel Jospin en 2002 illustre ce curieux aveuglement, que l'on retrouve pourtant chez nombre d'élus. Dans sa volonté de professionnalisme, Lionel Jospin s'était entouré d'experts, dont Jacques Séguéla[77], Jean Glavany (à l'« atelier de campagne et Pierre Moscovici (à la rédaction des discours). [...]
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