En janvier 2004, pour répondre aux revendications des militants marocains des droits humains, le roi Mohammed VI installait l'Instance Equité et Réconciliation (IER). Créée sur le modèle d'une commission vérité, celle-ci avait pour mission de liquider le contentieux qui opposait autorités et victimes des "années de plomb". Après plusieurs tentatives de réconciliation, l'IER était le fruit d'un long processus de négociation, dont les enjeux étaient fondamentaux pour chacune des parties : établir la vérité sur les violations passées des droits de l'Homme, réparer les préjudices causés aux victimes et réformer le système de gouvernement qui avait permis ces exactions étatiques. Pour un régime autocratique comme le Maroc, de telles ambitions conjuguées à un rapport de force inégal entre les acteurs, posent des interrogations concernant : les marges de manœuvre dont disposait l'IER pour mener à bien sa mission ; les progrès que constituent ses travaux en comparaison des tentatives précédentes ; et le sérieux avec lequel le Palais considère les recommandations émises par l'IER pour réformer l'Etat. Enfin, dans la mesure où la revendication ultime des militants engagés auprès de l'IER était l'ouverture d'un processus de démocratisation, il est légitime de se demander si les conditions nécessaires à celui-ci sont actuellement réunies.
[...] L'un des dirigeants de cette association déclarait : Nous rejoignons la formule de Pierre Sané, le Secrétaire Général d'Amnesty International qui disait : "dans le domaine de l'impunité nous sommes des extrémistes". Ne pas pouvoir citer de noms, revient pour ces militants à se résigner à une impunité totale. Les tortionnaires vont rester à leur poste sans être aucunement inquiétés, ce qui équivaut à une amnistie générale[155]. Or les militants espéraient au moins que les enquêtes de l'IER permettraient de récolter des preuves en saisissant les organes de sécurité qu'elle était seule capable d'interroger. Cette démarche aurait pu être un préalable pour des poursuites ultérieures, entamées individuellement par les victimes. [...]
[...] Cela se ressent au niveau du peu de travail fourni par l'Instance à leur sujet. En effet, comme il a été vu plus haut, l'IER n'avait pas eu seulement pour mission d'enquêter sur des affaires individuelles. A l'instar des autres commissions-vérité, et afin d'avoir des visons d'ensemble des violations commises sur les individus, l'IER devait également se concentrer sur les villes ou les régions qui ont connu les plus fortes vagues de répression telles que le Moyen-Atlas, le Rif, ou le Sahara (Occidental). [...]
[...] Abraham Serfaty est un ancien leader marxiste libéré en 1991, mais qui fût immédiatement expulsé du Maroc vers le brésil, sous le faux prétexte qu'il n'était pas marocain. Mohammed Tozy, Réformes politiques et transitions démocratiques op. cit., page 73. O'Donnell, Schmitter, Whitehead, Transition from authoritarian rule : Tentative conclusions about uncertain democraties, John Hopkins University Press XII, page 81. Cité par Mohammed Tozy, Ibid, page 74. Mohammed Tozy, Ibid, page 75. Mohammed Tozy, Ibid, page 75. Commandeur des croyants Analyse de Mohammed Tozy, Ibid, page 79. [...]
[...] Mais leurs activités ont longtemps été regardées avec méfiance de la part de la Monarchie, pour qui le modèle consacré par la loi est le parti de gestion (hizb at-tadbir) placé sous tutelle du ministère de l'Intérieur et qui ne peut concurrencer l'Etat dans l'usage légitime des ressources identitaires. [ ] Une telle conception du parti ne reconnaît aucun statut à l'opposition. Cette absence de considération pour l'opposition relève d'une stratégie royale particulièrement bien décrite par le rapport précité. Le Maroc paie le prix d'une longue histoire de limitations opposées à l'action partisane, de fractionnement et de scissions au sein des partis encouragées par le Palais afin de contrarier l'émergence d'une opposition forte. [...]
[...] Au départ, les opérations dans le sud lui ont permis de mettre la main sur l'armée. Une longue guerre va ensuite lui permettre de garder le roi sous pression et de mettre au pas tous les partis d'opposition. Dlimi a été le véritable cerveau et le maître d'œuvre de cette ‘stratégie' qui servait d'abord ses intérêts et sa soif de pouvoir. Mahjoub Tobji, Les officiers de sa Majesté version informatique (chapitre livre interdit au Maroc. Pierre VERMEREN, Histoire du Maroc depuis l'indépendance, op. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture