Pour étudier le système kadhafien et les contradictions inhérentes à celui-ci, il semble pertinent de limiter notre réflexion de 1969, date du coup d'Etat de Kadhafi à 1989, année charnière entre l'infitah des années 1980 et la décennie noire qui s'ensuit.
Comment le Guide de la Grande Jamahiriya Libyenne Populaire et Socialiste rassemble-t-il les identités du monde arabe ? Pourquoi est-il amené à adopter un discours déviant de ses principes fondamentaux? En d'autres termes, en quoi Kadhafi incarne-t-il par ses discours et ses actions la complexité des identités du monde arabe?
Le système kadhafien reflète les réalités du monde arabe contemporain telles que le nationalisme, l'islam politique, et le socialisme, tout en en proposant une alternative personnelle (I). Cependant, la conciliation des multiples identités du monde arabe va s'avérer fragile et d'effriter face aux réalités du pouvoir. En effet, le système kadhafien, confronté à des résistances devra s'adapter pour se maintenir au risque de trahir son idéologie originel (II).
[...] Sur le terrain économique, Kadhafi va appliquer le même principe à partir de 1978, sous la bannière du slogan Associés, pas salariés tous les intermédiaires vont être supprimés. Des comités élus prennent la direction des entreprises industrielles détenues par le secteur privé, et le petit commerce qui représente une forme d'exploitation est menacé. A partir de 1981, aux petites boutiques privées vont se substituer les marchés jamahiriyens vastes unités publiques de distribution. Mais d'une façon générale, le système économique jamahiriyen est fortement dépendant des fluctuations du prix du pétrole grâce auquel Kadhafi obtient un consensus politique. [...]
[...] Kadhafi, le messager du désert a voulu donner une place prépondérante à la Libye, partie intégrante du monde arabe, lien géographique naturel entre le Maghreb et le Machrek, dans la bataille pour l'émancipation de patrie [arabe s'entend] Cependant, l'on peut également considérer le système kadhafien comme le miroir du monde arabe, pour les raisons énoncées au-dessus, à la fois rebelle de part certaines positions prises à contre-pied par le leader libyen, et ambigu dans les contradictions qui sont apparues au fil des années entre le discours et l'action de ce dernier. Pour étudier le système kadhafien et les contradictions inhérentes à celui-ci, il semble pertinent de limiter notre réflexion de 1969, date du coup d'Etat de Kadhafi à 1989, année charnière entre l'infitah des années 1980 et la décennie noire qui s'ensuit. Comment le Guide de la Grande Jamahiriya Libyenne Populaire et Socialiste rassemble-t-il les identités du monde arabe ? Pourquoi est-il amené à adopter un discours déviant de ses principes fondamentaux ? [...]
[...] La République Arabe Islamique devait comprendre la Libye et la Tunisie. Suite à l'échec de ses deux tentatives, Kadhafi prononça le célébrissime discours de Zwara où il présente son ambition de transformer la joumhouriya (République) libyenne en jamahiriya (Etat des masses). Source : OPEP Source : Banque Centrale de Tripoli Nous entendons par périphéries les peuples islamisés non arabes et nous avons déjà évoqué (Partie Section la position de Kadhafi à leur égard. A ne pas confondre avec le parti chiite homonyme L'on citera ici les propos du Commandant Jalloud, 2 du régime et ami fidèle de Kadhafi ; Ainsi la révolution qui veut privilégier les valeurs morales et spirituelles voit sa volonté contrecarrée par tout ce qu'elle a réalisé pour le bien être du peuple Par là il faut davantage entendre une manœuvre pour attirer l'attention des puissances occidentales à renfort de déclarations fracassantes qu'une véritable réforme de la société. [...]
[...] Ainsi, l'on ne peut tout à fait dire que Kadhafi est l'héritier de Nasser. Il est panarabiste sans être laïc. Le terme de panislamiste ethnocentrique correspondrait mieux à son discours : en réunissant les Arabes, Kadhafi pense faire d'une pierre deux coups et réunir les vrais musulmans (mahométiens). C'est en confondant Islam et Arabité qu'il réussit à réconcilier la religion avec le panarabisme. Il en résulte une forte ambiguïté dans son discours. Certains font d'ailleurs un rapprochement entre son idéologie et l'islamisme. [...]
[...] Kadhafi a également entretenu des rapports conflictuels avec les puissances occidentales, à commencer par les Etats-Unis. Il faut ici rappeler que l'une des premières mesures énoncées par Kadhafi dans son communiqué diffusé à la radio libyenne la nuit de son coup d'Etat militaire visait à nationaliser les entreprises pétrolières du pays et y supprimer toute base militaire étrangère, notamment américaine. Ainsi, si la décennie 1970 fut marquée par des contrats juteux passés entre les deux Etats (infrastructures pétrolières), Tripoli fut bombardée par des chasseurs américains dès avril 1986. [...]
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