Le pouvoir d'État détient grâce à son organisation de multiples moyens d'asseoir sa mainmise sur les individus (la violence, la loi, la constitution, la police, la surveillance…). Le paradigme d'une société infantilisée par l'État n'en est que l'un d'entre eux, et se particularise par l'immixtion du pouvoir jusque dans la sphère privée, dans la famille.
C'est pourquoi il sera indispensable d'aborder l'analyse par des considérations d'ordre sociologique, en se plongeant plus précisément au sein même de la sociologie domestique de la famille ; cette mise en abyme mettra en évidence le déséquilibre du rapport d'autorité, faisant de l'enfant un tyran. L'État et l'administration devraient être enclins à lutter contre ces dérives par l'éducation nationale. Or, il semble que l'improbable efficience de celle-ci emmène trop souvent l'État à y faire face par le biais de ses services judiciaires ou sociaux. Quoi qu'il advienne, la puissance publique fait converger ses différentes politiques publiques vers le seul objet répressif, comme si l'individu était entaché a priori d'immaturité. Le pouvoir étatisé se substitue à la puissance paternelle, pour le seul bien-être et l'épanouissement de ses sujets.
L'infantilisation de la société n'est perceptible qu'au travers de considérations d'ordre démographique. Elle présuppose la malléabilité de l'individu irresponsable, en proie aux folies d'une société détériorée et vieillissante. L'allongement de la durée de vie repoussera bientôt les limites de celle-ci à l'orée du centenaire, prolongeant ainsi dans son élan une adolescence qui se « tanguynise ». La majorité, censée émanciper l'enfant devenu adulte, n'a plus qu'une valeur juridique. Socialement, elle est anéantie au point de confondre parents et enfants. Or, ce sont bel et bien les parents (ces « grands enfants ») qui ont la lourde responsabilité citoyenne d'élire les dirigeants politiques. Une telle confusion, associée à la tenace volonté de rester jeune, conduit inévitablement l'individu à déserter les urnes.
Et le pire ennemi de la démocratie, ce n'est plus le totalitarisme, mais l'absentéisme.
Voilà sur quoi repose le véritable danger d'une infantilisation outrageante de la société. Voilà pourquoi s'exacerbe la société des loisirs. Voilà comment l'État assure le contrôle des individus.
Dans un système où la mort paralyse et aliène la Raison (vieillir nuit fatalement à la santé), une société exposée et fragile s'est manifestée, désireuse d'être soumise à un pouvoir impérieux. La société normative était née. L'hédonisme s'impose comme une échappatoire aux maux d'une nature humaine par essence mortelle qui s'offre à un État paternaliste chargé d'anéantir les risques pour un meilleur vivre-ensemble.
Afin d'asseoir sa mainmise sur les individus, sur la société civile, le pouvoir étatisé peut donc les infantiliser. Une réflexion bipartite corroborera cette assertion dans le but de la démontrer.
Dès lors, l'infantilisation passe d'une part par un processus de socialisation protectrice au sein de laquelle le risque doit absolument être minimisé (Partie I), et d'autre part par un processus de contrôle enfermant la société dans un carcan infantilisant (Partie II).
[...] C'est à l'État que se remet alors une société qui s'est arrêtée de penser. L'État pense l'individu comme le père pense sa progéniture. Il contribue à son bien-être et à son développement, en veillant à le fixer irrévocablement dans l'enfance afin de repousser l'heure de l'émancipation. Par l'infantilisation de la société et la mainmise qu'il exerce sur les individus, l'État se préparerait-il à affronter une société qui pourrait s'émanciper ? BIBLIOGRAPHIE Ouvrages ADLER Alfred, L'enfant difficile, Technique de la psychologie individuelle comparée (1930), Trad. H. [...]
[...] Laurent Fabius s'était réduit à ce spectacle, pour le moins surprenant. Expression méprisante adressée par Juvénal (Satires, 81) aux Romains incapables de s'intéresser à d'autres choses qu'aux distributions gratuites de blé et aux jeux du cirque. Jean Baudrillard, La société de consommation, Éd. Gallimard, coll. Idées p Michel Foucault, Histoire de la sexualité, Tome La volonté de savoir coll. Tel, p.121-122. Sigle de: “Provide Appropriate Tools Required to Intercept and Obstruct Terrorism”. Denys de BÉchillon, Qu'est-ce qu'une règle de droit ? [...]
[...] Cela relève de l'instinct, dont tous les parents ne sont sûrement pas dotés. Les parents sont donc enclins naturellement, légitimement et légalement à protéger l'enfant, par l'exercice inévitable du pouvoir de tutelle. Or, ce devoir naturel, légitime et légal, s'il est oppressant, peut être confronté à des effets pervers, c'est-à-dire, des effets qui n'ont pas été prévus. L'enfant en quête d'émancipation dans une société qui se veut de plus en plus ouverte et consumériste, se retourne ainsi contre l'autorité légitime, contre le pouvoir, contre la puissance parentale. [...]
[...] Le souci redoublé de protection des enfants est animé par l'angoisse du risque omniprésent dans le monde réel. Dès lors, l'État et l'administration développent la prise en charge des individus au travers de leurs institutions. Or, il semble que l'improbable efficience de l'Education Nationale en ce domaine, justifie le recours hasardeux aux institutions judiciaires et sociales (II). I - L'improbable efficience de l'Éducation Nationale Sous l'Empire, Napoléon crée un impérialisme démocratique et la bureaucratie amorcée sous le Directoire est exacerbée. [...]
[...] S'instaure dans ce contexte une mutation du rapport d'autorité mettant en exergue la mainmise infantile sur les parents Le pouvoir qu'exerce l'enfant sur les parents apparaît tyrannique, illégitime et sociétal La mainmise infantile sur les parents Dans une interview accordée à Alain Sousa[20], Didier Pleux, docteur en psychologie du développement et auteur du livre De l'enfant roi à l'enfant tyran[21], affirme que la bonne autorité, c'est d'aimer, de stimuler, d'accompagner, de protéger, pour favoriser l'éclosion de la personnalité. Mais c'est aussi d'exiger, de frustrer, de contrôler et de sanctionner Protection et contrôle semblent être les leitmotive d'une éducation pondérée et juste engendrant l'euphorie et d'une socialisation alliant harmonieusement tendresse et fermeté. Or, il semble que la dysphorie ne vienne ternir cette vision dualiste. [...]
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