Pourtant, le 22 juillet 1980, le Conseil Constitutionnel affirmait dans sa décision « Validation d'actes administratifs » « qu'il n'appartient ni au législateur ni au gouvernement de censurer les décisions des juridictions, d'adresser à celles –ci des injonctions ou de se substituer à elles dans le jugement des litiges relevant de leur compétence ». L'indépendance du juge judiciaire bien qu'elle soit en apparence consacrée, n'est toujours pas une évidence. Si elle fait l'unanimité, sa mise en place et ses dispositions activent néanmoins les polémiques.
Que ce soit dans les journaux télévisés, dans la presse quotidienne ou spécialisée, le juge judiciaire est au centre de tout, personne ne peut passer outre. Tous les conflits lui reviennent « de droit », qu'ils soient institutionnels, sociaux, éthiques, moraux… Tout autant qu'il puisse être important, le juge judiciaire est également craint. Il effraie par son autorité, sa puissance. Qui sont les effrayés ? Pourquoi le sont-ils ? Le justiciable ordinaire n'est pas le plus peureux. Ne connaissant pas le droit, il s'autolimite dans ses actes. En effet, les plus suspicieux à l'égard d'un éventuel pouvoir du juge sont ceux qui font ce qu'ils savent interdit, et qu'en plus on osera aujourd'hui leur reprocher. A l'heure actuelle, les magistrats ne sont plus réfractaires à inculper un homme politique, où un chef d'entreprise. Il en va ici d'une double logique. Le « gouvernement des juges » tant redouté est limité de toute part par une législation de plus en plus précise, de plus en plus vaste. D'autre part, la crise démocratique et la considération négative des citoyens envers leurs représentants élus place les magistrats au cœur même du pouvoir.
Les suspicions à leur égard sont telles qu'elles nous invitent aujourd'hui à réfléchir sur les conséquences de l'affirmation d'un véritable pouvoir judiciaire. Des questions s'imposent : Existe-t-il aujourd'hui un réel pouvoir judiciaire, ou simplement une autorité supérieure qui ne pourra jamais vraiment se délivrer de l'emprise des autres pouvoirs ? Les équilibres de l'Etat se recomposeraient-ils ? L'indépendance du juge judiciaire est-il un mythe ou une réalité ?
Voici autant d'interrogations sur lesquelles il faut se pencher. Nous l'avons dit, l'indépendance du juge judiciaire est un principe affirmé. La consécration et le renforcement du principe de séparation des pouvoirs ainsi que la réforme du Conseil Supérieur de la Magistrature en sont les clefs. Cependant, l'échec de la réforme Guigou de 1996, ainsi que certains blocages tels que la formation des magistrats ou encore les difficultés liées à l'éthique du corps montrent bien son inachèvement. Tel sera l'objet de notre première partie.
On ne peut pas parler d'indépendance du juge de manière absolue. L'évolution de la société faisant, il faut confronter ce principe et cette garantie d'Etat de droit aux changements auxquels il fait face malgré lui. Les conditions même d'exercice du métier, les protestations à l'égard de sa responsabilité ainsi que les indices d'une collaboration médiatique et politique s'apparentent à de nouvelles épreuves que le juge judiciaire se doit de surmonter. Nous nous y intéresserons donc dans notre seconde partie
[...] Les analyses du Rapport Truche, l'échec de la réforme Guigou. Elisabeth Guigou l'a dit et répété : la révision constitutionnelle de la justice est la clef de voûte de la réforme². C'est donc en Congrès que se votera le projet. C'est à une autonomie limitée du parquet, une indépendance partielle que le texte ouvre la voie. Qu'en est-il exactement ? Avant d'étudier la réforme de plus prêt, il faut se concentrer sur les analyses du rapport Truche. L'indépendance de la justice doit être soupçonnable, comme le rappelle Raymond Boudon, membre de la Commission de Réflexion le rapport. [...]
[...] L'étude que nous venons de mener nous aura permis de comprendre plusieurs faits. Tout d'abord, le principe d'indépendance du juge a été, est et sera toujours mis à mal quelque soit le régime en place. La fonction de juger est une fonction à part, qui du fait de son importance, ne peut être considérée de la même façon que les autres. Les magistrats sont les seules personnalités non élues, non représentantes directes du peuple qui sont détenteurs d'un tel pouvoir. [...]
[...] En matière budgétaire la France est dépassée par 22 pays. Le budget moyen d'un tribunal par habitant et par an revient à euros contre 46,98 euros au Portugal et en Allemagne[196]. La justice manque de moyens, on aura pu le constater. Cela se ressent au niveau des effectifs. En effet, alors qu'en Allemagne, on compte 2,5 procureurs pour habitants, la France ne possède que 0,5 procureurs. Autre indicateur qui placent les juges français en bas du classement, celui du nombre de magistrats professionnels pour habitants. [...]
[...] L'indépendance du juge judiciaire est-il un mythe ou une réalité ? Voici autant d'interrogations sur lesquelles il faut se pencher. Nous l'avons dit, l'indépendance du juge judiciaire est un principe affirmé. La consécration et le renforcement du principe de séparation des pouvoirs ainsi que la réforme du Conseil Supérieur de la Magistrature en sont les clefs. Cependant, l'échec de la réforme Guigou de 1996, ainsi que certains blocages tels que la formation des magistrats ou encore les difficultés liées à l'éthique du corps montrent bien son inachèvement. [...]
[...] Le gouvernement des juges ne peut être. De la montée en puissance du juge judiciaire Jamais depuis la Révolution française, la justice n'a occupé une telle position de pouvoir En effet, cette nouvelle position occupée par la justice rompt totalement avec la tradition de notre histoire politique et constitutionnelle. La judiciarisation de la société, la pénalisation des débats, l'émergence des juges sur la scène publique sont autant d'indices de la place inédite que se sont accaparés les magistrats ces dernières années. [...]
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