En partant des textes de Savonarole, ici le 13ème sermon sur Agée, prononcé en 1494, on peut tenter de reconstruire sa pensée, afin de mettre à jour la profonde ambiguïté de sa philosophie politique et religieuse. Moine révolutionnaire, inspirateur d'une république théocratique à Florence, son idéologie est en effet complexe, plus que ne l'auront montré ses détracteurs comme ses admirateurs.
[...] La première incitation vise à augmenter la foi : foi en Dieu, foi en ses prophètes, dont Savonarole Je ne mets ma confiance que dans le Christ et en ce que je te dis ; et fais-le Cette foi doit s'exprimer visiblement, mais surtout avec profondeur : il s'agit d'adhérer au projet religieux de Dieu pour son Eglise, de croire que l'heure est au changement, et de s'impliquer dans ce passage à un nouveau stade de la chrétienté : à toi de choisir, maintenant Il faut se renouveler, se purifier, ainsi que l'atteste le multiple appel à se réformer se renouveler, mais aussi à la confession. Cette rénovation est pensée aussi bien sur le plan de l'individu que sur celui de la cité et de l'Eglise. [...]
[...] Ainsi des O Florence Oh ! si je pouvais tout te dire ! Fais, te dis-je, fais d'abord», qui montrent combien parler est une urgence, une nécessité, pour Savonarole, combien ce sermon naît prend sa source dans une passion dévorante. Des figures de style comme la répétition Entends ( ) entends Fais ( ) fais . etc. [...]
[...] Un lien au réel particulier La manière de parler de Savonarole est spécifique notamment du fait de sa relation particulière au temps : il prétend s'inscrire, lui et son discours, dans une double continuité, celle de sa mission prophétique, et celle de l'évolution de l'Eglise (au sens où elle forme un tout cohérent). Cela l'amène à faire une relecture particulière du passé. Sa prédiction par le passé et sa prédiction actuelle sont englobées dans un ensemble formé par les prophéties inspirées à Savonarole par l'illumination divine : elles puisent à la même source et ont donc la même légitimité. [...]
[...] Entre les deux, l'appel de Savonarole à prendre en compte les exigences de Dieu s'est fait de plus en plus net. L'appel final à Dieu permet à l'auteur de replacer le destinataire réel (l'auditoire) dans un cadre où Savonarole dispose d'une certaine supériorité, puisqu'il s'agit d'une situation dans laquelle la dimension spirituelle compte aussi, et d'abord. Ce n'est pas non plus n'importe quel langage religieux qui est utilisé, mais un langage biblique qui fait référence aux grands prophètes de l'Ancien Testament, avec la référence à Job, mais aussi à Isaïe ou Ezéchiel, qui prêchent sans être écoutés pendant longtemps, mais dont l'ardeur à annoncer la parole divine continue, en dépit des obstacles. [...]
[...] Ce n'est pas illogique si l'on considère que pour un chrétien la parole de Dieu est parole vivante, et Dieu. son rôle pour la société Cela nous amène à la question des effets de son discours sur l'évaluation de son statut par les destinataires de ce sermon (et donc sur sa capacité à convaincre cet auditoire) : en l'écoutant, retire-t-on l'impression que Savonarole est important ? Son discours officiel, au premier degré, est qu'il n'est qu'un pauvre petit frère petit homme incapable et plein de péchés et qu'il fait preuve d'incapacité Or il n'est pas un simple moine sans influence, il a été élu prieur du couvent de Saint Marc, poste clé, avec l'appui des Médicis. [...]
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