Les réactions d'opposition de populations locales face à l'implantation d'équipements considérés comme potentiellement nuisibles ne sont pas l'apanage des sociétés contemporaines. En effet, on considère qu'en France ce type de réaction existait déjà au XVIIIe siècle face à des projets pouvant porter préjudice aux riverains, tels que l'implantation de tanneries ou de fabriques d'ammoniaque.
Cependant, depuis les années 1970, les réactions d'opposition à l'implantation d'équipements collectifs pouvant générer des nuisances pour le voisinage se sont multipliées, diversifiées et structurées, au point qu'elles doivent aujourd'hui être prises en compte par la société et les pouvoirs publics.
Ces conflits « de proximité », locaux, territoriaux, sont souvent rattachés à ce que l'on nomme le phénomène NIMBY.
Cet acronyme de « Not In My Back Yard » (« pas dans mon jardin ») a été forgé aux Etats-Unis dès les années 1970, et a atteint l'Europe au début des années 1990. Il est utilisé pour tenter de traduire l'attitude « naturellement » égoïste d'opposition d'une population locale face à un projet pouvant détériorer son cadre de vie.
Pour autant, doit-on enfermer le phénomène NIMBY dans la simple expression d'intérêts égoïstes individualistes, ou peut-on considérer qu'il conduit à une redéfinition des enjeux du politique en modifiant les frontières entre le particulier et le global?
[...] Le terme désigne un élargissement des thèmes de la contestation, ce qui permet de rallier des appuis à la mobilisation. Il s'agit, par exemple, de sortir de la dimension individuelle et locale disqualifiante du NIMBY, et de tenter de conférer à des enjeux locaux une dimension générale. Cet élément, qui peut présenter une alternative intéressante à la stigmatisation des mobilisations NIMBY, est toutefois parfois réfuté en raison de la formulation sortie du NIMBY qui semble sous-entendre que, si certains sortent du piège NIMBY, d'autres en sont incapables. [...]
[...] Le NIMBY semble ainsi agir dans le sens d'une plus grande participation et légitimité des citoyens en tant que membres du corps politique, mais aussi en tant qu'habitants soucieux de leur qualité de vie. Toutefois, le NIMBY reste une solution limitée vis-à-vis de ce dernier point, car, s'il permet l'émergence de nouveaux enjeux et de nouvelles figures, il reste une catégorie disqualifiante de la mobilisation citoyenne. De plus, le phénomène NIMBY reste un phénomène local, qui ne permet pas de résoudre véritablement les problèmes territoriaux: la victoire d'une opposition ici va générer d'autres problèmes ailleurs En d'autres termes, le NIMBY ne peut pas être considéré comme une solution à des conflits territoriaux, car il ne conduit pas à une résolution du problème, mais à une relégation spatiale de celui-ci. [...]
[...] Lolive Jacques, La montée en généralité pour sortir du Nimby. La mobilisation associative contre le TGV Méditerranée Politix vol nº39, pp. 109-130. Trom Danny, De la réfutation de l'effet NIMBY considérée comme une pratique militante Revue française de science politique pp. 31-50. [...]
[...] Au nom de la participation des citoyens on ose remettre en cause des décisions émanant du pouvoir central par des moyens juridiques ou politiques, et ainsi, on peut dire que, de consultative, la procédure tend à devenir participative Face à cette crise de l'aménagement, face à la politisation des enjeux territoriaux à l'échelle locale, à l'importance du phénomène NIMBY, les politiques d'implantation d'équipements collectifs tendent à se transformer en adoptant une articulation autour de deux axes centraux qui sont la compensation et le débat public. La grande inefficacité: le phénomène NIMBY comme processus disqualifiant Il est difficile de traiter le phénomène NIMBY sans évoquer la stigmatisation péjorative qu'il opère. [...]
[...] De plus, il faut noter que le phénomène NIMBY, conflit de proximité par excellence, est intimement lié au sentiment de possession du territoire environnant. Les habitants de la zone concernée se sentent dépossédés de leur terre, sans avoir été consultés, ce qui conduit à un sentiment de spoliation et de défiance vis-à-vis des décideurs politiques, économiques et des experts scientifiques. Ce sentiment de la population locale d'être menacée, seule contre tous, conduit à un phénomène instinctif de rejet en bloc du projet. [...]
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