Ayant été à la fois diplomate et historien, George Kennan est surtout connu pour son « Long Télégramme » de 1945 et son fameux « article X » publié en juin 1947, dans lesquels il préconisait une politique d'endiguement à l'égard de l'Union soviétique. Ces deux documents ont constitué la base théorique de la stratégie américaine pendant toute la durée de la guerre froide. Pourtant, Kennan a toujours critiqué très fermement la politique étrangère américaine, alors même que celle-ci se réclamait de son influence. Le destin singulier de Kennan tient dans ce paradoxe : s'être fait connaître par une théorie dont il n'a cessé par la suite de dénoncer l'application. Ce n'est là qu'une des nombreuses contradiction de ce personnage iconoclaste et brillant mais dont l'impétuosité l'a condamné à une position d'éternel d'outsider avant que ses convictions affirmées ne le poussent à démissionner du Département d'Etat pour se consacrer à son travail d'historien.
Kennan naît dans le Milwaukee en 1904. A douze ans, son père l'envoie à la St. John's Military Academy, où il apprend la discipline et le patriotisme. En 1921, il entre à l'université de Princeton où il décide de travailler dans la diplomatie. Diplômé en 1925, il passe et réussit le concours du Foreign Service en 1926. L'esprit qui y règne alors est imprégné de snobisme, de mépris pour l'opinion et les préoccupations des masses et de préjugés ethniques et raciaux. Il partage cet élitisme qui est un trait essentiel de son caractère et conditionne sa vision de la politique. La démocratie est pour lui un régime faible, sujet à l'inconstance des masses et donc incapable de garantir une politique éclairée. Kennan tient en plus haute estime les régimes autoritaires comme celui de la Russie tsariste, pour laquelle il manifeste un vif intérêt ainsi qu'une grande nostalgie.
[...] Au moment de la déclaration de guerre de l'Allemagne aux Etats-Unis, il se trouve à Berlin. La Gestapo l'arrête, avec 130 de ses compatriotes, et les retient en captivité à Bad Nauheim pendant plus de cinq mois. A sa libération, il est affecté comme conseiller à la légation américaine de Lisbonne. Insatisfait de ce poste qui ne lui permet pas de mettre à profit sa connaissance de l'URSS, il fulmine contre l'administration Roosevelt, dont il critique par ailleurs la stratégie. [...]
[...] En effet, s'il en appelle à contenir l'expansion du communisme, Kennan s'oppose à une militarisation trop poussée des Etats-Unis qui risquerait de déclencher une course aux armements nucléaires. Il voit le conflit comme essentiellement d'ordre psychologique, d'où l'importance pour lui de la propagande (avec la société américaine comme modèle universel) et de l'aide à la reconstruction. Ces deux objections entrent en contradiction avec l'opinion profonde de Kennan et son parti pris ultérieurs. En effet, il avait dans le Long Télégramme défendu un réarmement des Etats-Unis afin de garantir leur supériorité sur l'URSS. [...]
[...] En 1953, il démissionne du Foreign Service. Dès lors, il se consacre pour l'essentiel à son travail de professeur (à Princeton, Oxford, puis Harvard) et d'historien, ne revenant à la diplomatie que de 1960 à 1963, où il sert comme ambassadeur en Yougoslavie. En tant qu'historien, Kennan est reconnu pour son apport à la théorie réaliste, qui appelle la diplomatie à baser son action sur des calculs de pouvoir et l'intérêt national plutôt que sur des idéaux et des considérations morales. [...]
[...] L'autre grand point de désaccord avec l'administration américaine porte sur l'Allemagne. Grand germanophile, Kennan veut la voir incarner l'équilibre de l'Europe. C'est pourquoi il souhaite sa réunification, son évacuation par les troupes alliées et son réarmement. Peu utile à Washington où il ne cesse de critiquer, Kennan est nommé ambassadeur à Moscou en décembre 1951, poste pour lequel on attend beaucoup de lui. Mais dans la capitale soviétique, il est très vite ulcéré par la propagande antiaméricaine, la surveillance dont il fait en permanence l'objet et l'hostilité que lui manifestent les officiels russes. [...]
[...] en avril 1946. La stratégie qu'il prône est la suivante : contourner les instances internationales et agir de manière unilatérale pour restaurer l'ordre et la stabilité dans les centres vitaux que sont l'Europe et le Japon. A cet égard, il joue un rôle essentiel dans la formulation du Plan Marshall qui répond à sa volonté de ne pas coopérer avec l'URSS et de dresser contre elle ses Etats satellites. Nommé directeur du nouveau Policy Planning Staff en mai 1947, il devient un personnage clé de l'administration Truman ainsi qu'un proche de Marshall. [...]
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