Le texte de Tocqueville marque une rupture par rapport aux œuvres de Montesquieu et de Rousseau, car pour la première fois la démocratie est envisagée comme une forme possible de gouvernement dans le monde moderne. En effet, Montesquieu comme Rousseau considèrent la démocratie soit comme un modèle historique qui n'a plus de pertinence dans les conditions du monde moderne, soit comme un type idéal entrant dans une typologie des régimes et qui ne peut être applicable. Or, depuis le contexte a changé et les révolutions française et surtout américaine ont montré qu'il était possible de construire une société dans laquelle les élus du peuple ont le pouvoir. Les Américains ont instauré une république solide à tendance démocratique. Ainsi, Tocqueville se confronte à la réalité même de la démocratie et cherche à en tirer des leçons.
[...] Un effet indirect moins évident de la disparition des grandes propriétés est l'égalisation des intelligences. Il est vrai que l'inégalité intellectuelle vient directement de Dieu (p.50), la capacité intellectuelle en elle-même est inégalement répartie. Cependant, pour accéder à la connaissance, il faut avoir à la fois du temps, de l'intérêt et de la patience. Or étant donné l'égalisation des richesses, la plupart des individus n'héritent pas à la naissance d'une fortune suffisante pour ne pas avoir à travailler Tous peuvent consacrer seulement les premières années de leur vie à apprendre. [...]
[...] Cet amour l'emporte sur le sentiment de liberté. L'auteur explique pourquoi dans un autre passage du livre : d'un côté, la liberté demande des efforts et de la vigilance, elle est difficile à atteindre et elle est perdue facilement. De plus, ses excès sont visibles alors que ses bienfaits sont difficiles à apercevoir. C'est tout le contraire pour l'égalité. Par conséquent, la liberté n'est pas l'objet principal et continu de leur désir ; ce qu'ils aiment d'un amour éternel, c'est l'égalité (p.51). [...]
[...] Il s'agit donc de multiplier les seconds degrés (p.125) comme le suffrage indirect. Cependant, il faut d'un autre côté faire en sorte que le peuple ait un certain pouvoir sur les dirigeants pour que ceux-ci n'est pas une trop grande indépendance, car on retomberait alors dans une aristocratie et dans l'arbitraire. D'autres moyens pour minimiser les défauts d'un régime démocratique sont évoqués par Tocqueville dans les pages 122 à 124. Parmi ceux-ci, on peut souligner l'importance qu'il accorde à la morale qui est étroitement liée dans son esprit à la religion. [...]
[...] Ainsi, toutes les sociétés tendent vers la démocratie, il parle d'un mouvement irrésistible (p.118). De même, il dit dans l'avertissement à la 12ème édition que le développement de l'égalité des conditions est un fait providentiel. Il en a les principaux caractères : il est universel, il est durable, il échappe chaque jour à la puissance humaine, tous les événements comme tous les hommes ont servi à son développement Cependant, il ne s'agit pas d'un déterminisme total est l'homme a une part de choix et de responsabilité car s'il ne choisit pas l'état d'égalité, il doit faire en sorte que celui-ci n'anéantisse pas la liberté. [...]
[...] Pour utiliser une métaphore que l'auteur développera plus loin, la machine démocratique est en marche vers toujours plus d'égalité. Tocqueville choisit alors de développer un exemple en particulier de ces lois qui font avancer le processus d'égalisation des conditions, et donc de démocratisation. Il s'agit des lois de succession. On retrouve ici l'importance toute rousseauiste que l'auteur accorde à la propriété pour établir un rapport de domination entre les hommes. L'idée principale est que le partage égal entre les enfants est facteur de démocratie, alors que si on permet l'agrégation et la conservation de la propriété avec le principe de primogéniture, on implante le germe qui fait jaillir l'aristocratie du sol Ainsi, le partage égal a un effet direct et matériel qui va de soi : la terre se fractionne sans cesse de génération en génération, et comme le rapport de domination est basé sur la propriété, il ne peut se mettre en place un rapport hiérarchique et une aristocratie. [...]
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