Charles Tilly (1929-) est un socio-historien états-unien qui enseigne actuellement à l'Université Colombia. Il est notamment reconnu pour sa capacité à étudier des périodes longues portant sur plusieurs siècles. Ses travaux insistent beaucoup sur les rapports entre la politique, l'économie et la société. Il utilise notamment cette grille de lecture pour analyser les pratiques d'action collective.
Dans l'ouvrage « La France conteste », il propose une synthèse de ses différents travaux sur la contestation dans l'Hexagone entre 1600 et les années 1980. Plus précisément, l'auteur a l'ambition de comprendre les modifications des pratiques d'action collective qui ont répondu aux changements structurels profonds qui ont traversé le pays.
Ces changements et leurs explications sont présentés dans le onzième et dernier chapitre du livre. Nous nous proposons d'étudier celui-ci en trois temps, qui suivent globalement la progression du discours de Tilly. Tout d'abord, nous reprendrons l'analyse de l'auteur sur la place de la violence dans les pratiques contestataires en France. Puis nous verrons que la croissance de l'Etat et le développement du capitalisme sont considérés par Tilly comme les principales causes de la contestation populaire en France. Enfin, nous nous demanderons avec lui en quoi et pourquoi les formes d'action collective ont évolué au cours des quatre derniers siècles.
[...] En effet, cette région a connu au XIXe et au XXe une accélération du développement du capitalisme agraire, notamment dans le secteur de la viticulture. Une prolétarisation accrue de la population s'en est ensuivie. Cela a fait du Languedoc un des bastions de résistance à la politique agricole nationale. De même, la Flandre a toujours été au banc d'essai du capitalisme français (p. 556), et l'action collective y a été par conséquent plus importante qu'ailleurs, notamment au XXe où ses mouvements ouvriers étaient à la pointe des contestations nationales. [...]
[...] Cela résulte de l'habitude, mais également de la préférence de l'Etat et de la sphère économique pour les formes d'actions collectives consacrées. A. Un changement de répertoire d‘action collective au milieu du XIXe Selon Tilly, un changement de répertoire d'action collective est intervenu avec la révolution de 1848 et l'accession à la Présidence de la République de Louis-Napoléon Bonaparte en 1851 : les Français délaissent les moyens d'action collective dont ils se servent depuis deux siècles et adoptent le répertoire nouveau encore en usage aujourd'hui (p. [...]
[...] Cette dernière idée peut être contestée. Par exemple, si le nombre de décès au cours de protestations populaires chute au XXe, le rapport Peyreffite de 1977 évoqué par Tilly en début de texte souligne que les réactions de violence des groupes sociaux ont pris le caractère d'une voie presque habituelle du "dialogue social" (p. 528), et évoque notamment le recours alors croissant aux barrages de routes, à la violence verbale envers les forces de l'ordre, à la mise à sac de bâtiments administratifs, à l'explosif La violence est quoi qu'il en soit une des dimensions des actions collectives protestataires menées en France depuis 1600. [...]
[...] La rumeur circulait au début de l'année 1630 que la nouvelle Election créerait un nouvel impôt sur le vin en Bourgogne. Dans ce contexte, les foules rassemblées à Dijon pour le Mardi gras protestèrent contre l'augmentation future de la fiscalité, et des vignerons saccagèrent quelques maisons, notamment celle de l'officier royal censé signer le décret établissant l'Election. La révolte dura quelques jours puis fut réduite par la répression étatique. Parallèlement, notamment au XVIIIe, les capitalistes (p.537) visaient à accumuler des terres et du capital, ce qui a entraîné des protestations contre les expropriations notamment. B. [...]
[...] On peut citer ici en exemple la manifestation ou la campagne électorale. Les grandes grèves d'entreprises remplacent les grèves locales par corps de métiers. Les associations nationales (partis, syndicats et autres) prennent une place prépondérante dans l'action collective. Les distinctions faites entre autonome et patronné, et entre national et local ne doivent pas être comprises comme étant des ruptures, mais comme des différences de degré d'une même échelle : une manifestation ou une grève n'est jamais que plus ou moins autonome et nationale. B. [...]
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