Nous nous proposons d'étudier ici le processus de formation des Etats à partir de deux textes : d'une part, un extrait de l'ouvrage de Norbert Elias intitulé La dynamique de l'Occident et, d'autre part, l'article Esprit d'Etat, genèse et structure du champ bureaucratique de Pierre Bourdieu.
S'agissant du premier document, Elias cherche, à travers l'histoire de France, à poser un modèle de la formation de l'Etat à partir de l'étude de son monopole coercitif et fiscal. Bourdieu, quant à lui, s'attache à l'étude du développement de ce que l'on pourrait appeler "l'appareil étatique", c'est-à-dire des administrations de l'Etat, à travers la mobilisation de différents "capitals".
Ce n'est qu'avec Machiavel que le terme « Etat » apparaît dans le sens que nous lui connaissons maintenant, à savoir celui d' « Etat souverain » ; avant cela, le terme renvoyait au latin status signifiant "fonction". Le terme d'Etat est complexe à définir, car il s'agit à la fois d'une réalité historique et d'une construction théorique, les deux phénomènes étant liés.
L'enjeu d'une étude telle que la sociogenèse de l'Etat fut, pour Elias, d'utiliser l'Histoire comme outil pour développer une théorie sociologique de la formation des Etats. Bien qu'ayant tous des pré-notions plus ou moins floues de ce qu'est l'Etat et de comment il s'est construit, les origines sociologiques d'un tel processus ne nous sont pas familières. Les textes qui nous sont proposés permettent d'éclairer quelque peu cet objet d'étude et ce à travers des notions que nous connaissons (tels que l'Histoire, l'économie, etc.) et que, pourtant, nous ne remettons que rarement en cause d'un point de vue sociologique.
On constate, ainsi, à la lecture de ces textes, que l'Etat en Occident semble se construire sur la concentration des monopoles par des structures administratives au sein de l'Etat" et, par conséquent, sur la désagrégation de ce qu' Elias appelle l'unité de domination. L'enjeu principal de ce dossier, sera donc de tenter d'expliciter cette problématique. Cependant, il nous semble important de répondre à certains points secondaires. En effet, comme nous l'avons vu plus haut, le type d'approche que met en œuvre Norbert Elias ne correspond pas vraiment à l'approche classique de l'historien. Nous essaierons donc d'explicité au mieux les modèles proposés par les auteurs et ce à travers quelques explications méthodologiques.
[...] Ainsi, la présence de "capitalistes" sur le territoire de l'Etat, devient un nouveau critère de sa formation. Tilly apporte enfin une nuance aux développements d'Elias en précisant que les débats sur le passage du féodalisme au capitalisme se sont trop appuyés sur l'exemple de la France et de l'Angleterre, et négligèrent que le féodalisme prit différentes formes, des fois peu comparables, selon les pays avec des grands propriétaires terriens dominant aussi bien les capitalistes que les rois comme en Pologne, ou leur totale absence en Hollande. [...]
[...] L'engagement est le fait de se laisser entraîner, guider, par ses affects lorsque l'on mène une étude ; la distanciation, à l'inverse, consiste à prendre une distance totale et ne rien laisser influencer son jugement. Pour Elias, ces deux extrêmes devant être évités, il faut tendre vers un compromis appelé continuum. En l'occurrence, l'introduction de La dynamique de l'occident fait fortement penser à cette méthode dans le sens où, comme le préconisait Descartes, Elias repart à zéro et ré explore l'Histoire dans la période qui l'intéresse. Il n'est pourtant pas historien, ce qui se voit d'ailleurs à travers les enchaînements, parfois maladroits, d'énumérations d'événements. [...]
[...] Cette étude nous a aussi permis de comparer le modèle proposé par Norbert Elias avec d'autres pays et là, nous avons pu constater que si ce modèle s'appliquait fort bien à la France, il n'en était pas de même pour d'autres pays tels que l'Allemagne par exemple. Nous aurions aussi pu aborder le sujet des cités États d'Italie tel que la République de Venise qui selon le modèle eliassien ne rentre pas dans les critères de l'Etat occidental. On trouve, effectivement, dans ce cas un pouvoir fortement encadré par le peuple Vénitien, lui-même, qui n'a eu de cesse de limiter le pouvoir du Doge à travers divers textes tels que la promissio ducalis. [...]
[...] Il compare également le cas de la France avec d'autres pays et constate que l'Angleterre et le Japon ont aussi eu recours à cette unification culturelle. Cette unification touche aussi la langue qui doit être unifiée au même titre que le reste de la culture. On voit ici émerger un début d'identité nationale à travers la légitimation d'une culture nationale. Il y a ensuite, un capital symbolique. En d'autres termes, l'Etat nous fait partager un ensemble de croyances qui sont propres à nous faire penser de telle ou telle façon. [...]
[...] En effet, comme nous l'avons vu plus haut, le type d'approche que met en œuvre Norbert Elias ne correspond pas vraiment à l'approche classique de l'historien. Nous essaierons donc d'expliciter au mieux les modèles proposés par les auteurs, et ce, à travers quelques explications méthodologiques. Ainsi, nous étudierons dans un premier temps les prémisses de la notion d'Etat et de sa formation vers ce que nous connaissons pour enfin analyser sa consolidation et sa symbolisation à travers l'accaparement par celui-ci de nouveaux monopoles assurant son pouvoir (II). [...]
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