La démocratie est une organisation de séparations. Il y a au moins six séparations : division du travail, séparation des pouvoirs, séparation Eglise/Etat, séparation société civile/Etat, séparation représenté/représentant, séparation faits/valeurs ou science/vie. La liberté moderne est fondée sur une organisation des séparations.
Il y a une division qui est reconnue dans les sociétés prédémocratiques, c'est la division gouvernants/gouvernés. La liberté du citoyen grec se définit par le fait que les rôles de celui qui commande et de celui qui obéit ne sont pas déterminés par la naissance. Chaque citoyen est tantôt commandant, tantôt commandé. Les citoyens grecs se rassemblent sur l'agora. Le civisme ancien est le contraire de la séparation. Comment la liberté moderne en est-elle venue à reposer sur un système de séparations ?
Pour Montesquieu, dans son ouvrage l'Esprit des lois, il y a deux séparations : celle entre les représentés et les représentants, et celle entre les pouvoirs (exécutif et législatif).
Dans Le désenchantement du monde, publié en 1985, Marcel Gauchet considère que nous sommes sortis d'un monde où la religion était structurante. On a affaire à un affaiblissement des Eglises : diminution de la pratique religieuse, baisse des vocations, dépérissement de l'autorité, transformation du sens de la religion pour les adeptes eux-mêmes. Aux yeux des fidèles, les Eglises n'ont plus vraiment l'autorité pour déterminer les croyances, encore moins pour orienter les choix politiques ou régler les mœurs. Le croyant, dans sa vie, vise autre chose qu'une vérité objective universelle, une vérité à laquelle tous les hommes devraient croire. Il la choisit plutôt pour se choisir lui-même. Il ne cherche pas à convertir les autres. L'« apologétique » a pour ainsi dire disparu du discours religieux contemporain. Mais il n'admet guère que l'on argumente contre elle, il veut qu'on la respecte, car toute critique contre la religion devient une critique contre sa personne. La République représentait l'autonomie collective face à la religion. Maintenant que la religion est absorbée par et dans la démocratie, la République a perdu l'adversaire qui lui donnait du sens. L'individu démocratique a donc conquis son autonomie complète, mais peut-être stérile, car les questions les plus décisives, les plus intéressantes pour l'homme, celle de la vérité religieuse ou philosophique ont été écartées.
[...] Quels sont les motifs des hommes engagés pour la paix ? Dans la plupart des cas, les motifs sont intéressés. Si nous supposons que la paix est acquise, ce sera une paix extérieure, c'est-à- dire une absence de guerre. Si l'objet de notre désir est une vraie paix, complète, donc également intérieure et morale, il faut imaginer que l'humanité tout entière soit capable d'expérimenter une conversion morale. En vérité, nous sommes plus kantiens que Kant. Nous avons délégitimé complètement la guerre, ce que Kant n'a pas fait. [...]
[...] Sous la main du roi, tous tendent à devenir également sujets. Avec la Révolution, le corps complexe, constitué par les trois ordres et le roi, corps composé de parties, est remplacé par un corps homogène et sans parties. La nation : dans une humanité qui semble en voie d'unification, la nation, avec son particularisme, semble archaïque. Pour Aristote, l'homme est un animal politique. Politique, c'est-à-dire fait pour vivre dans en cité. La nation moderne est pour une part une expression du projet démocratique. [...]
[...] L'Europe organisée sur ces bases serait un vaste espace de civilisation, soumis à des règles uniformes, et non un corps politique ouvrant à des citoyens une aventure commune, une communauté de destin L'Europe souffre d'une indétermination politique. Le problème des Européens, c'est qu'ils ne savent pas ce qu'ils veulent mettre en commun. Si elle ne s'étend pas plus loin, c'est pour des raisons de contrainte budgétaire à l'intérieur et d'immaturité démocratique à l'extérieur. Cette loi d'extension indéfinie traduit son incapacité à se définir politiquement. [...]
[...] Les dieux étaient principalement ceux de la cité. Aux religions païennes, politiques et particularistes, on oppose généralement les religions révélées, universalistes et spirituelles, qui transmettent un message de Dieu, adressé à chacun. La religion juive et l'islam rejettent énergiquement l'idéologie païenne, mais ont en commun avec le paganisme la fusion du politique et du religieux. La religion chrétienne est différente. Elle se définit moins par une loi que par une foi. Le christianisme se désintéresse du monde. Il faut rendre à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu (Matthieu, XXII, 21). [...]
[...] Si l'Eglise catholique a rejeté si longtemps le principe des droits de l'Homme, c'est que ce principe subordonne la vérité à la liberté, tandis que pour l'Eglise, le sens de la liberté est de parvenir à la vérité. Les êtres humains ont pour premier devoir de reconnaître la vérité dont l'Eglise est le dépositaire et le véhicule. Une autre partie de la société qui s'oppose à ces droits de l'Homme, ce sont certains conservateurs, dont le fondateur de ce courant se trouve être Edmund Burke, qui publie en novembre 1790 ses Réflexions sur la Révolution française. [...]
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