L'ensemble des études présentées ici témoigne d'un double mouvement : d'une part, de recomposition des cultures politiques existantes, d'autre part, de pérennité des tempéraments et des schèmes traditionnels.
Trois facteurs principaux de recomposition des cultures existantes sont à l'œuvre dans la société française. Tout d'abord, un profond mouvement d'individualisation et de prise de distance par rapport aux allégeances collectives traditionnelles affecte la société française et la pérennité de ses choix politiques. Cela se traduit par un lien plus lâche et labile aux cultures politiques : celles-ci voient ainsi leur hétérogénéité interne se renforcer et, en même temps, s'atténuer les différences entre grandes familles opposées. L'univers de la droite est traversé d'une profonde fracture entre les références de la droite classique et celles de l'extrême droite.
Deuxième facteur de transformation : l'ouverture de l'économie, de la société et du système politique sur l'international. La construction européenne, les flux migratoires, la mondialisation de l'économie sont autant d'enjeux qui suscitent des réactions diversifiées à la fois au sein des électorats de gauche et de ceux de droite.
Dernier facteur de transformation des cultures : l'élévation régulière du niveau d'études.
[...] Même au sommet de la pyramide sociale, les femmes déclarent un intérêt politique bien moindre que les hommes (10 à 15 points). Loin de diminuer avec le niveau des diplômes, l'écart de politisation est, au contraire, plus élevé chez les diplômés du supérieur (18 points) qu'il ne l'est chez les diplômés du primaire. Leur relatif désintérêt politique paraît bien être la résultante de deux phénomènes opposés. Provenant d'un sentiment de moindre compétence chez les unes les plus défavorisées , il résulte chez les autres les plus dotées en capital culturel et social d'une prise de distance critique vis-à-vis de la politique. [...]
[...] Parallèlement à la montée de l'abstention, on observe une augmentation de son aveu dans les sondages. Reconnaître que l'on s'est abstenu est moins tabou que par le passé. Dans l'enquête électorale de 1997, l'abstention déclarée correspondant, comme il est d'usage, aux abstentionnistes déclarés et aux sans-réponses s'élève à soit 3,4 points de moins que dans la réalité. admettre ( affaiblissement de la relation au vote, une atténuation de l'imposition normative induite par le devoir civique et citoyen Françoise Subileau et Marie-France Toinet, en menant des observations longitudinales, ont noté que l'abstention, appréhendée de façon isolée, lors d'un seul scrutin, peut apparaître comme un indice de moindre insertion. [...]
[...] Les abstentionnistes hors jeu présentent plus fréquemment des attributs sinon d'exclusion sociale, à tout le moins de plus grande fragilité. La présence en plus grand nombre des femmes parmi les abstentionnistes hors jeu. Le niveau de diplôme constitue bien un élément structurant. Au total la distinction introduite entre les hors-jeu et les dans le jeu permet de rompre avec l'idée selon laquelle les abstentionnistes forment un bloc homogène et de rejeter aussi la tentation de les amalgamer avec le vote hostile aux partis de gouvernement. La moitié des abstentionnistes reste dans le jeu de la politique. [...]
[...] Etre hors jeu, c'est se positionner par défaut. Défaut d'expression, défaut de participation, défaut d'orientation, défaut de filiation. Les hors-jeu sont ceux qui ne votent pas ou qui votent autrement, blancs ou nuls. Les hors-jeu sont ceux qui ne s'intéressent pas à la politique, qui Sont défaillants par rapport à l'intérêt supposé que la politique devrait susciter. Les hors-jeu bien souvent n'ont pas de filiation politique ni de système de repérage bien défini. Ainsi les manques peuvent-ils être alignés. Mais il reste difficile de comprendre les significations de ce type d'attitudes ou de comportements. [...]
[...] Or, ils s'échappent de la norme démocratique, pourquoi ? Les abstentionnistes hors jeu et dans le jeu entretiennent-ils une même relation à la société ? Comment y sont-ils intégrés et quelles perceptions en ont-ils ? La relation à la société Par-delà sa seule signification politique, le vote est un mode d'expression du lien social. S'y révèle, dans la diversité des choix effectués, mais aussi au travers de la décision d'y prendre part ou non, la façon dont est intériorisée par les individus la légitimité de leur positionnement et de leur mode d'intégration à la société. [...]
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