Susanna Barrows est professeur d'histoire contemporaine à l'Université de Californie. Ici, elle mène une réflexion sur la foule en France dans les dernières années du XIXème Sentreprend à travers cet ouvrage datant de 1981 une réflexion sur la foule en France dans les dernières années du XIXe siècle, autrement dit sur une période qui s'étend surtout de la fin du 2nd Empire à la fin du siècle, marquée par une profonde crise sociale et politique, notamment sous la IIIe République.
Sa réflexion comporte 2 aspects : outre l'étude du mouvement de foule en lui-même, Susanna Barrows se penche surtout sur la représentation que les contemporains de cette époque pouvaient en avoir, et par là même sur la vision que rapportent les travaux d'un historien comme Hippolyte Taine, d'un écrivain comme Emile Zola ou encore de psychologues de la foule, dont notamment Gustave le Bon, qui tenteront de porter une analyse purement scientifique sur le sujet.
Elle examine donc la psychologie des foules qui prend une importance considérable à la fin du XIXe siècle, tentant d'en évaluer « l'exactitude historique » et de « comprendre et mesurer sa sélectivité et peut-être sa distorsion ».
[...] Mais son idéologie le pousse apparemment plus loin puisque selon S. Barrows il se souciait moins d'analyser la dynamique de la psychologie des foules que de la qualifier de pathologique ; son analyse serait donc orientée par des préjugés idéologiques. Son œuvre fut en effet la Bible d'une génération de penseurs réactionnaires et traduirait des préjugés en faveur de l'aristocratie dont il vante la responsabilité civique et qu'il oppose à des révoltes populaires poussées par des raisons animales. Enfin, S. [...]
[...] Dans tous les cas, la foule est une régression mentale, même si elle n'est pas toujours monstrueuse. Ce qui fait l'originalité de Le Bon, c'est qu'il parvient à analyser le leadership dans les foules, de manière à trouver une solution à ce problème. Pour lui, la civilisation est en déclin, elle se dirige vers une ère des foules Ce danger est associé au socialisme qu'il décrit comme une religion, où l'on rend un culte aux chefs. La foule est comparée au Sphinx : si l'on ne veut pas se faire dévorer, il faut comprendre le fonctionnement de sa psychologie. [...]
[...] Susanna Barrows, en étudiant et en critiquant selon une démarche voulue objective les thèses sur la foule en France à la fin du XIXe siècle met en valeur l'importance que l'idéologie peut prendre dans l'orientation d'une étude sociologique et combien elle peut déformer celle-ci, fournissant une vision erronée et nécessitant donc une étude ultérieure, qui replace ici les psychologues des foules et leurs études dans leur réalité historique, culturelle, et psychologique. Mais Susanna Barrows, bien que faisant preuve d'une démarche d'historienne accomplie, semble elle aussi, bien que dans une moindre mesure, orientée par ses opinions politiques, que l'on peut deviner à travers cet ouvrage et qui reflèteraient plutôt une pensée démocrate, voire socialiste. [...]
[...] Henry Fournial, quant à lui, reprend les éléments d'autres auteurs : la foule est sujette à la contagion des émotions, qui la conduit au crime. Il souligne l'importance de l'habileté oratoire et l'apparence de la bravoure et considère lui aussi que toute collectivité favorise les mauvais instincts. Gabriel Tarde est un des premiers lecteurs de Sighele et s'oppose à celui- ci sur le fait que les hommes naissent en criminels ; selon Tarde, ils le deviennent et choisissent d'enfreindre la loi. [...]
[...] En appliquant une méthode qui se voulait scientifique, ils sont parvenus surtout à simplifier leurs peurs en les concentrant dans le phénomène de foule, évitant ainsi la considération des véritables problèmes de l'époque, mais ont également à conforter leurs propres idéaux que les doctrines égalitaires mettaient à mal. Ils ont par ailleurs manqué de rigueur en faisant intervenir l'imaginaire dans des ouvrages qui se voulaient scientifiques ; seul Zola, à travers le roman, pouvait légitimement agir de la sorte. Le Bon marque un tournant ; il est le premier à comprendre que la foule peut être manipulée par la Droite, comme par la Gauche, et par là il amorce la montée de Nouvelle Droite qui va manipuler la foule dans ses perspectives politiques. [...]
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