« Les grands États peuvent supporter de grands abus, ce sont les grandes fautes qui les font périr » : c'est par cette citation tirée des Maximes politiques du duc de Lévis, général français de la fin du dix-huitième siècle, que Philippe Delmas ouvre son essai sur Le Maître des Horloges, traitant du rôle de l'État dans l'économie. La métaphore de l'horloger, empruntée à Voltaire, est ici pleinement justifiée. En effet, l'économie est le règne de l'intérêt individuel à court terme, alors que l'État s'est socialement construit comme le garant de l'intérêt général et du long terme. Dès lors, l'intervention des pouvoirs est légitime dans la mesure où la logique économique ne saurait mener spontanément à la satisfaction de l'intérêt collectif : « l'État est le gardien des horloges, le pourvoyeur de la lenteur nécessaire, inaccessible aux marchés parce que contraire à la rapidité qui fait leur force. » Cependant, pour ne pas manquer son but l'intervention de l'État doit être la plus mesurée possible. Après avoir démontré les limites des mécanismes privés, Delmas passe au crible les politiques économiques du Japon, des États-Unis, de la France et de l'Allemagne pour mieux cerner les conditions de leur réussite. De son travail, il ressort que l'Etat-horloger doit éviter deux écueils du court-termisme des décideurs économiques : l'effondrement du système économique lui-même, d'une part, l'érosion de la cohésion sociale, d'autre part.
[...] P : Il montre les dangers, du point de vue de la compétitivité à long terme de l'économie américaine, de la baisse du budget de l'école publique aux Etats-Unis. P : Il énonce des statistiques démontrant qu'il n'existe pas de lien causal mécanique entre meilleure qualification et emploi. P. 235-236 : Il opère un lien entre la prise en charge d'une partie importante de la formation professionnelle initiale des jeunes japonais par les entreprises, et la meilleure productivité des salariés japonais. [...]
[...] Chapitre VIII : La modernisation contre la mobilisation ? P : L'auteur présente des statistiques sur la baisse du salaire réel des ouvriers et la stagnation de celui des ingénieurs aux Etats-Unis dans les années 1970-1980, ainsi que sur l'importance des emplois peu rémunérés dans les créations d'emploi. P : L'auteur montre en quoi l'intéressement des ouvriers au succès de l'entreprise est un facteur d'accroissement de la productivité et donc de la compétitivité. NB : En France, la loi n°2006-1770 du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié doit conduire à la généralisation des dispositifs d'intéressement (existant depuis 1959, mais peu appliqués), permettant aux salariés de profiter davantage des profits de leur entreprise . [...]
[...] Les horloges ne sont pas échangeables. P coût [d'une politique publique] n'est rien en soi, il n'a de sens que dans le rapport avec ce qu'il procure. Or la comparaison n'est jamais faite. Quel est le coût d'un tissu social réduit en miettes dans des régions entières, des vies gaspillées, des ressources inutilisées ? ( ) le débat est encore celui du sens du temps et de la perception ou non des nouveaux déterminants de la compétitivité d'une nation et pas seulement d'une entreprise. [...]
[...] Exemples Chapitre I : Les mythes de l'État minimal PP. 12-13 : L'auteur relève un certain nombre de propos tirés de discours politiques, qui illustrent la libéralisation idéologique des hommes d'Etat. PP. 14-15 : L'évolution du taux d'épargne au Japon témoigne de la préférence croissante des Japonais pour le présent. P : L'auteur présente des statistiques prouvant l'augmentation de la proportion du nombre de travailleurs pauvres aux Etats-Unis et la stagnation du pouvoir d'achat des ouvriers américains, preuves que l'exclusion sociale ne concerne plus seulement les personnes rejetées en dehors du monde du travail, mais fait désormais partie intégrante du système économique libéral. [...]
[...] La logique économique contre la société Désormais la marginalisation est dans le système et non au dehors : ce diagnostic du marché du travail établi par Delmas est toujours valable aujourd'hui. On observe une dualisation croissante du marché du travail entre, d'une part, les salariés qui bénéficient d'une véritable stabilité professionnelle, d'autre part, un nombre croissant d'actifs rejetés à la périphérie, victimes du chômage de longue durée ou occupant des emplois instables et mal rémunérés : les travailleurs pauvres des services et des industries de sous-traitance. [...]
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