Drôle de paradoxe de commencer l'histoire d'une vie par la mort. Le premier Chapitre est pourtant plutôt funeste « La guillotine – plus généralement la peine capitale et les différents modes d'administration de la mort – aura été la grande affaire de ma vie. »(15) Claude Lanzmann les passe en revue, donnant le ton de cet ouvrage : un style assez recherché, des tournures syntaxiques laissant transparaitre son érudition ainsi qu'une grande culture comme le prouvent les innombrables citations d'auteurs, de lieu, de faits historiques. L'avant-propos nous informe que débuter ce livre fut sans doute la tache la plus difficile « Je lui dictai donc en un jour la première page avec facilité, mais attendis des mois pour atteindre la seconde ». Pourtant je trouve cette première partie assez révélatrice de l'ouvrage. Bien que le mot Mémoires figure en bonne et due place sous le titre, le livre n'est pas un simple amoncellement de faits dans un ordre chronologique, mais plus une spirale de souvenirs sautant parfois des étapes, revenant en arrière si bien que cette autobiographie s'apparente parfois à une sorte de « roman réel ».
[...] De manière triviale on pourrait dire qu'il a tendance à raconter ce qui le met en valeur et donne envie d'interroger ses propres silences. Loin d'être une accusation d'imposture la prétention étant souvent presque légitime cette digression met en lumière mon ressentiment d'avoir été à la lecture de ce livre face à un autoportrait retouché. Il y a quelque chose qui m'a gêné et que je résumerais comme la collusion entre l'histoire et l'Histoire, le parcours d'un homme ayant vécu au cœur ou au plus près de certaines des intrigues de l'histoire contemporaine et dans lesquels il a été acteur. [...]
[...] Ralliant certains de ses camarades de son réseau de résistance du lycée, il rejoint son père et d'autres résistants afin de s'entrainer avant de passer à des actions de plus grandes envergures. Il y eut trois embuscades en 1944, une première avortée, une seconde plutôt fructueuse et une troisième qui se solda par une fuite à travers monts et vallées. Cette période correspond aussi à celle où un personnage clef va entrer la vie de l'auteur. Monny de Boully Juif de Belgrade poète surréaliste, extraordinaire magicien et nouvel homme de la mère de Claude Lanzmann. [...]
[...] On sent que l'on a à faire à de gros caractères, à des personnes remarquables Cela ne compte d'ailleurs pas que pour les membres de sa famille, la plupart des personnes évoquées dans le livre ont des destins atypiques. Mais de ces grands personnages, Monny sort du lot, l'admiration que le lui voue l'auteur équivaut celle qu'il porte à Simone de Beauvoir ou à Jean Paul Sartre. Ces trois personnages sont les plus cités dans le roman. Ce sont aussi ceux qui ont le plus influencé sa vie. [...]
[...] Son travail de journaliste le mène en Corée du Nord et en Chine. Fier de son audace face à des représentants de la dictature de Kim Il-sung et de son amour impossible avec Kim Kum-Sum, infirmière,il narre ce voyage comme un film, posture qu'il défend explicitement tant il trouve son aventure chevaleresque. Ce chevaleresque se retrouve quand il nous explique qu'il a refusé un poste avantageux à l'Express car il ne se voyait pas devenir journaliste professionnel. Quelque chose de profond (p.294) l'en a empêché. [...]
[...] qui l'a poussé à changer de nom plusieurs fois. Il a passé la première partie de sa vie entre Paris et Brioude en Haute-Loire, parfois chez sa mère remariée à Mommy dont nous reparlerons, parfois avec son père, ancien combattant de la guerre de 14, mais longtemps entouré de sa soeur Evelyne, dont le destin tragique alimente une partie de cet ouvrage, et de son frère Jacques. Nous étions, si j'y réfléchis, d'étranges enfants, > nous livre-t-il quand il parle de son premier travail dans les vignes, de son premier salaire, qu'il a d'ailleurs ainsi que son frère entièrement reversé à son père. [...]
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