Les droits de l'homme relèvent-ils ou non du domaine politique ?
Une opposition fondamentale est manifeste entre un modèle de société totalitaire (stalinien, maoïste etc.) et un modèle qui implique la reconnaissance des droits.
L'homme de gauche non communiste se veut à la fois libéral et socialiste :
- Libéral, il invoque les principes de 1789 et se plaît à imaginer un heureux mélange de socialisme et de libertés. Sa cécité à l'égard du totalitarisme trouve là son explication. Qu'on ne s'étonne donc pas de l'aisance avec laquelle les communistes combinent la critique des procès intentés aux dissidents soviétiques avec la défense d'un régime présenté comme "globalement positif".
Or de ce langage ne s'affranchissent pas ceux qui rompent résolument avec le réalisme politique, pour épouser inconditionnellement la défense des droits de l'homme, car cette rupture s'accompagne d'un pur et simple refus de penser le politique.
C'est dans La Question juive que Marx a livré l'essentiel de son interprétation des droits de l'homme ; tentons donc de l'interroger.
Pour Marx les droits de l'homme est "la garantie de son égoïsme".
Or l'expérience du totalitarisme jette une sinistre lumière sur les faiblesses de cette interprétation.
Marx retient de la révolution bourgeoise ce qu'il nomme "l'émancipation politique", c'est-à-dire la délimitation de la sphère politique et de la sphère sociale, qui elle, laisse place à la combinaison d'intérêts particuliers et d'existence individuelles. La révolution française a eu comme résultat une émancipation politique, mais celle-ci est illusoire si elle ne comporte pas une émancipation sociale.
Marx se laisse faire prisonnier de la version idéologique des droits, sans examiner ce qu'ils signifient dans la pratique, quels bouleversements ils apportent dans la vie sociale. Et, de ce fait, il devient aveugle à ce qui dans le texte même de la Déclaration apparaît en marge de l'idéologie (...)
[...] Déchiffrer les signes du nouveau Dans une deuxième partie, titré Déchiffrer les signes du nouveau, Claude Lefort nous guide à travers un récit historique et critique des événements et mouvements de révoltes et de dissidence qui a lieu entre 1956 et jusqu'aux années 80 en Europe de l'Est, en se focalisant sur la révolution hongroise de 1956, la Pologne dans les années 1970 et les débuts de Solidarnosc. En parallèle, Claude Lefort continue une analyse critique sur la situation de la gauche en France, surtout le parti communiste français, et leur attitude envers les événements de l'Est. [...]
[...] C'est dans La Question juive que Marx a livré l'essentiel de son interprétation des droits de l'homme; tentons donc de l'interroger. Pour Marx les droits de l'homme est la garantie de son égoïsme Or l'expérience du totalitarisme jette une sinistre lumière sur les faiblesses de cette interprétation. Marx retient de la révolution bourgeoise ce qu'il nomme l'émancipation politique c'est à dire la délimitation de la sphère politique et de la sphère sociale, qui elle, laisse place à la combinaison d'intérêts particuliers et d'existence individuelles. [...]
[...] Et, de ce fait, il devient aveugle à ce qui dans le texte même de la Déclaration apparaît en marge de l'idéologie. - Les droits de l'homme étant déclarés, surgit, de la fiction de l'homme sans détermination, toute la critique d'inspiration marxiste, mais aussi conservatrice s'engouffre dans cette fragile citadelle pour la démolir. Joseph de Maistre proclamait ainsi: j'ai rencontré des Italiens, des Russes, des Espagnols, des Anglais, des Français, je connais pas l'homme. Et Marx jugeait qu'il n'était pas d'hommes que concrets, historiquement et socialement déterminés, façonnés par leur condition de classe. [...]
[...] Mais d'après Lefort ce faisant ils ne pouvaient concevoir ni la nature des phénomènes totalitaires, ni la nature de la démocratie. La vision de Lefort fait de la disparition du corps politique du chef la mise à mort du roi, chez Kantorowicz un moment fondateur de la démocratie, car elle fait du lieu du pouvoir, auparavant occupé par une substance éternelle transcendant la simple existence physique des monarques, un lieu vide auquel peuvent se succéder, mais seulement pour un temps et au gré des élections, des groupes d'intérêt et d'opinion concurrents. [...]
[...] Claude Lefort L'invention démocratique, les limites de la domination totalitaire Claude Lefort (1924-2010) était directeur d'études à l'EHESS. Fondateur avec Cornelius Castoriadis des revues Socialisme et Barbarie puis Libre, il est notamment l'auteur de Le Travail de l'oeuvre: Machiavel; Sur une colonne absente, écrits autour de Merleau Ponty; Un homme de trop. I. Contributions à l'intelligence du totalitarisme 1. Droits de l'homme et politique Les droits de l'homme relèvent-ils ou non du domaine politique? Une opposition fondamentale est manifeste entre un modèle de société totalitaire (stalinien, maoïste etc.) et un modèle qui implique la reconnaissance des droits. [...]
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