Selon le très célèbre historien Eric Hobsbawm, l'accord de Maastricht, qui établit la naissance de l' Union Européenne n'aurait pas été possible sans le choc psychologique créé par la chute du mur de Berlin et par les nouveaux enjeux qu'elle a éveillés. Plus récemment encore, les événements du 11 septembre ont focalisé l'attention sur ce domaine, vu comme une ressource pour mieux défendre l'Europe d'une attaque terroriste.
Ces pressions extérieures ont poussé Jacques de Maillard à mettre en valeur l' «européanisation» de l'action publique et l'effort de coopération entre les États pour répondre aux nouveaux défis du monde contemporain. L'objectif de sa recherche est de comprendre comment se construit et se stabilise un niveau européen de gestion des affaires criminelles, envisagé principalement du point de vue de la coopération policière. A ce propos, il souligne le rôle essentiel joué par les états, vus comme porteurs de modèles d'action et d'intérêts nationaux spécifiques. Ainsi faisant, il est très attentif au poids des représentants des administrations nationales, qui sont au coeur du processus de négociation, pour enfin parvenir aux logiques de formation de la législation européenne. Sa thèse offre aussi des interviews directes aux membres des comités qui sont directement impliqués dans la formation du processus décisionnel.
Tout d' abord, il cherche à expliquer «comment se déroule l'interministérialité au quotidien», voire comment les différentes administrations nationales s'impliquent sur les questions de coopération européenne. En analysant la façon avec laquelle les administrations nationales s'adaptent aux enjeux de l' Union Européenne en matière de sécurité intérieure, il fait remarquer que le régime de chaque état membre influe lourdement sur la manière dont les prises de positions sont développées et soutenues. L'organisation interne des ministères est en effet très différente entre les états européens et le cas français et britannique semblent être les polarités autour desquelles se construit un travail comparatif qui peut en montrer les conséquences.
[...] Le Royaume-Uni, par contre, est considéré comme un exemple de pragmatisme et efficacité parce qu'il présente une négociation plus centrée autour d'un ministère particulier : la prise de position nationale en matière de JAI se partage entre 4 organisations, mais c'est le ministère de l'Intérieur (Home Office) qui détient la puissance hégémonique, car les affaires de justice et de police ont toujours été traitées par un seul ministère, ce qui fait de l'arrangement institutionnel britannique un exemple de cohérence et de coordination enviable. Une des plus importantes caractéristiques qui contribuent à son importance en matière de JAI concerne le rapport entretenu entre les hauts fonctionnaires de cette administration et leurs responsables politiques. En plus, le Cabinet Office, qui constitue l'instance interministérielle équivalente au SGCI, intervient seulement s'il y a un blocage dans les négociations interministérielles. [...]
[...] L'organisation interne des ministères est en effet très différente entre les états européens et le cas français et britannique semble être les polarités autour desquelles se construit un travail comparatif qui peut en montrer les conséquences. La première divergence concerne la répartition des rôles, et donc les ressources de pouvoir, entre les différentes administrations nationales. En France, le centre de la négociation se situe entre les ministères de l'intérieur et de la Justice, donc la direction du pole JAI au sein de la RP est alternativement confiée à un magistrat et un préfet. [...]
[...] En France et en Italie, les forces de police sont inscrites dans une hiérarchie administrative bien structurée, néanmoins l'Allemagne en propose une organisation qui situe dans les Lander les compétences principales. Cette opposition est très forte en ce qui concerne le rôle dévolu à l'Europol, l'office européen de police, dont le rôle est défini dans le cadre d'une convention à cause des projets divergents sur sa position : structure fédérale pour les uns, organe de liaison entre policiers nationaux pour les autres. [...]
[...] L'unanimité confère un pouvoir de veto potentiel aux états en difficulté sur une question précise. Toutefois, ce principe ne s'applique pas mécaniquement parce que les Etats sont souvent enserrés dans des réseaux de contraintes dus à des négociations multiples, qui les empêchent de faire un usage systématique de ce pouvoir formel : chaque état vise aussi à ce que sa délégation ne soit pas isolée. Cet aspect rend très changeable l'agenda politique de l'UE, qui est marquée par une double dynamique : la dilatation temporelle et l'accélération selon les événements politiques, qui exercent une pression plus ou moins forte sur les acteurs européens. [...]
[...] La recherche de de Maillard continue focalisant l'attention sur le ressort des négociations européennes en matière de coopération judiciaire pénale et, surtout, policière. Après le traité d'Amsterdam signé le 2 octobre 1997, la réalisation d'un espace de liberté, de sécurité et de justice devient un objectif qui s'inscrit dans le traité de l'UE à art.2. La création du marché unique a conduit à l'abolition des contrôles physiques aux frontières intérieures, donc la mise en place de forces de police et d'institutions judiciaires semble nécessaire afin de garantir la sécurité sur le territoire européen. [...]
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