Sondage, influence des sondages, sociologie, opinion publique, Bourdieu
Dans les sociétés démocratiques, le concept d'opinion publique s'est largement imposé jusqu'à devenir banal et a priori accepté de tous. Pourtant cela ne va pas de soi et elle est le centre d'une querelle forte entre sociologues, entre politistes. Cela présuppose en effet que tout le monde ait une opinion sur tout et que toute opinion ait la même valeur. Or Bourdieu, dès 1972, dans son article au titre provocant “L'opinion publique n'existe pas”, s'attache à démontrer la caducité du concept d'opinion publique. C'est pourtant celle-ci que journalistes, politologues et surtout sondeurs consultent, interrogent et commentent sans cesse.
[...] Le sondage a créé sa popularité. De même, les sondages ont une véritable action sur les élections, sur ce qu'on pourrait appeler les primaires Aujourd'hui, plus personne n'oserait se présenter à l'investiture de son parti ou à la candidature à la présidence de la république sans avoir une opinion publique favorable. Le sondage permet de départager et d'évincer des candidats qui auraient pu être bons. Alain Lipietz s'est retiré au profit de Noël Mamère en 2002 pour la candidature Verts parce que ce dernier avait une meilleure cote de popularité. [...]
[...] En conclusion, les sondages sont selon Alain Garrigou une vaste imposture qui a des effets incompréhensibles dans une société se voulant rationnelle. Derrière l'alibi de la science et de la démocratie, les instituts de sondage manipulent de manière peu scrupuleuse les chiffres. Si comme Bourdieu, on peut nier l'existence d'une opinion publique, les sondages, eux, en créent une, aussi faussée soit-elle. Mais le problème est que l'action politique se fixe sur une lumière illusoire et sur la créature de plus en plus fantomatique de l'opinion publique à l'instar de l'ivrogne de Kaplan qui cherche ses clés sous un réverbère parce que c'est mieux éclairé à cet endroit. [...]
[...] C'est la fonction performative des sondages. Par leur énonciation et leur répétition, ils vont faire exister quelque chose qui n'existait pas et qui va justifier des actions, notamment de la part des pouvoirs publics. On peut reprendre l'exemple de l'auteur sur les baromètres de popularité. Sur une grande liste de personnalités, le sondé doit donner un avis, dire qui il préfère. Il est évident que tous ne leur sont pas connus pourtant les chiffres révèlent que les sondés répondent toujours. [...]
[...] En effet, les instituts de sondages étudient et mesurent de l'humain. En cela, ils prétendent s'inscrire dans les sciences sociales. Or celles-ci sont basées sur un postulat essentiel : l'opacité de l'être humain. Selon l'adage, les hommes ne font pas ce qu'ils disent et ne disent pas ce qu'ils font. Un homme interrogé ne dira pas nécessairement la vérité, inconsciemment ou sciemment. De plus, si chacun connaissait les causes de ses actes par le travail de la conscience, la science ne serait plus d'aucune utilité. [...]
[...] L'ivresse des sondages - Alain Garrigou Dans les sociétés démocratiques, le concept d'opinion publique s'est largement imposé jusqu'à devenir banal et a priori accepté de tous. Pourtant cela ne va pas de soi et elle est le centre d'une querelle forte entre sociologues, entre politistes. Cela présuppose en effet que tout le monde ait une opinion sur tout et que toute opinion ait la même valeur. Or Bourdieu, dès 1972, dans son article au titre provocant L'opinion publique n'existe pas s'attache à démontrer la caducité du concept d'opinion publique. [...]
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