Le nationalisme en tant que doctrine politique dépasse le simple sentiment de vif attachement à la nation. Il affirme la primauté de l'intérêt national sur les intérêts particuliers de ses composantes d'une part et sur les intérêts des autres nations d'autre part. Le maurrassisme est une doctrine contre-révolutionnaire, royaliste, qui a pour ambition de rétablir la grandeur de l'État et sa cohésion. À cette fin, L'Idée de la décentralisation, publié en 1898, fait la promotion d'une ébauche de projet politique, à savoir la décentralisation.
En 1892 était parue la Déclaration des Jeunes Félibres fédéralistes, et les catholiques sociaux fixaient leur position sur l'administration territoriale du pays, sur les libertés communales et provinciales, sur la disparition du département. Maurras est imprégné des idées régionalistes et fédéralistes notamment du fait de son appartenance au Félibrige, (mouvement de « renaissance » provençale), association littéraire visant à assurer la défense des cultures régionales traditionnelles et la sauvegarde de la langue occitane ou d'oc. En 1898, il reprend donc ces principes pour en faire une doctrine politique.
Dans "L'Idée de la décentralisation", il exprime sa thèse sur la nécessité de décentraliser pour renforcer les institutions et l'État, il revient sur le contexte dans lequel elle s'est développée et reprend un certain nombre d'objections qui ont pu être faites pour les contester. À travers l'analyse de l'extrait, en quoi le renforcement des libertés locales, la redéfinition des compétences de l'État sont-ils indispensables à la réalisation du programme nationaliste d'après Maurras ?
[...] Ce fédéralisme indiquait la décentralisation politique et administrative plus ou moins complète, plus ou moins absolue. (La lutte qui eu lieu alors entre Girondins et Montagnards s'était cristallisée dans la Fête de la Fédération, le 14 juillet 1790, qui avait pour but de resserrer les liens entre les différents échelons territoriaux et la capitale suite au décret du 22 décembre 1789 par lequel les départements étaient crées en substitution des provinces d'Ancien Régime et aux décrets qui suivirent en 1790 pour consacrer la nouvelle division du territoire.) D'autre part, c'est l'influence légitimiste qui resurgit ici dans la volonté de décentraliser. [...]
[...] Maurras propose une large décentralisation et une autogestion des problèmes locaux, non par une classe politicienne départementale ou régionale mais, directement, par les acteurs sociaux. Maurras reprend une analyse d'Ernest Judet, rédacteur en chef du Petit Journal (journal apolitique et populaire créé en 1863, entraîné dans la campagne antidreyfusarde par son rédacteur en chef), pour illustrer les effets néfastes de la centralisation sur l'Etat : la centralisation, établie pour accroître les forces de l'État, était allée contre son but et avait énervé ces forces nationales ; il [Ernest Judet] signalait comment, dans l'affaire Dreyfus, l'État, si puissant contre toutes les initiatives privées, s'était trouvé sans armes pour défendre sa prérogative militaire et judiciaire. [...]
[...] Ici, plutôt que le roi, c'est l'Etat qui par la centralisation se fait tyran et peut conduire du même coup les citoyens à lui résister. La centralisation provoque donc un manque de légitimité pour l'Etat, et un désattachement des citoyens vis-à-vis de lui. Celui-ci est dangereux car il éloigne les Français de leur nation. C'est pourquoi Maurras cite Judet pour prôner la décentralisation : Dépouillons l'État de ses minimes mais désagréables privilèges qui ne sont qu'un instrument de tyrannie locale aux mains des fonctionnaires trop zélés et omnipotents ; mais resserrons précieusement le faisceau invincible des forces qui correspondent à la mission supérieure de l'État, qui lui permettent de représenter notre sécurité collective, notre fierté nationale, notre grandeur extérieure. [...]
[...] Toutefois, les premières lois de décentralisation en France ne verront le jour que le 2 mars 1982. C'est la loi Deferre (originaire du Sud-Est tout comme Maurras) relative aux droits et libertés des communes, départements et régions qui donnent aux collectivités territoriales davantage d'autonomie vis-à-vis de l'Etat afin, entre autres, que le citoyen se sente plus proche des décisions politiques et donc de la Nation comme le préconisait l'auteur royaliste. Cette loi sera suivie des lois des 7 janvier et 22 juillet 1983 répartissant les compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales et instaurant un transfert des ressources. [...]
[...] Toutefois il exprime bien le fait que cette union doit faire l'objet d'une décentralisation administrative. Il faut redonner aux forces naturelles un libre jeu c'est-à-dire rendre une certaine autonomie à ce qu'on appelle aujourd'hui les collectivités territoriales, leur attribuer les compétences qui leur sont naturellement et logiquement dévolues. Ainsi clame-t-il : Aux communes les affaires proprement communales, les provinciales aux provinces ( ) Toutefois, bien que Maurras choisisse de le passer sous silence, probablement pour rendre son propos plus percutant, il existe déjà une loi municipale datant de 1884. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture