Valéry Turcey est vice-président au Tribunal de Grande Instance de Reims, président de l'Union Syndicale des Magistrats (USM) et membre du Conseil Supérieur de la Magistrature. Ancien élève de Sciences Po, il s'est engagé dans la réflexion sur le système judiciaire en France, au moyen de ses deux précédents ouvrages, Le Prince est ses juges (1997) et Lettres aux gens honnêtes qui se sentent un peu seuls en ce moment (1999).
Le titre de l'horreur juridique est un clin d'œil à l‘horreur économique de Viviane Forrester, paru à grand bruit en 1996. Selon Turcey, le système judiciaire français est en passe de devenir monstrueux : sous l'influence du modèle des lawyers américains, et de la culture judiciaire qu'ils tentent d'imposer, le droit et les pratiques judiciaires françaises s'américanisent. Cependant le système juridique français est déjà imparfait, sclérosé, et les excès du modèle américain, conjugués aux inconvénients du modèle français risquent d'accoucher d'une réelle horreur juridique, dont la manifestation principale sera l'inégalité des citoyens devant l'accès à la justice.
[...] la sclérose de l'appareil judiciaire français Il y a en France 6700 magistrats, contre 25000 en Allemagne. Le budget de la justice ne représente qu' du budget de l'Etat, en tenant compte des dépenses pénitentiaires Devant la hausse du nombre de contentieux évoquée tout au long du livre, renforcée par la mise en œuvre du programme de la tolérance l'appareil judiciaire français risque d'imploser. L'auteur ironise ainsi, en disant que si les tribunaux étaient en mesure d'appliquer la tolérance ce serait déjà beau ! [...]
[...] Hors, les dirigeants français ont toujours tenu les juges dans un profond mépris, et ont toujours refusé de prêter attention aux avertissements des magistrats. Certains dirigeants ne verraient dans le juge qu'une figure menaçante Cependant il est temps d'agir, sinon, à plus ou moins court terme, on pourrait même en arriver à plaider et rendre des jugements en anglais dans les tribunaux de commerce (l'anglais est la langue des affaires, les procès touchent des firmes multinationales, en général représentées par des avocats américains Turcey propose quelques solutions. [...]
[...] Bien sûr, il est nécessaire d'aller dans ce sens, mais ces deux mesures sont très coûteuses. On voit mal comment un gouvernement, de gauche comme de droite, se décidera d'un coup à injecter l'argent nécessaire à ces réformes. Cela fait plusieurs dizaines d'années que les tribunaux sont engorgés, et que tous les programmes électoraux promettent de remédier au problème Que faire quand les mêmes programmes, pour des raisons certes louables, compliquent encore la situation avec des concepts comme celui de tolérance 0 ? [...]
[...] Enfin, nous verrons que Turcey termine son essai par un appel aux pouvoirs publics, et par quelques propositions concrètes que nous nuancerons. I. L'américanisation de système judiciaire français et ses conséquences réelles ou potentielles Vers une société contentieuse L'auteur montre tout au long de son livre l'engagement des Français sur une pente qui les mène au tout-procès, à une logique de contentieux pour tout problème. Cette logique va très loin, dans la mesure ou le code civil, par son article impose au juge de rendre un jugement pour toute question portée devant lui. [...]
[...] Valery Turcey souligne deux autres évolutions que le monde des lawyers et une partie de la classe politique appellent de leurs vœux. La première est l'instauration dans les cours françaises de l'interrogatoire croisé des témoins lors des audiences (les questions posées tour à tour par la défense et le parquet dans les séries américaines). En France, les parties ne peuvent pas interroger directement les témoins, ils doivent passer par le Président. Cela permet d'assurer la protection des témoins contre les intimidations des avocats grâce à une certaine neutralisation des questions. [...]
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