« L'Etat n'est pas et n'a jamais été authentiquement Souverain » . En effet, considérer l'Etat comme la partie supérieure du corps politique ne revient pas à dire qu'il est supérieur à ce corps lui-même. A en croire Maritain, philosophe catholique français considéré comme le pilier du renouveau du thomisme, l'Etat est une partie composante du corps politique et pas le tout ; réciproquement, l'entité étatique est inférieure au corps politique et par conséquent, elle demeure intrinsèquement liée au service du corps politique pris comme un tout. Ainsi, reprenant la notion élaborée par Saint Thomas, Maritain soutient que l'Etat participe au droit de self-government appartenant au peuple et exerce, tel un vicaire, la représentation politique sans pour autant faire appel à sa prétendue souveraineté. Issue de six conférences professées à l'Université de Chicago à la suite de la Seconde Guerre mondiale, la thèse directrice de L'Homme et l'Etat rejoint l'idée selon laquelle la politique doit être subordonnée à l'efficacité des forces morales qui, elles, sont capables de régler la conduite de l'Etat. Par ce biais, la fin de l'organisation politique c'est l'homme lui-même qui, doté d'une force morale le conduisant vers le but ultime de bien commun, forge réciproquement un Etat qui s'élève, comme un instrument, vers la poursuite d'une mission morale. Dans cette l'optique, « l'Etat n'est pas l'incarnation suprême de l'Idée ; il ne constitue pas une sorte de surhomme collectif ; l'Etat n'est qu'un organisme habilité à se servir de la force de la contrainte ». S'opposant à l'idée d'un Etat-gendarme, Maritain ne déprécie ni condamne l'Etat, mais s'efforce de démontrer qu'il a une mission morale à remplir dans le but d'atteindre le bien commun. Comment comprendre donc l'Etat de façon à subordonner la politique à l'efficacité des forces morales ? Cherchant à démontrer que « l'homme n'est en aucune façon fait pour l'Etat, mais que c'est l'Etat qui est fait pour l'homme », Jacques Maritain affirme d'une part que l'Etat, ne pouvant satisfaire la destinée supra temporelle de l'homme, ne peut cependant pas s'ériger en tant qu'obstacle ; ce qui veut dire que, l'organisation politique ayant comme fin les exigences du corps politique, d'autre part la politique doit se subordonner à l'efficacité des forces morales et de lois naturelles de l'Homme de façon à évincer le spectre d'un Etat totalitaire.
[...] Les citations en italique correspondent à des passages tirés de L'Homme et l'Etat de Jacques Maritain. [...]
[...] Dans cette l'optique, l'Etat n'est pas l'incarnation suprême de l'Idée ; il ne constitue pas une sorte de surhomme collectif ; l'Etat n'est qu'un organisme habilité à se servir de la force de la contrainte S'opposant à l'idée d'un Etat gendarme, Maritain ne déprécie ni condamne l'Etat, mais s'efforce de démontrer qu'il a une mission morale à remplir dans le but d'atteindre le bien commun. Comment comprendre donc l'Etat de façon à subordonner la politique à l'efficacité des forces morales ? [...]
[...] Par conséquent, la politique doit selon Maritain être subordonnée à la morale. En ce sens, il n'y a que le régime démocratique qui puisse traduire les exigences de l'Homme. Sans craindre d'élever des propos anachroniques, car Maritain lui- même érige le bien commun en tant que vérité atemporelle, la théorie du droit-intégrité développée par Ronald Dworkin dans L'Empire du Droit dresse une vision pluraliste de l'idée d'exigence de bien commun. De ce point de vue, l'intérêt fondamental du droit n'est pas de faire l'état d'un consensus, ni de fournir des moyens efficaces pour parvenir aux objectifs que s'est fixés une société donnée, mais de répondre à l'exigence d'une collectivité politique agissant envers chacun ses membres sur la base cohérente de principes définis (Dworkin). [...]
[...] Et si l'Etat ne répond à la conduite exigée par le peuple, ce dernier exerce ses moyens de contrôle sur lui. Ainsi, par le biais des élections, de la pression de l'opinion publique, de l'Assemblée Nationale, voire par des guerres spirituelles (qui fut la démarche de Gandhi, supportant la douleur, pour acquérir l'Indépendance de l'Inde), le peuple rappelle à l'Etat ses exigences démocratiques. Et c'est précisément ce lien que Maritain cherche à établir dans son œuvre ; le lien entre la démocratie et la morale. [...]
[...] Par ce biais, Maritain attache une vision instrumentaliste à l'Etat et ce denier cesse d'être une menace ; à l'Etat absolutiste ou totalitaire se substitue la compréhension de l'Etat comme étant une partie du corps politique instrumentalisé par les exigences de corps lui-même. A leur tour, les membres du peuple tout entier, les façonneurs du corps politique, jouissent du droit naturel de pleine autonomie, de self-government, et de contrôle de la structure étatique. Dans cette optique, le peuple est supérieur à l'Etat et l'Etat est pour le peuple. Reste que le corps politique a besoin des structures étatiques pour accomplir son but ultime du bien commun. [...]
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