Depuis la chute de l'URSS en 1991, il est désormais possible de dégager une période soviétique dans l'histoire russe, qui débute au lendemain de la révolution. Dans cet ouvrage, Nicolas Werth s'intéresse plus particulièrement aux années débutant au lendemain de la révolution bolchevique, en 1917, jusqu'à la mort de Staline, en 1953. Grâce à l'ouverture partielle des archives du PCUS et de l'Etat Soviétique au début des années 1990, les historiens et politologues ont accès à de nouvelles sources. L'ouverture de ces archives a été précédée de débats théoriques très vifs. Deux grands courants divisaient les études de soviétologie :
L'école totalitarienne :
Ce courant utilise un modèle idéologique : un régime politique fondée sur une base idéologique, un état tout puissant exerçant un contrôle absolu sur une société atomisée et devenue docile à la suite d'un endoctrinement massif. Il s'agit d'un système qui fait régner la terreur, qui veut créer un monde nouveau et qui cherche à dominer l'ensemble du monde.
L'Ecole totalitarienne néglige les apports de l'histoire sociale, les réactions de la société. Elle s'intéresse davantage aux formes de contrôle qu'aux capacités de résistance.
L'école révisionniste :
Ces historiens étudient le lien entre le stalinisme et la société. Ils cherchent les marques d'un consensus à travers les stratégies d'ascension sociale, soulignent les nuances chronologiques.
Ces ressources ont permis de dépasser cette opposition, et donnent lieu à de nouvelles problématiques, représentant pour Nicolas Werth l'étape actuelle du travail des historiens. L'une de ces interrogations centrale est celle de la continuité entre le léninisme et le stalinisme. Deux thèses adverses proposent deux points de vue totalement différents. Ainsi certains affirment que la pratique stalinienne est l'application directe de la théorie léniniste :la période de 1917 à 1953 est une période à part entière.. D'autres au contraire défendent l'idée selon laquelle ces trente six années ont été entrecoupées par de nombreux dilemmes, virages et changements démarquant le règne stalinien du léninisme. Nicolas Werth ne prétend pas proposer un modèle explicatif global, mais seulement un nouveau questionnement sur l'histoire politique et sociale de l'URSS.
[...] Les suspects de l'affaire Chakhty en sont également victimes. La seconde vague de répression vise le petit peuple kolkhozien (en 1932) et ouvrier (en 1938) qui refuse de se plier à la discipline de l'usine ou de la ferme collective. En 1936, la troisième vague s'attaque aux cadres politiques, administratifs, politiques, militaires et scientifiques appartenant le plus souvent aux partis. Les archives aujourd'hui disponibles permettent de préciser le nombre de victimes de la répression stalinienne dans les années 1930. La famine de 1932-1933 a fait 6 millions de morts et déporté 2,5millions de koulaks déportés. [...]
[...] Le Grand tournant : 1928-1929 Suite à la mort de Lénine en 1924, Staline élimine les opposants. Trotski et Zinoviev sont exclus du parti le 14 novembre 1928. Boukharine rédige un article dans la Pravda dont il est rédacteur en chef, où il démontre la différence fondamentale entre le plan léniniste de coopération pacifiste, progressiste et librement consenti, et le projet stalinien de collectivisation fondé sur la contrainte. Il en perd son poste, puis sera écarté de la présidence du Kominterm, car il préconise de privilégier l'unité de la classe ouvrière . [...]
[...] bien que désorientée et déstructurée, la société n'a cessé d'établir des limites et d'imposer des contraintes, et n'a pas seulement été le champ d'application de la coercition étatique. De plus, il souligne le poids de l'histoire russe dans le stalinisme. Il compare ainsi le projet stalinien à celui de Pierre le Grand : un développement sans émancipation. En effet, il repose sur une industrialisation forcée à l'initiative de l'Etat, sur ce qu'il appelle la domestication de la paysannerie, sur la création d'une classe de service faite de petits chefs, sur le rôle démesuré d'un nouvel appareil répressif. [...]
[...] Cette soi-disant rupture illustre en réalité l'illusion politique : il s'agit moins de célébrer les mérites de Staline que de camoufler les insuffisances et les erreurs du premier plan. Ce discours rencontre facilement l'adhésion de la base, car le petit peuple attribue la dégradation de son sort aux dirigeants locaux auxquels il a affaire. Le 1er décembre, à Leningrad, l'assassinat de Kirov, membre du Politburo, illustre le complot. Il entretient par la suite une atmosphère de crise et de tension au sein du politique. [...]
[...] Le stalinisme : le regard de Nicolas Werth A. Les tenants d'une continuité absolue entre léninisme et stalinisme A. Le regard de Nicolas Werth _ De 1924 à 1945 _ De 1945 à 1953 I à 1953 : un processus historique complexe A : un premier changement Après avoir formé un gouvernement de bolcheviks et de socialistes révolutionnaires de gauche, Lénine dissout l'assemblée. Dès janvier 1918 le pouvoir des soviets, jusqu'ici pouvoir par en bas qui s'était constitué au cours de l'année précédente se transforme en pouvoir par en haut Le pouvoir passe de la société à l'Etat, et l'Etat au parti bolchevique. [...]
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