« Sur la violence » est un texte relatif aux événements et aux discussions qui portent sur la violence au cours du XXe siècle. La thèse majeure que défend Arendt est que la violence a essentiellement une dimension instrumentale. Contrairement aux théories classiques qui font de la violence la source du politique, elle défend l'idée que l'usage de la violence correspond à une situation de désagrégation du politique et à un affaiblissement du pouvoir. Du fait de ce caractère instrumental, la violence ne peut avoir que des finalités à court terme, ce qui exclut son usage pour soutenir de grandes causes telles que la promotion de la révolution ou la défense du progrès ou de la réaction.
Au-delà de cet usage, elle perd toute justification et entraîne un cycle de violence sans fin. D'où viennent alors les idéologies et leur rationalisation de la violence ?
Au XXe siècle, le phénomène majeur qui explique le recours à la violence est la bureaucratie croissante. Comme Arendt considère que l'action, outre le langage, fait partie de l'essence de l'homme, la bureaucratie par sa limitation de l'action est potentiellement une source de violence du fait qu'elle empêche le renouvellement d'intervenir. Loin de considérer que la violence est liée à la dimension créatrice de la politique, elle montre au contraire qu'elle est le symptôme de la disparition du politique dans « le règne de l'Anonyme », expression qui métaphorise l'administration.
[...] Rester impassible devant une situation tragique peut apparaître irrationnel. C'est pourquoi, pour réagir de façon raisonnable, il faut en premier lieu être touché par l'émotion L'émotionnel ne s'oppose pas à l'irrationnel, mais à l'insensibilité (phénomène pathologique) ou à la sentimentalité (perversion du sentiment). L'irrationalité de la fureur et de la violence intervient lorsqu'elles s'en prennent à des leurres. L'apologie de la violence est plutôt le fait d'auteurs qui critiquent l'hypocrisie de la société bourgeoise, plutôt que de gens de gauche inspirés par la compassion et la justice. [...]
[...] La violence au XXe siècle 1. La disproportion de la violence comme moyen par rapport aux fins Le XXe siècle se caractérise par l'atteinte d'un point de perfection technique extrême des instruments de la violence. La partie d'échecs apocalyptique entre superpuissances succède aux affrontements guerriers qui ont constitué jusqu'à présent les conflits internationaux. Cette perfection technique est telle, que la violence qui en découle n'a plus de lien possible avec un but politique capable de justifier leur utilisation dans une guerre. [...]
[...] La foi irrationnelle du XIXe siècle dans un progrès illimité trouve une audience universelle et est liée au progrès de la science de la nature. Mais la science en général n'est nullement assurée d'un progrès indéfini. C'est le cas notamment des sciences de l'homme qui, parce qu'elles s'attachent à la connaissance des produits de l'esprit humain, comportent nécessairement des limites. Ce n'est pas pour rien si la révolte de la jeunesse s'accompagne de la glorification des universitaires, de la recherche et de la science. [...]
[...] Comme il est impossible de prévoir avec certitude les conséquences finales de nos actes, la rationalité de la violence est conditionnée à la réalisation d'objectifs à très court terme. Elle ne peut soutenir les causes et les révolutions, c'est pourquoi elle est davantage l'arme des réformes. Comme les tactiques de violence doivent se fixer des objectifs de très court terme, les pouvoirs établis ont tendance à céder plus facilement à des demandes déraisonnables, pourvu qu'elles permettent d'établir des réformes, alors que la violence est inefficace pour poursuivre des objectifs à long terme ou pour modifier profondément des structures. [...]
[...] Au départ, Marx estime que le rôle de la violence dans l'histoire est secondaire. La dictature du prolétariat ne doit pas durer indéfiniment et la violence est surtout le fait de l'Etat qui constitue un instrument de violence au service de la classe dominante. En revanche, Sartre dans sa préface aux Damnés de la terre fait l'apologie de la violence : il affirme qu'elle est un moyen pour le colonisé de se recomposer et de se faire homme. Cette affirmation est en contradiction avec Marx. [...]
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