Jacques Rancière part d'un constat : on assiste aujourd'hui, à l'intérieur même des démocraties, à la naissance et au développement d'un discours qui condamne la démocratie comme règne des désirs illimités des individus de la société de masse moderne. Il remarque que cette contestation ne vise pas les institutions et la manière dont le pouvoir s'exerce, mais bien plutôt les mœurs des peuples démocratiques. Ce qui est contesté sous le nom de démocratie, ce n'est pas une forme corrompue de gouvernement, mais une crise de la civilisation qui affecte la société et l'État à travers elle.
Jacques Rancière se propose d'essayer de comprendre les raisons de cette haine de la démocratie, de montrer sur quoi elle se fonde.
[...] On en reviendrait aux titres à gouverner naturels (naissance, savoir, richesse). La démocratie au contraire rime avec le respect du fait politique Nous avons vu que pour qu'il y ait politique, il faut qu'il y ait un titre d'exception, un titre qui s'ajoute à ceux par lesquels les sociétés petites ou grandes sont moralement régies. Nous avons vu que si ce titre d'exception est le rapport au divin, il se ramène en dernière analyse aux autres titres, qui sont la naissance, le savoir et la richesse. [...]
[...] La démocratie ne peut être responsable que d'une chose : de la préservation d'une dialectique entre le privé et le public, de l'impossibilité de l'annexion du pouvoir par certains groupes grâce à la possibilité de la contestation constante de n'importe qui. R2. : Le malaise demeure Le principal reproche que l'on peut faire à ce livre, c'est qu'une fois démontré que la démocratie n'est pas ce qu'on pense, mais autre chose, l'auteur s'arrête. Or si on supprime dans haine de la démocratie le mot démocratie, le mot haine demeure. [...]
[...] Le malaise, qui pourtant est à l'origine de l'écriture du livre, n'est pas traité. L'individualisme forcené, le consumérisme, la marchandisation, demeurent des choses inquiétantes, même si la démocratie est sauvée D'ailleurs, J. Rancière ne prouve absolument pas que ces travers ne sont pas liés à la démocratie. Il reconnaît lui-même que la vie démocratique comporte le double excès qui consiste d'un côté en la large participation populaire à la discussion des affaires publiques, qui aboutit facilement à une généralisation de la contestation militante et qui met en péril le bon gouvernement, et qui consiste d'un autre côté en le repli sur soi des citoyens qui deviennent totalement insoucieux du bien public, n'aspirant qu'à la satisfaction de leurs besoins individuels, ce qui sape l'autorité du gouvernement sommé de répondre à la spirale des demandes individuelles. [...]
[...] Ils s'agit pour eux de faire de démocratie non plus le nom commun à un mal et à un bien qui le guérit, mais le seul nom du mal qui nous corrompt. Les adversaires de la démocratie lui opposent le gouvernement pastoral Pour décrire la position des adversaires de la démocratie, Jacques Rancière expose la thèse de Milner, qui, par l'opposition historique, civilisationnelle et politique de la démocratie au judaïsme montre que la dégénérescence de la civilisation démocratique est liée à l'oubli du principe de filiation, que le judaïsme, lui, n'oublie pas. [...]
[...] Une autre remarque pourrait également porter sur le fait que Rancière sépare la vie politique et la vie sociétale, ce qui est loin d'être une évidence. On peut même penser que dans une vraie démocratie, il ne devrait pas y avoir de véritable coupure entre ces deux domaines, mais une continuité. En effet, et c'est là une lacune dans ce livre, on ne sait jamais où commence et où s'arrête la vie politique. Celle-ci n'est pas définie. Et comme une partie de l'argumentation de J. [...]
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