Né à Budapest en 1933, André Reszler a enseigné l'histoire des idées à l'Université d'Indiana (Bloomington) et à la Faculté des lettres de l'Université de Genève, dont il est professeur honoraire depuis 1998. Il est l'auteur d'une dizaine d'ouvrages sur des thèmes comme la mauvaise conscience européenne (L'intellectuel contre l'Europe), les mythes et la pensée politiques (Mythes politiques modernes, Mythes et identité de la Suisse, Le pluralisme) et l'histoire de l'Europe centrale, qu'il aborde notamment dans Le génie de l'Autriche-Hongrie.
Comme son titre l'indique, cet ouvrage a pour but d'étudier le « génie », c'est-à-dire ce qui fait la particularité, l'originalité, de« l'identité impériale, l'univers culturel, qui a fait la grandeur austro-hongroise et qui a culminé entre 1867 et 1918, c'est-à-dire de la création de la double monarchie à son effondrement à la suite de la défaite de la Première Guerre mondiale. »
André Reszler entend d'abord définir la notion de « génie » pour un pays. Chaque peuple, chaque pays, a une identité propre. Or, au XIX° siècle, trois états ont un point commun, celui d'avoir « une âme particulière », un « génie » qui en fait des « cas à part » : Il s'agit de la République Vénitienne, la Suisse et Autriche-Hongrie, qui peuvent être considérées comme des « anomalies historiques ». Au cours de l'ouvrage, l'auteur dessinera d'ailleurs de fréquents parallélismes avec ces autres états, qu'il a d'ailleurs étudiés. C'est cette hypothèse à la fois subjective et partiellement invérifiable d' « originalité de civilisation » qui est le point de départ de l'essai. La problématique et le plan de l'ouvrage sont annoncés explicitement dans l'introduction : l'auteur va chercher, à travers de l'histoire courte de l'Autriche-Hongrie en quoi cet empire présentait des aspects originaux, qui en ont fait un cas à part, sans pour autant lui permettre d'échapper à sa disparition, sort commun des empires européens. Autrement dit, pour comprendre les causes de l'écroulement de la monarchie, il est nécessaire de raconter l'histoire de sa construction de telle sorte que ses traits constitutifs soient clairement établis.
[...] Le marasme économique a des conséquences sur les institutions politiques. En 1915, le traité de Londres passé entre les futures puissances victorieuses prévoit le démantèlement de l'Empire austro- hongrois. En juillet 1917, à la conférence de Corfou, est établi le principe de la réunion des peuples slaves du Sud au sein d'un état commun. Après la guerre, le gouvernement provisoire improvise des remèdes en hâte, ne sait pas réagir et l'Empire s'effondre comme un château de cartes. Le 4 octobre, le Reishsrat vote le droit à l'autodétermination des peuples. [...]
[...] Ces revers ont pour conséquence d'amener Vienne à déplacer son centre de gravité vers l'Est, donc vers la Hongrie, plutôt que vers l'Ouest, c'est-à-dire vers les états allemands dominés par la Prusse. Comment l'empire autrichien est-il devenu l'empire austro hongrois ? Contrairement à une idée reçue, dans la construction de l'Autriche-Hongrie, c'est la sauvegarde des particularismes qui prédomine : Metternich affirme en 1849 qu' on ne doit pas anéantir l'individualité des provinces autrichiennes comme on ne doit pas toucher à la position de l'Empereur en tant que souverain et prince de chaque province. [...]
[...] Mais l'intégration se fait aussi au travers des élites autrichiennes et hongroises, de l'administration efficace et tatillonne (centralisée en Autriche, progressivement décentralisée en Hongrie), ainsi que sur l'armée multinationale au prestige symbolique et très attaché à l'empereur. Sous la double monarchie se développe une vie culturelle très dense à Budapest comme à Vienne. Un chapitre de l'ouvrage est consacré aux Arts, avec, il faut le reconnaître, une longue et fastidieuse énumération des princes/mécènes et du contenu de leurs collections respectives. Pendant des siècles, la dynastie des Habsbourg manifeste avec éclat et constance son intérêt pour les arts, les souverains tirant gloire des artistes associés à leur règne. [...]
[...] André Reszler parle à ce propos de vocation européenne, une vocation magistralement incarnée par la place unique que Vienne occupe au tournant du siècle dans la vie artistique de l'Europe. Deuxième partie : figures de décadence Dans la deuxième partie de son ouvrage, André Reszler examine les causes et décrit la désagrégation de l'Autriche-Hongrie. La thèse de l'auteur est que la disparition de l'empire était prédite par de nombreux contemporains, suite aux graves crises traversées par celui-ci (guerres napoléoniennes, printemps des peuples, défaite de Sadowa), mais qu'elle est survenue sur une modalité qui n'était pas prévue : la Première Guerre mondiale. [...]
[...] Avant d'entamer une analyse des propos de l'auteur, commençons une critique formelle de l'ouvrage. La bibliographie indiquée par l'auteur est riche et surtout diversifiée, provenant certes surtout d'auteurs germanophones ou hongrois, mais aussi anglo-saxons et français. L'auteur se réfère à des ouvrages historiques, mais aussi à des ouvrages contemporains de l'époque, des témoignages et la correspondance de personnalités qui ont vécu à cette époque ainsi que des ouvrages historiographiques, écrits à chaud En fin d'ouvrage, un index des noms cités sera très appréciable pour rechercher directement des informations précises. [...]
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