Cet ouvrage, intitulé "Fausse route", publié en avril 2003 a été écrit par Elisabeth Badinter. Actionnaire majeur du groupe Publicis dont elle est l'héritière et femme de Robert Badinter, ministre de la justice qui a notamment lutté contre la peine de mort, elle est agrégée de philosophie et maître de conférence actuellement à l'Ecole Polytechnique.
Peu après sa parution, ce recueil créa une polémique dans les mouvements féministes et chez les universitaires. En effet, Elisabeth Badinter, grande admiratrice de Simone de Beauvoir, critique vigoureusement dans ce livre la dérive d'un courant dit "séparatiste" et "essentialiste" qui véhicule une image victimisée et angélique de la femme, parallèle d'une culpabilisation du genre masculin dans son ensemble. Dénonçant les fondements biologiques de ce courant en opposition à la tradition culturaliste beauvarienne "On ne naît pas femme, on le devient", elle s'inscrit en faux contre la réforme constitutionnelle sur la parité et défend une vision caractéristique du modèle français de mode de relation de l'individu à la société.
[...] Un mot de trop ? La remarque de Katie Roiphe est ici encore éclairante. La vision angélique de la femme Parallèlement à cette vision apocalyptique de l'homme, est dessinée une vision spécifique de la femme. La théorie biologique de la femme Une des caractéristiques fondamentales du courant essentialiste est la réponse biologique qu'il apporte à la définition de la femme. En effet, ce courant met de côté la tradition culturaliste qui consiste, depuis Simone de Beauvoir, son ouvrage fondateur Le Deuxième Sexe, paru en 1949, à affirmer que la femme se définit non pas par ses spécificités biologiques ou sa capacité à enfanter, mais par les constructions sociologiques et économiques de la femme, produites par la société : "On ne naît pas femme, on le devient". [...]
[...] Elisabeth Badinter s'insurge contre ces stéréotypes selon lesquels la femme ne saurait pas faire la différence entre amour et sexe, contrairement aux hommes. Ces caractéristiques "appartiennent aux deux sexes " et la vision passive et soumise de la femme, qui ne saurait résister à la voracité primitive de l'homme, transformé en créature bestiale obsédé par le sexe, ne résistent pas à la réalité quotidienne des rapports entre les deux sexes. On risque donc ainsi de se couper de la population en prônant une sexualité illusoirement idéale qui fait abstraction de la spontanéité du désir et oublie le concept de pudeur. [...]
[...] La vision magnifiée de la femme En effet, cette vision naturaliste de la femme a conduit à développer des stéréotypes, du même acabit que ceux évoqués dans le livre grand public Les hommes viennent de Mars, les femmes de Vénus de John Gray. Les femmes seraient ainsi, selon Simone Veil, "moins soucieuses de leurs ambitions personnelles, les femmes veulent agir, parvenir, à des résultats concrets. Quitte à prendre des risques, à user de moins de forme, elles foncent avec détermination et courage pour faire aboutir leurs dossiers". [...]
[...] Cet cycle d'enfantement et de précarité est ainsi éminemment pernicieux en rendant dépendant la femme de son mari et lamine toute possibilité pour la femme de "faire ses valises" Essentialisme et confusion identitaire L'écrivaine évoque également les difficultés des hommes devant un discours qui "leur demande à la fois de conserver les vertus de leurs grands-pères (force protectrice, courage, sens des responsabilités) et d'acquérir celles de leurs grands-mères (écoute, tendresse, compassion). Ici, la philosophe semble faire référence au livre d'Eric Zemmour Le Premier Sexe, qui met en évidence, quelque soit sa qualité littéraire, la féminisation de la société : Dans notre société féminine, toute séduction est assimilée à une violence insupportable de l'infâme macho L'homme ne doit plus être un prédateur du désir. Il ne doit plus draguer, séduire, bousculer, attirer. Toute séduction est assimilée à une manipulation, à une violence, une contrainte. [...]
[...] L'écrivaine, grande admiratrice de Simone de Beauvoir, affirme que celle-ci "n'est pas étrangère, à la reconnaissance du droit à la contraception (loi Neuwirth de 1967) et du droit à l'avortement en 1975". Or, ce courant récuse toute cette théorie, en affirmant, comme Antoinette Fouque, que "la grossesse d'une femme, la gestation, est le seul phénomène d'acceptation par le corps, et donc par le psyché, d'un corps étranger." Les femmes sont donc dotées d'une "capacité d'accueil" et de vertus inscrites dans leur corps. [...]
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