Il y a 50 ans, Josué de Castro, médecin brésilien écrivait dans « Géopolitique de la faim » :
«… Il ne suffit pas de produire des aliments. Il faut encore qu'ils puissent être achetés et consommés par les groupes humains qui en ont besoin… ».
Comment expliquer les famines alors que la quantité de nourriture disponible à l'échelle planétaire excède largement les besoins ? Lorsqu'elle survient c'est que la population concernée n'a pas anticipé la diminution d'accès à la nourriture, que cette diminution soit liée à une circonstance :
- climatique (la sécheresse)
- économique (flambée du prix de la nourriture)
Les solutions pour enrayer une famine ou une pénurie alimentaire sont faciles si on peut agir pour :
- pouvoir intervenir à temps, être averti de la pénurie ;
- pouvoir parvenir jusqu'aux victimes de la faim ;
- s'assurer que ceux qui en ont besoin puissent accéder à la nourriture.
Pour abolir une famine, les trois conditions citées ci-dessus doivent être réunies. Si un peuple meurt aujourd'hui de faim c'est que l'une de ces trois conditions n'est pas réunie et c'est souvent en relation avec un contexte politique ou social particulier qui s'oppose à l'accès à la nourriture de la population.
3 types de famines :
- famine niée qui correspond à la famine « traditionnelle » qui visent à faire disparaître une population indésirable ou à la soumettre si cette population est jugée rétive à l'autorité politique. Nier la famine c'est empêcher que l'aide humanitaire se mobilise.
- famine exposée apparue et généralisée à la fin de la « guerre froide » : on ne cherche pas à faire disparaître la population mais on s'en sert comme « appât » ou « piège » à aides internationales ; les pénuries sont entretenues par les autorités politiques.
- famine créée : rien n'aurait dû faire basculer une population dans la famine mais les autorités suppriment l'accès à la nourriture. Les famines dites « vertes » survenant dans un contexte d'abondance de nourriture font partie de cette catégorie.
Ces 3 types de famines peuvent se mélanger, de niée, elle peut devenir exposée, de créée elle peut être niée, etc.
Toutes les famines du XX siècle se sont produites alors que l'offre de nourriture aurait pu être suffisante. Les volontés politiques ont provoqué la survenue de ces famines.
[...] Et elles sont aggravées depuis la découverte de pétrole. On affame les populations indésirables qui vivent dans les régions pétrolifères ainsi l'exploitation du pétrole peut se réaliser sans difficulté ; 2000, Ethiopie, famine exposée ; 1992-1995, Ex-Yougoslavie, famine créée (siège de Sarajevo, purification ethnique, etc.), Angola, Liberia, Sierra Leone, etc. On constate qu'aujourd'hui les famines sont devenues des choix tactiques des régimes ou des mouvements en quête de nouvelles puissances, elles sont sciemment provoquées. Chapitre 4 : Généalogie des famines contemporaines Une production alimentaire suffisante Lorsque le climat est invoqué dans la survenue d'une famine, il est rarement seul impliqué. [...]
[...] Chez les pauvres, plus de la moitié de leur revenu est consacrée à la nourriture. La malnutrition est un problème de sous-développement. Ceux qui ont faim n'ont pas assez d'argent pour s'acheter de la nourriture même si elle est disponible à proximité. Exemple de l'Inde où 200 millions de personnes souffrent de faim, alors que le stock céréalier indien représente 35 millions de tonnes. La famine produit de la géopolitique La famine est visible à l'œil, les gens sont maigres, émaciés, contrairement à la malnutrition où les signes physiques sont parfois plus insidieux. [...]
[...] La spéculation sur la nourriture provoque la montée des prix, les pauvres n'ont pas les revenus pour l'acheter. Bilan : morts ; 1975-1979, Cambodge, famine créée et niée, puis exposée en 1979 : Secondaire à la prise de pouvoir par les Khmers Rouges qui déplacent les populations, les campagnards en ville, les citadins à la campagne, éliminent les intellectuels, la famine est finalement révélée lors de la libération du pays par les Vietnamiens en 1979. Bilan : 1,5 million de morts ; 1975, Timor, famine niée : après l'annexion de l'île par l'Indonésie, les envahisseurs font plier la population par la terreur et la destruction de la nourriture. [...]
[...] Les 25% restants vivent en ville, n'ont pas d'accès à la terre, et travaillent pour acheter de la nourriture. Une crise économique peut faire grimper les prix des aliments et alors que se nourrir suffisamment devient difficile même pour ceux qui vivent en ville. En Asie du Sud-Est dans les années 1970, une personne sur trois souffrait de malnutrition. Aujourd'hui : plus qu'une sur cinq. En Afrique millions de malnutris dans les années 1970, environ 200 millions aujourd'hui. Pourquoi cela s'améliore chez les uns et s'aggrave chez les autres ? [...]
[...] Cette idée persiste jusqu'à la famine du Bihar en 1965-1966 qui débouchera à la révolution verte en Inde. Aujourd'hui, les greniers à blé sont pleins, l'Inde exporte même ses céréales. Alors pourquoi existe-t-il encore 200 millions de malnutris en Inde ? L'accès à l'alimentation comme outil de discrimination sociale et l'intervention des pouvoirs publics est déterminant Le statut social et politique des gens conditionne leur accès à la nourriture. Seuls certains groupes sont touchés parce que leur statut dans la société est considéré comme inférieur. [...]
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