"L’Europe des camps, la mise à l’écart des étrangers", sous la direction de Jérôme Valluy, Cultures & Conflits n°57, l’Harmattan, avril 2005

Résumé du document

Les pays de l'Union Européenne développent une culture politique de séparation et d'opposition à l'égard des migrants. Le visa Schengen constitue un élément de cette volonté de mise à l'écart des étrangers autres que ceux utiles à l'économie, et les camps en sont la matérialisation.
Leur prolifération actuelle montre cependant que la mise à l'écart a pris une ampleur nouvelle et que l'Europe a adopté des politiques de répression et d'enfermement des immigrés. Depuis quelques années, en effet, l'accent est mis sur l'enjeu sécuritaire que représentent les frontières et l'on assiste à la systématisation de la mise en détention des migrants.
C'est ce constat, avec celui de l' « inefficacité » des camps en tant que régulateurs des migrations, qui amène les auteurs à affirmer que la vraie raison de leur existence se situe dans l'ordre symbolique et qu'ils reflètent les transformations de la culture politique européenne, qui a pris un tournant sécuritaire.
Des camps en Europe admis car inéluctables (I), on est donc passés à « l'Europe des camps » (II), c'est-à-dire à une volonté politique de répression et de dissuasion de l'immigration dans laquelle les camps dans l'Union européenne ou à ses portes jouent un rôle clé.

Extraits

[...] Le règlement Dublin de 2003 implique que le premier pays d'entrée dans l'Union européenne est responsable du traitement de la demande d'asile d'un migrant, même si elle est déposée dans un autre pays de l'Union. [...]

[...] Il fait en effet apparaître une logique concertée, tendant, à travers une politique commune de visa européen, à organiser une division du monde entre, d'un côté, ceux qui peuvent circuler librement, et, de l'autre, ceux qui ne le peuvent pas Les camps, outils de l'Union européenne pour la gestion des migrations : Face à la pression exercée par l'immigration clandestine, une autre réponse au déficit de sécurité a été l'internement des migrants dans des camps. Les camps sont en effet en train de se multiplier en Europe ou à ses portes (cf. : Annexe : carte des camps). Les camps ont pris une place décisive dans la gestion des questions d'immigration et d'asile. Tous les pays de l'Union européenne procèdent à la mise à l'écart des étrangers trouvés sans titre de séjour sur leur sol. [...]

[...] Dans la réalité, cependant, l'exercice de ces droits est soumis à un fort aléa, étant donné l'imprécision et la complexité des législations, qui sont par ailleurs conçues pour laisser la plus importante marge de manœuvre possible aux autorités pour décider qui maintenir, combien de temps et où. La durée de la détention : La durée de détention est très variable d'un pays à l'autre. Dans certains pays, elle n'a juridiquement pas de limite, ce qui permet la détention de personnes pendant des années. [...]

[...] L'Europe des camps, la mise à l'écart des étrangers sous la direction de Jérôme Valluy, Cultures & Conflits l'Harmattan, avril 2005 Introduction Les pays de l'Union Européenne développent une culture politique de séparation et d'opposition à l'égard des migrants. Le visa Schengen constitue un élément de cette volonté de mise à l'écart des étrangers autres que ceux utiles à l'économie, et les camps en sont la matérialisation. Leur prolifération actuelle montre cependant que la mise à l'écart a pris une ampleur nouvelle et que l'Europe a adopté des politiques de répression et d'enfermement des immigrés. [...]

[...] Conclusion Les camps interrogent la politique migratoire de l'Union européenne. Ils reflètent en effet les incohérences d'une politique qui est essentiellement orientée vers la répression et la dissuasion de l'immigration. En cela, leur prolifération marque les progrès d'une approche sécuritaire de la question migratoire au détriment du respect des droits fondamentaux et des valeurs dont l'Union européenne se réclame. Les camps montrent également l'urgence de finaliser la politique commune en matière d'immigration, encore loin d'établir l'égalité de traitement des migrants qu'elle prévoit. [...]