Bertrand Badie, politologue français s'est attaché depuis les années 1990 à exposer sa théorie selon laquelle nous irions vers la fin des territoires. Cela signifie pour lui que l'État n'a parfois plus le contrôle d'un territoire entier, car d'autres évènements ou instances interfèrent dans la mission de contrôle étatique. C'est le cas sur des espaces en guerre, des espaces dont plusieurs États se veulent les propriétaires comme la bande de Gaza, etc. Deux autres évènements viennent, selon cet auteur, troubler la base territoriale de l'État : il s'agit de la mondialisation et de ce qu'il appelle la "crise des États ".
Dans son introduction, Bertrand Badie définit ainsi la mondialisation : "Constitution d'un système international qui tend vers l'unification de ses règles, de ses valeurs, de ses objectifs tout en prétendant intégrer en son sein l'ensemble de l'humanité." L'auteur s'inscrit dès lors dans le courant des sciences politiques lorsqu'il tente d'expliquer les défaillances de l'État et de l'exportation de son modèle.
Il a d'ailleurs collaboré à la rédaction d'un ouvrage avec Pierre Birnbaum intitulé Sociologie de l'État donnant un autre regard sur la formation des États que ceux véhiculés par les théories dépendantistes ou développementalistes très vivaces pendant les années 1970. Bertrand Badie, dans L'État importé de 1992 part du concept wébérien d'État légal rationnel pour expliquer en quoi l'État occidental est fondé sur la raison et que cette base rationnelle a vocation à s'exporter.
[...] Concernant la colonisation, les autorités ont longtemps véhiculé un message positif d'aide économique envers les pays en difficultés, d'apports de richesses, de capitaux en vue de futurs flux économiques et d'échanges commerciaux. Or, l'auteur nous rappelle ici que l'enjeu de la colonisation ne fut guidé que par des mécanismes politiques. Elle a fait intervenir des hommes politiques, a nécessité des relations diplomatiques etc. L'économie doit ici rester au second plan. Par ailleurs, aux XVIIe et XVIIIe siècles, le monde était européen et centré sur les enjeux européens. [...]
[...] Badie étudie ici l'imposition de l'État occidental, mais celle-ci a aussi été voulue par certaines communautés. Il ne s'agit pas de diaboliser l'Occident ici, mais plutôt de comprendre quelles ont été les interactions, les coopérations entre États occidentaux et États en voie de développement afin de s'acheminer vers un mode universel. Il s'agit dès lors d'évoquer les différentes stratégies et étapes qui conduisent un État à s'apparenter à l'Occident. Ces stratégies varient en fonction des États, mais semblent suivre deux logiques à savoir une volonté de modernisation conservatrice et des projets révolutionnaires. [...]
[...] Ce plaquage du modèle étatique à des États non préparés a conduit à une universalisation manquée selon Bertrand Badie. III Les échecs de l'État importé A À l'échelle nationale L'importation du modèle occidental génère des conflits principalement entre les élites au pouvoir et les minorités qui sentent le fossé se creuser entre elles et les politiques. Là se situe un des plus grands paradoxes : certes l'occidentalisation a la vocation universaliste de réunir tous les citoyens au sein d'un même objectif de solidarité politique, mais elle laisse de côté les groupes minoritaires qui revendiquent leurs particularismes. [...]
[...] Pour conclure son approche sur les apports de l'universalisme étatique, l'auteur évoque que la prétention universaliste est intégrée dans les mentalités occidentales et que dans le sens centre-périphérie les choses sont claires : il faut exporter le modèle étatique. En revanche, B. Badie expose qu'il est moins évident que, dans l'autre sens, l'importation se fasse dans de bonnes conditions. II Le comportement de la périphérie A La réception du modèle occidental par les importateurs Certes les Occidentaux ont eu et ont encore l'ambition d'étendre leur modèle d'État au monde entier. Cela dit, cette stratégie d'exportation n'aurait pu fonctionner sans l'accord et la collaboration des États non occidentaux. [...]
[...] Ainsi, des conflits sont nés entre Occident et Orient, entre Occident et monde musulman ou encore au sein même des communautés non occidentales. B. Badie donne l'exemple de pays comme l'Inde qui ont tiré du modèle étatique l'idée qu'un parti politique doit s'appuyer sur des élites diplômées. Un fossé s'est alors créé entre citoyens et élites politiques. Si ce fossé semble peu surprenant en Occident, il l'est considérablement pour un pays oriental. Il s'en est suivi de nombreux différends politiques ayant déchiré le pays. [...]
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