« Qu’est-ce que l’Occident ? » de Philippe Némo

Résumé du document

Partout dans le monde, l'abondance, la liberté individuelle, la musique, la télévision et la consommation effrénée, d'origine occidentale, suscitent une attirance et une volonté d'imitation. Mais cet Occident est plus senti que pensé et formalisé. Dans le même temps, cependant, des refus se manifestent. Pour le défendre on doit commencer par le rendre plus reconnaissable aux yeux de ses propres membres en essayant de définir les idéaux et les valeurs qu'il incarne. Il devient urgent de tenter de se faire une idée précise de la réalité de l'Occident. La civilisation occidentale a-t-elle une unité plus profonde que ses divisions géopolitiques ? A-t-elle des valeurs communes qui font d'elle un seul et même monde, la distinguant des autres civilisations ? Philippe Némo essaie de définir schématiquement l'Occident, en s'appuyant sur l'histoire et sur cinq moments-clés qui se sont structurés pour construire la culture des Occidentaux d'aujourd'hui.

Extraits

[...] Israël, à sa création fut un pays quasi occidental qui établit des institutions similaires à celles des Etats européens. La Shoah a provoqué un certain traditionalisme religieux qui va jusqu'à remettre en cause les valeurs de l'Etat de droit laïc et pluraliste. Le monde arabo-musulman touche à l'Occident par la Bible mais l'islam a transformé en profondeur l'éthique et l'eschatologie reçues du judaïsme et du christianisme. L'islam n'a pas non plus connu certaines formes politiques de laïcité et de démocratie avant les dernières décennies. [...]

[...] Tous ces événements permettent de définir l'Occident. Les sociétés qui sont de culture occidentale en profondeur ont connu les cinq événements et sont l'Europe occidentale mois la Grèce avec l'Islande, et les territoires administrés par ces pays, l'Australie, la Nouvelle- Zélande et l'Amérique du Nord. Il n'existe donc pas culturellement une identité américaine opposable à une identité européenne. Certains pays, que sont les pays d'Europe centrale, le monde orthodoxe, l'Amérique latine, et Israël, sont proches de l'Occident sans en être membres à part entière car ils n'ont pas connu certains des cinq événements. [...]

[...] Ils constituèrent, en quelques siècles un système élaboré de droit privé. En cela, les Romains ont révolutionné la conception de l'Homme et de la personne humaine. Rome, devenue de par ses conquêtes un Etat cosmopolitique, était obligé de faire vivre ensemble des hommes de provenances diverses. Puisque les justiciables étrangers ne connaissaient pas les formules traditionnelles, le préteur pérégrin qui reçoit mandat de régler les litiges ne pouvant tomber sous le droit civil traditionnel, fut autorisé à qualifier les crimes et délits par des mots et des concepts compréhensibles sans ambiguïté pour les intéressés. [...]

[...] Pour qu'un authentique dialogue des civilisations, mené en vérité, débouche sur de nouveaux schémas de pensée, il faudrait que la civilisation occidentale qui présente des traits universels ne s'efface pas dans le multiculturalisme ou le métissage culturel. Mais en même temps il ne faudrait pas comme l'affirme l'essayiste Jean-Claude Guillebaud qu'il se barricade dans le refus de l'autre, comme s'il se trouvait désormais bétonné, clos sur lui-même, inaccessible à l'interrogation. Faisant cela, il se "communautarise" à sa manière et devient du même coup infidèle à cela même qui le constitue. [...]

[...] Les Grecs ont inventé la science. A mesure que se consolide l'Etat, la religion ne peut plus imposer l'unanimité de ses dogmes. Différentes hypothèses sur le kosmos peuvent être discutées par les savants comme les différentes propositions d'action publique le sont par les orateurs politiques. C'est cette forme de théories que tendent à prendre, désormais, les investigations scientifiques des Grecs. C'est alors que sont portées à maturité les grandes disciplines scientifiques comme les mathématiques, la médecine, l'astronomie, la biologie, les sciences sociales. [...]