Depuis une vingtaine d'années, le concept d'intégration s'est imposé dans le débat public et dans la recherche universitaire pour évoquer, en règle générale, l'évolution de la place des migrants dans notre société. Aux yeux d'un certain nombre de sociologues, le mot est aujourd'hui décrié, il exprimerait le « point de vue du dominant sur le dominé » en pointant du doigt les efforts que doivent accomplir les migrants pour trouver une place que la société refuserait en réalité de leur accorder. Ce terme a pourtant sa pertinence aussi bien dans la recherche que dans le débat public. Il s'inscrit dans une tradition de la recherche sociologique dont Durkheim et Marcel Mauss ont été les pionniers. S'ajoute le fait qu'« aucun concept n'est à l'abri des critiques, puisque aucun n'est indépendant de l'utilisation qui en est faite dans les débats publics. […] il importe de garder à l'esprit qu'un concept n'a pas de définition en soi, c'est un instrument d'intelligibilité : il doit être jugé sur sa valeur heuristique. » Quelque soit le terme officiel employé, « intégration » ou « assimilation », les politiques mises en œuvre dans les grands pays d'immigration (Grande-Bretagne, Allemagne, France) ont le même objectif : « faire participer toutes les populations à la vie collective » Dans ce livre, Dominique Schnapper nous invite à comprendre l'évolution de ce processus pour mieux saisir les difficultés auquel il se heurte aujourd'hui alors qu'il garde toute son importance pour construire l'avenir de notre société.
[...] Les mécanismes de redistribution de l'Etat providence ont donc constitué un levier essentiel d'intégration. Cette intégration est aujourd'hui en crise comme le démontrent l'affaiblissement des institutions, la crise de la représentation politique, la désaffection à l'égard des affaires publiques comme les faibles effectifs des organisations syndicales et politiques. Le succès des mouvements associatifs, souvent célébré, ne remplace pas les anciennes formes de militantisme : nombreuses sont les causes provisoires dans le but est avant tout d'obtenir des subventions ou des décisions liées à des intérêts catégoriels. [...]
[...] Livre pionnier dans cette recherche, The Polish Peasant de Thomas et Florian Znaniecki introduit le concept de désorganisation pour expliquer le comportement souvent déviant des immigrés polonais : ils ne pouvaient plus respecter les règles d'une société qu'ils avaient quittée, ils n'avaient pas encore adopté celles de la société dans laquelle ils étaient arrivés. Le processus d'assimilation suppose par conséquent une phase de transition durant laquelle l'appartenance à des groupes ethniques se modifie progressivement et aide les individus à s'adapter par étape à la vie collective de la société d'accueil. Selon Robert K. Merton, ce processus d'intégration dépend de la conjugaison entre les aspirations culturelles des individus et les voies d'accès à ces aspirations ; l'autre variable concerne la distribution objective des chances d'accès à ces aspirations. [...]
[...] S'agissant des migrants et de leurs descendants, on observe également une certaine convergence européenne dans les politiques d'intégration, notamment l'absence de discrimination positive sur des critères ethniques, la moindre importance accordée à la reconnaissance des identités depuis quelques années : les exigences démocratiques et l'évolution propre à l'Etat providence conduisent tous les pays européens à adopter en fait une politique d'intégration en respectant les identités de chacun, tout en limitant ou en contrôlant leur manifestation dans l'espace public Mais là encore, chaque pays conserve ses spécificités par le biais des politiques mises en œuvre, mais plus encore au regard des évolutions socio- économiques qui affectent le pouvoir d'intégration de la société d'accueil. Dans le cas de la France, D. Schnapper estime que les enfants de migrants sont d'abord victimes de la préférence française pour le chômage Une partie minoritaire d'enfants d'immigrés, dont la violence traduit les frustrations, est bel et bien en situation d'échec d'intégration faute d'avoir les moyens de s'adapter à un monde dont les valeurs sont celles de la classe moyenne. Une minorité qui a cependant une forte valeur symbolique au point d'éclipser la situation satisfaisante de la majorité. [...]
[...] Une tendance à la communautarisation est pourtant bien perceptible en France et dans les autres pays européens. Pour l'auteur, l'erreur serait de vouloir répondre à ces revendications particularistes sans donner les moyens à chacun de participer à la vie commune. Conclusion A trop s'en tenir à l'action sociale dont les effets pervers sont aujourd'hui flagrants, notre démocratie en vient donc à laisser de côté les autres ressorts de l'intégration qui passent par la citoyenneté, car l'intégration de la société ne peut reposer exclusivement sur les politiques sociales, les seules satisfactions matérielles ne suffisent pas à assurer le lien entre les hommes nécessaire au maintien de l'unité politique La question de l'intégration des populations immigrées renvoie donc à l'ensemble du processus d'intégration de notre société démocratique. [...]
[...] Ses enseignements sont pourtant très utiles. L'enquête a confirmé que les comportements familiaux s'alignaient progressivement sur les normes locales, bien que de manières inégales selon les origines. si l'on prenait en compte des critères tels que le taux de mariages ou d'unions mixtes le souhait de retourner dans le pays d'origine, la pratique religieuse, la participation aux élections, la langue la plus couramment parlée. Quelle que soit leur origine, les enfants d'immigrés ont une sociabilité proche de celle des autres Français, comparée à celle de leurs parents. [...]
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