La légende, noire ou dorée, de l'école de la IIIe République subit d'intéressantes révisions dans les années 90. Anne-Marie Thiesse fait oeuvre utile en invitant à réviser une certitude : celle qui conduit à penser que la culture scolaire républicaine a nié les identités régionales. Mais c'est assurément Jean-François Chanet, dans L'école républicaine et les petites patries, qui provoque une véritable avancée dans la perception de l'école républicaine sous la III e République. Il a mis à mal l'idée généralement admise que les « patois », la culture patoise, avaient été systématiquement pourchassés dans les écoles républicaines au nom de l'unité nationale. Comme Mona Ouzouf l'a souligné dans la préface, cette avancée s'opère par la volonté de l'auteur de « se tenir à l'intérieur de la classe » et de coller aux réalités scolaires en menant une enquête pragmatique et rigoureuse, plutôt qu'à travers la perception qu'en avaient les administrations et les élites.
[...] La langue parlée par le peuple s'est ainsi trouvée au centre de cette lutte républicaine pour unir le peuple français. Prise en otage, victime de cette bataille essentielle, elle en a fait les frais dans certaines régions. Mais on ne trouve aucune trace de volonté d'anéantir les langues régionales depuis les discours de Jules Ferry jusqu'à la Chambre des Députés. De la même façon, le dictionnaire de l'enseignement primaire de Ferdinand Buisson ne prône pas une telle disparition. Pour autant, il ne s'agit pas de passer sous silence les méthodes d'interdit brutal de pratique de la langue régionale ou certaines déclarations ministérielles de l'époque faites à l'emporte-pièce. [...]
[...] L'école républicaine et les petites patries 1940, J.-F. Chanet La légende, noire ou dorée, de l'école de la IIIe République subit d'intéressantes révisions dans les années 90. Anne-Marie Thiesse fait oeuvre utile en invitant à réviser une certitude : celle qui conduit à penser que la culture scolaire républicaine a nié les identités régionales. Mais c'est assurément Jean-François Chanet, dans L'école républicaine et les petites patries, qui provoque une véritable avancée dans la perception de l'école républicaine sous la IIIe République. [...]
[...] L'école n'a pas eu la rigueur dogmatique qu'on a pu lui prêter et d'autres facteurs sont rentrés en ligne de compte. Les parents, les lumières de la ville, la culture de la réussite ont également joué un rôle dans cette intégration de la culture nationale au sein des petites patries. Plus qu'une acculturation, sous la IIIe République on peut réellement parler d'appropriation de la part des petites patries, qui se sont francisées sans rejeter leur culture, et de la nation, qui s'est finalement appuyée des cultures patoises pour trouver son unité. [...]
[...] Face à ce schéma, l'école républicaine aurait eu pour tâche d'inculquer aux élèves le sentiment d'appartenance à la grande patrie. En effet, le lendemain de 1870 était marqué par une obsession de l'unité nationale : la Révolution de 1789 divise entre héritiers et réactionnaires, l'urbanisation entre urbains et ruraux, même la religion, loin de fédérer comme auparavant, divise entre croyants et sceptiques. Enfin, l'amputation de l'Alsace et de la Lorraine a renforcé la menace séparatiste. Face à toutes ces lignes de force, Chanet se propose d'analyser si l'école de Ferry a uniformisé les petites patries pour former une grande patrie, de comprendre si elle est un instrument de déracinement dans la conception de Barrès ? [...]
[...] Ainsi, dès que les menaces séparatistes sont apparues impossibles, la République a respecté les mœurs locales ou s'en est accommodée lorsqu'elle ne pouvait pas les changer. Progressivement on assiste même à des incitations de la part des administrations à vanter les mérites de sa petite patrie et de ses richesses complémentaires à celles de la nation. Le chemin de la francisation a été, semble-t-il, bien plus sinueux que celui d'un simple effacement de la culture locale. La direction de la politique de l'école n'a jamais été uniforme. [...]
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