Le désenchantement démocratique est un ouvrage collectif du CEVIPOF (Centre d'Etude de la Vie Politique Française) - laboratoire de Sciences Po Paris et unité mixte de recherche du CNRS – réalisé sous la direction de Pascal Perrineau, président de ce dernier et donc observateur et analyste privilégié de la vie démocratique française, qui a composé l'œuvre en reprenant certaines contributions d'un colloque tenu le 13 décembre 2001. Le but de celui ci était d'analyser l'évolution du lien politique entre le citoyen et le pouvoir démocratique, anticipant de fait assez bien le séisme politique que devait constituer quelques mois plus tard le 21 avril 2002, dont les caractéristiques ne représentent finalement que l'aboutissement d'une longue évolution de la démocratie française aux effets observés depuis longtemps et qu'il est possible de résumer en cinq points : le creusement d'une « fracture civique » causée par la distance entre citoyens et personnalités politiques, la hausse de l'abstention comme expression d'une protestation politique en plein essor chez des populations pourtant traditionnellement très politisées comme les cadres et les intellectuels, le faible score des partis de gouvernement annonçant la fin du quadrille bipolaire, une certaine volatilité électorale se manifestant dans l'absence de réélection d'une majorité législative depuis 1988, et enfin l'émergence d'une identité citoyenne de plus en plus critique marquée par un cynisme croissant vis à vis du gouvernement alors même que la valeur démocratique tend à s'universaliser.
[...] D'une part, à cause de son but : visant à déterminer si la délinquance des jeunes est ou non un facteur de politisation, elle aurait davantage eu sa place dans la seconde partie étudiant le mouvement des individus vers la démocratie. D'autre part, ses conclusions (assez prévisibles de surcroît) s'éloignent souvent du sujet strictement politique, statuant par exemple qu'on observe moins de délinquance chez les classes supérieures. Pour autant, la thèse du texte semble intéressante : la délinquance joue un rôle politique fondamentalement ambivalent, car si les délinquants hésitent moins à protester sur l'injustice du système et commencent en ceci à se situer politiquement, leurs actes sont aussi un facteur de désorganisation sociale qui contribue à miner la démocratie. [...]
[...] Gil Delannoi nous rappelle alors que ce sont nos sociétés qui ont délibérément repoussé l'hypothèse du mode de tirage au sort à cause de leurs caractéristiques finalement éloignées de la Grèce antique, en particulier un fort individualisme qui revendique le droit à l'apolitisme, le besoin d'un Etat fort qui implique une certaine indépendance de décision, et enfin cette considération commune posant l'économie comme plus puissante que la politique. Face à ces remarques de Gil Delannoi, le lecteur peut dès lors se faire une remarque rassurante : si le mode de l'élection fut jadis notre choix, la déception qu'il suscite maintenant ne signe pas l'arrêt de mort de la démocratie, car il n'appartient qu'à nous de modifier le fonctionnement de cette dernière. [...]
[...] Ceci s'explique, selon lui, par la segmentation des sociétés qu'a accéléré une mondialisation coupable d'affaiblir l'Etat Nation, matrice de l'intégration démocratique, et débouchant de ce fait sur l'essor des corporatismes et la prolifération des sources de pouvoir comme dans le cas des relations professionnelles où les actionnaires et consommateurs par exemple viennent s'interposer au sein du traditionnel tryptique employeurs-syndicats-Etats. Si bien que selon l'auteur, les ‘contextes de régulation' les plus récents façonnent peut-être un nouveau type d'action démocratique ( ) intermédiaire qui se situe entre la classique ‘démocratie représentative' et la mythique ‘démocratie directe' ».(page 240). [...]
[...] Thierry Vedel, d'abord, tente d'évaluer objectivement le potentiel d'internet comme vecteur de stimulation démocratique. Internet, en effet, présente l'intérêt d'apporter une réponse technique à un problème politique qui s'organise autour de trois axes : l'information des citoyens, susceptible d'être accrue sans limites et à peu de frais pas internet grâce à la possibilité de numériser une infinité de données ; la discussion, pour laquelle internet pourrait jouer le rôle d'une sorte d'agora mondiale par son aptitude à effacer les frontières géographiques, mais aussi à vivifier le débat grâce à l'anonymat libérant des tabous ; et enfin la prise de décisions politiques, qu'internet pourrait fluidifier en servant par exemple de support à des enquêtes publiques, comme c'est déjà le cas dans la ville de Bologne. [...]
[...] Si bien que seules quelques remarques périphériques ressortent comme véritablement intéressantes dans le cadre de notre bilan démocratique : d'une part, il est noté que le capital culturel des individus freine la conflictualisation car ils essayent de se comporter en individus civilisés ce qui peut expliquer pourquoi nos sociétés au taux d'élévation culturelle toujours plus élevé tendent à souffrir d'apathie politique ; d'autre part, les auteurs soulignent une tendance humaine naturelle à l'opportunisme de la politisation, ce qui semble percutant, tant cette dernière semble appelée à s'étendre dans le cadre de nos démocraties de plus en plus individualistes : certaines femmes, par exemple, ne s'offusquent des problèmes de sexisme et de parité que devant d'autres femmes pour devenir leur leader, tandis qu'elles s'effacent sur ce même sujet devant des hommes. Le deuxième article, réalisé par Camille Hamidi et Nonna Mayer, concerne plus directement la vigueur de notre démocratie puisqu'il se propose d'explorer la relation entre l'appartenance associative, prise comme mesure du capital social, et l'engagement civique et politique en France (page 131). [...]
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