« Ce sont les Grecs, somme toute, qui ont découvert non seulement la démocratie, mais aussi la politique, l'art de parvenir à des décisions grâce à la discussion publique, puis d'obéir à ces décisions, comme condition nécessaire pour une existence sociale civilisée. » Entre hommage au formidable héritage hellénique et posture critique, l'éminent spécialiste de l'histoire antique, Moses I. Finley (1912-1986) s'attache, dans cette œuvre, à rendre compte de deux expériences de démocraties à vingt-cinq siècles d'écart.
L'ouvrage de l'historien américano-britannique M. Finley, Démocratie antique et démocratie moderne est un grand classique de science politique et de philosophie politique. À travers trois grandes parties, l'auteur pose des problématiques et des hypothèses audacieuses et tente de montrer les lignes de ruptures et de continuité entre démocraties antiques et modernes.
M. Finley qui disait que « toute polémique est une façon d'avancer » livre avec cet ouvrage une réponse à un courant de penseurs « élitiste » qui considère que l'apathie et le désintéressement sont bons pour la démocratie ; en même temps ces auteurs craignent ce qu'ils nomment « l'extrémisme », c'est-à-dire des individus qui souhaitent prendre une part plus active au processus de décision politique. L'historien américano-britannique s'oppose violemment à ces conceptions et tente de montrer, à la lumière de la démocratie directe athénienne, en quoi ces idées sont fausses et dangereuses. M. Finley répond également à ces mêmes auteurs qui considèrent que la Grèce Antique n'est pas un exemple valable pour comprendre le fonctionnement de nos démocraties contemporaines.
Ce travail est une synthèse et un résumé du livre Démocratie antique et démocratie moderne en même temps qu'il s'appuie sur des références extérieures pour approfondir ou critiquer des éléments développés par Moses Finley.
[...] A cette époque, au Ve siècle av. J.-C., Finley relève que le premier amendement à la Constitution des Etats-Unis aurait été impensable celui- ci stipule que Le Congrès ne fera pas de loi concernant l'établissement d'une religion officielle ou restreignant la liberté de parole à Athènes. Et ceci pour deux raisons : d'une part, parce qu'en Grèce Antique, la religion était étroitement liée à l'Etat, d'autre part parce que chez les Anciens, La liberté, cela signifiait le règne de la loi et la participation au processus de prise de décision, et non la possession de droits inaliénables[33]. [...]
[...] Ainsi, il n'y avait pas d'impérialisme économique au sens moderne que l'on donne à ce terme. Nous sommes donc obligés de chercher des avantages invisibles, ou du moins non mesurables. L'un d'entre eux était sûrement la possibilité pour Athènes d'engager des dépenses publiques considérables, extraordinaires, comme le grand programme de construction sur l'Acropole, dans une large mesure aux frais de ses sujets, c'est-à-dire sans ajouter encore au point déjà lourd des liturgies que supportaient les citoyens plus riches. Le second avantage, c'était la force d'attraction du pouvoir en tant que tel, difficile à évaluer, mais bien réel mêlé malgré son caractère psychologique, immatériel, plus que financiers[23]. [...]
[...] Comment expliquer ce paradoxe ? L'explication des historiens modernes est réfutée par Finley car celui-ci considère qu'ils se sont beaucoup trop focalisés sur le régime politique athénien et ont oublié que derrière l'intolérance il y a toujours la peur, quelle que soit la forme de gouvernement. L'auteur pose la question : Qu'est-ce qui effrayait les Athéniens dans ce dernier tiers du Ve siècle av. J.-C. pour que soient acquis des condamnations et des châtiments ? [ ] Ce qui effrayait les Athéniens, c'était la disparition d'un mode de vie élaboré pendant un demi-siècle, sur les bases de l'empire et de la démocratie [ Sur le front de bataille, le moral athénien se maintenait bien ; sur le front politique aussi [ Les Athéniens craignaient par contre que les fibres religieuses et morales de la communauté ne fussent atteintes par la corruption des jeunes gens et tout particulièrement, des jeunes gens appartenant à l'élite sociale. [...]
[...] Ainsi, la différence entre démocratie antique et démocratie moderne est plus ténue lorsque l'on recontextualise et replace ces expériences dans un univers historique et technologique donné. Les moyens modernes d'information et de communication permettent de penser l'idée de démocratie au-delà des frontières propres au monde grec ; de plus, lorsque M. Finley prononce sa conférence en 1972, internet n'existe pas et l'on peut raisonnablement imaginer que cet outil puisse être au service d'une démocratie directe ou semi-directe se rapprochant de celle des Grecs. [...]
[...] Le philosophe français Cornelius Castoriadis, le concept d'autonomie est central dans son œuvre explique : Survient alors une création historique, pour autant encore que nous sachions, qui a lieu pour la première fois en Grèce ancienne et qui est ensuite reprise, avec des traits tout à fait nouveaux, en Europe occidentale, à partir de la fin du Moyen Age. C'est la création historique qui fait être l'autonomie non pas comme clôture, mais comme ouverture. Qu'est ce que cela veut dire ? Que dans ces sociétés, aussi bien en Grèce Ancienne qu'en Europe moderne, émerge une nouvelle forme de l'existant, de l'être social-historique, et même de l'être tout court : ces sociétés mettent elles-mêmes en question leur institution, c'est-à-dire la loi de leur existence. [...]
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