En 1976, dans le système politique présidentialiste d'une Ve République qui n'a pas connu la cohabitation, F. Fonvielle-Alquier écrit Plaidoyer pour la IVème République . En effet, les deux républiques précédentes sont encore présentes dans les esprits des citoyens et des journalistes politiques. L'auteur critique la Ve en affirmant qu' « entre le Gouvernement et le Parlement, la Ve ne tient pas la balance égale ». Selon lui, l'exécutif agit dans le champ de compétence habituel du législatif (« étant entendu que la fonction législative englobe à la fois la fabrication des lois et le contrôle des faits et gestes du pouvoir »). Il s'ensuit que les principes de séparation (l'exécutif intervient dans le législatif) et d'équilibre (l'exécutif possède beaucoup plus de prérogatives que le législatif) des pouvoirs ne seraient pas respectés. Comme le second paragraphe et le titre du livre l'indiquent, F. Fonvielle-Alquier oppose à cette Ve (pseudo-)république exécutive les IIIe et IVe Républiques. Un rapide examen de l'ordre d'apparition des pouvoirs exécutif et législatif dans les constitutions de ces trois Républiques corrobore cette opposition. Dans la loi du 25 février 1875, l'art. 1er indique la primauté du pouvoir législatif, alors que le Président est « relégué » à l'art. 2 (le président du Conseil n'étant même pas mentionné). En ce qui concerne la constitution de la IVème République, son Titre II traite du Parlement, le Président de la République et le Conseils des Ministres n'étant évoqués qu'aux Titres V et VI. Au contraire, pour la Vème République, le Titre II s'intitule « le Président de la République », le III, « le Gouvernement ». Il faut attendre le Titre IV pour que les prérogatives du Parlement soient précisées.
Il faut maintenant examiner plus précisément les relations entre les pouvoirs exécutif et législatif sous les trois dernières républiques, afin d'évaluer l'exactitude de la thèse de l'auteur. Par comparaison avec ses deux prédécesseurs, le Ve République consacre-t-elle elle une telle prégnance d'un pouvoir (exécutif) sur l'autre (législatif) que les principes de séparations et d'équilibre des pouvoirs s'en trouveraient contredits ?
L'examen de la question du point de vue du processus législatif doit s'accompagner d'une étude comparative de la fonction de contrôle de Parlement dans les trois dernières Républiques.
[...] Contrairement aux deux Républiques précédentes, le contrôle du gouvernement sous la Ve n'appartient pas uniquement au Parlement A. La responsabilité du gouvernement devant le Président est caractéristique de la Ve République Dans les trois dernières Républiques le Parlement contrôle le gouvernement : Sous la IIIe République, le Conseil des Ministres est responsable devant le Parlement (l'Assemblée Nationale et le Sénat), conformément à l'art de la loi du 25 février 1875. De même, la Constitution de 1946 prévoit la responsabilité du Gouvernement devant l'Assemblée (art. [...]
[...] Le fait que la fabrication de la loi n'appartienne pas seulement au Parlement sous la Ve n'est pas nécessairement synonyme d'un plus grand déséquilibre A. Les compétences de l'exécutif dans le processus législatif sont relativement étendues sous la Ve République Prépondérance conférée à l'exécutif par les règles constitutionnelles : Ordre du jour Bien que l'initiative des lois soit donnée au Premier Ministre et à l'Assemblée Nationale (art. le Gouvernement a la priorité pour la fixation de l'ordre du jour à l'Assemblée (art avant la révision du 4 août 1995). [...]
[...] En outre, sous la IVe République, les Gouvernements démissionnèrent souvent, avant la censure, simplement parce qu'ils avaient perdu la majorité simple ou que la confiance (art. 49) leur avait été refusée. Par conséquent, la durée moyenne des Gouvernements fût de seulement huit mois sous la IIIe République, et six sous la IVe, dont le plus long Gouvernement (G. Mollet) n'a duré que 1 an et 4 mois. Par ailleurs, le principe de la double investiture de la IVe (constitutionnalisée par l'art de la loi du 7/12/1954 modifiant l'art de la Constitution) a permis de détruire un Gouvernement avant même sa formation officielle. [...]
[...] Ce procédé est réutilisé au profit de Poincaré en 1926, en raison des difficultés financières importantes de la France. C'est également le cas pour Doumergue en 1934 et Laval en 1935. Au total, entre 1924 et 1939, les décrets-lois furent usités douze fois. Contrairement à ce qu'affirme Fonvielle-Alquier en parlant d'« exception à partir des années 1930, [c'est] un procédé normal de gouvernement Le schéma est à peu près identique pour la IVe République. Malgré l'art précité, le procédé de la loi-cadre (et celui de délégalisation) est utilisé dès le 17 août 1948. [...]
[...] Le Premier Ministre choisi par le Président doit nécessairement être acceptable pour l'Assemblée Nationale, comme le souligne le communiqué du RPR et de l'UDF en 1986 : toute personnalité [ ] qui serait sollicitée par le Président de la République pour exercer les fonctions de Premier Ministre s'assurera, avant d'accepter, [qu'il] bénéficiera du soutient nécessaire de l'ensemble des forces composant la majorité De plus, la déposition d'une motion de censure permet quand même à l'opposition d'obliger le Gouvernement à s'expliquer. La Constitution de la Ve République consacre un monisme réalisé en cas de cohabitation. [...]
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