Dans "La sociologie de l'action publique : de la socio-histoire à l'observation des pratiques (et vice-versa)", le sociologue et politiste Vincent Dubois propose dans son texte d'aborder les politiques publiques autrement que par une conception séquentielle et spontanée, caractérisée par le schéma trop classique conception/exécution. Il insiste en effet sur la nécessité de les analyser dans une perspective socio-historique, complétée par la sociologie des pratiques « en train de se faire ».
Dans "Sociologie de l'action organisée et analyse des politiques publiques : deux approches pour un même objet ?", Christine Musselin, directrice de recherche au Centre de sociologie des organisations, s'interroge sur la spécificité de l'analyse sociologique lorsqu'elle porte sur l'action publique. Cette problématique lie deux approches qui, en s'intéressant à des objets similaires, entretiennent des relations étroites. Elle établit une comparaison portant sur trois dimensions : la construction des objets de recherche d'abord, le rôle des enquêtes empiriques ensuite, et enfin les caractéristiques de l'action publique qui découlent de ces deux perspectives.
Enfin, dans "Mise sur agenda et controverses : approche comparée du cas des OGM en France et aux Etats-Unis", Pierre-Benoît Joly, directeur de recherche à l'INRA, et Claire Marris, chercheuse à l'INRA proposent d'aborder la question des liens entre les politiques publiques et le débat social. A travers une analyse comparative entre les Etats-Unis et la France sur le débat des OGM, ils mobilisent les notions de mise sur agenda et de controverses publiques. A partir de la frame analysis, ils tentent de comprendre comment la question des OGM s'est constituée en problème public à l'issu d'un processus de compétition de cadrages concurrents du problème. Le nœud de l'analyse est la publicisation du problème.
[...] Par le biais des médias notamment, les acteurs et les pratiques collectives se transforment et le cadrage se déplace. Toutefois, les exemples développés par V. Dubois sont difficilement applicables au cas des OGM, notamment l'évolution du rôle du guichetier. Cette divergence peut s'expliquer, pour reprendre la distinction opérée par C. Musselin, par le fait que l'auteur, dans son approche sociologique, entre dans une analyse microscopique, portée sur les petits fonctionnaires à la différence des analystes des politiques publiques qui restent dans des analyses de portée macrologique. [...]
[...] Les analystes privilégient, dans leur entrée par la décision, l'analyse macrologique (par le changement et la production de politiques publiques). La construction de l'objet de recherche passe par l'enquête. C. Musselin la présente, dans le cadre d'une démarche inductive, comme le point de départ de l'analyse. Le sociologue va constituer une théorie à partir de données empiriques qu'il aura réunies sur la base d'entretiens, d'observations, de lectures. Le terrain révèle donc les problématiques à poursuivre au lieu de les vérifier. [...]
[...] C'est la construction politique du social (et réciproquement) qui érige une question parmi tant d'autres au rang de problème politique. Face aux perceptions concurrentes du problème, c'est bien la catégorisation (et donc la diversité des répertoires de perception) et l'enjeu du débat dans les arènes publiques qui sont mises en parallèle. La catégorisation comme attribution de sens rejoint le concept de cadre de Goffman utilisé dans la frame analysis qui permet l'alignement des cadres et donc d'établir la mobilisation. V. [...]
[...] Compte tenu de la multiplicité des problèmes existants, un processus de sélection s'impose. La construction sociale des problèmes contribue alors à la constitution des problèmes publics. Ces derniers sont dotés de propriétés intrinsèques qui expliquent la publicisation du problème (élargissement de l'audience): la question de la causalité et de la responsabilité, l'identification des publics concernés, la puissance des symboles manipulés et l'existence de solutions. Au-delà de la construction médiatique, l'usage de la frame analysis permet d'expliquer la mobilisation des acteurs et l'usage qu'ils font de leurs répertoires de cadres dans un espace public différencié : les arènes publiques, lieux symboliques dans lesquels les problèmes sont formulés et amplifiés Le problème public s'inscrit alors dans une trajectoire construite par des épreuves qui contribuent à la requalification des configurations. [...]
[...] Musselin aborde l'action publique telle que la sociologie des organisations la donne à voir. Elle apparait d'abord comme morcelée et moins cohérente car l'analyse de travaux microscopiques permet davantage d'obtenir des résultats précis que généraux. L'analyse d'un secteur aboutit à ce qu'elle appelle des cohérences partielles Mais elle qualifie paradoxalement l'action publique par sa continuité. En effet, les portées mésologiques des analyses leur confèrent une certaine élasticité et une résistance au changement, qui est perçu, non pas comme une rupture, mais de manière progressive et continue. [...]
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